La Chronique Agora

Le monde entier peut-il être japonais ?

taux d'intérêts pèsent sur la croissance

La BCE s’enfonce en Absurdie. Dans ce nouveau continent financier à la dérive, du crédit sera créé pour rembourser la taxe des taux négatifs.

Les banques sont malades des taux négatifs. L’indice Eurostoxx banques a perdu plus d’un tiers de sa valeur depuis le début de l’année. Mario Draghi a donc déclaré hier à Francfort qu’il allait continuer à aider les banques.

Outre les nouvelles injections de liquidité déjà annoncées en début de mois, les banques ne seront plus frappées de taux négatifs lorsqu’elles mettront des liquidités au parking de la BCE. En effet, aujourd’hui, les banques qui ne prêtent pas doivent payer la BCE.

Le délire du système monétaire et financier est tel qu’il devient difficile à suivre. Mais essayons de dégager une logique.

Cette annonce a deux effets.

D’abord, elle discrédite le fait que la BCE soit au service de l’économie, comme le soutient la bien-pensance consensuelle et conventionnelle.

En réalité, l’économie, c’est nous, notre activité, notre consommation, notre épargne – et pas l’industrie bancaire et la quantité de crédits brassée.

Depuis 2008, la répression financière frappe l’épargne mais la BCE n’en avait cure. Elle ne s’en soucie que lorsque les banques souffrent aussi.

Ceci démontre s’il en était encore besoin qu’une banque centrale est en réalité au service des banques et des gouvernements. Pour ces derniers, elle s’assure qu’ils puissent emprunter au taux le plus faible possible. Ceci permet des relances, un bon fonctionnement du capitalisme de connivence et plus de brassage de crédits.

La BCE se discrédite et dilapide son capital confiance

Ensuite, cette annonce sape la confiance du grand public dans le système monétaire et financier. Tout ce qui a été fait depuis 2008 ne débouche sur rien. Nous parlons de 1 459 Mds€ d’aide en capital pour les banques, selon Les Echos du jour.

Voyons si un jour la BCE proposera aux banques de nous prêter à taux négatifs et déclarera qu’elle compensera les pertes subies par les banques prêteuses qui nous donneront de l’argent pour que nous nous endettions. Tout est désormais possible puisque nous sommes en Absurdie…

Toutefois, concrètement et pratiquement, cette annonce peut vous être bénéfique. Je m’explique. Aujourd’hui, si vous choisissez une banque sûre, cette banque prête peu et a donc peu d’engagements par rapport à ses dépôts. Elle a des « liquidité en excès » qu’elle gare à la BCE. La BCE la taxe. Elle vous répercute cette taxe. Par conséquent, certaines banques sûres (je pense notamment à Pictet Luxembourg) répercutaient les frais des taux négatifs sur les comptes de dépôts de leurs clients.

Si la BCE fait ce qu’elle dit, ce ne devrait plus être le cas. Ceci avantage les entreprises à grosse trésorerie et les particuliers qui ont besoin de stocker des liquidités en attente de réemploi dans des banques qui ne se livrent pas à d’hasardeuses opérations de marché.

Ces magouilles monétaires posent quand même une question : le monde entier peut-il devenir un gigantesque Japon ? Ce pays affiche la dette publique la plus lourde (253% du PIB), les taux y sont quasi-nuls ou négatifs depuis 30 ans. Les plans de relance les plus fous se sont succédés. La banque centrale rachète tout : obligations, actions… La croissance est molle, la population diminue mais cet archipel n’est toujours pas ruiné.

Est-il possible que tout le monde s’aligne sur le Japon ? Réponse lundi 1er avril.

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