Déflation, croissance lente, injustice, absence de perspectives et morosité : voici ce qui attend l’Europe… tant qu’elle refusera le changement et les sanctions de ses gabegies.
La japonification est notre avenir, le nôtre, à nous Européens.
Lisez bien, c’est important. Vous n’entendrez cela d’aucun parti politique, syndicat ou média.
La japonification, c’est la déflation de longue durée, la croissance lente de longue durée, l’absence de perspectives, la morosité et bien sûr le vieillissement.
C’est aussi l’élargissement des inégalités provoqué par le recours constant aux politiques monétaires non conventionnelles et au crédit facile ; des riches toujours plus riches et des pauvres toujours plus pauvres ; un monde injuste, malthusien, soucieux uniquement de prolonger l’ordre établi.
C’est bien sûr aussi la répression financière, c’est-à-dire la confiscation de toute rémunération décente de l’épargne. La répression financière tue les classes moyennes en les rendant dépendantes, assistées, voire prolétarisées.
C’est encore beaucoup d‘autres choses comme les fractures sociales, le mécontentement perpétuel, le mal de vivre, la perte de confiance dans les élites. Pas de débouchés ou d’ascenseur social pour les jeunes.
La réalité en graphiques
Ci-dessous, regardez la japonification : un taux de croissance annuel moyen depuis 1980 de 0,43%, entrecoupé de nombreuses récessions.
Tout cela avec une banque centrale japonaise (BoJ) qui monétise à tours de bras, achète tout et n’importe quoi, et un bilan qui devient stratosphérique, comme celui de la BCE. Le bilan de la BoJ, c’est la ligne noire sur le graphique ci-dessous.
La ligne orange, c’est le PIB obtenu malgré toutes ces politiques monétaires. Cela ressemble à ce qui se passe en Europe, bien entendu.
Et bien sûr, des taux d’intérêt qui deviennent négatifs comme ceux de France et de l’Allemagne. Pourquoi des taux négatifs ? Parce qu’il n’y a pas d’occasion intéressante d’investir et d’embaucher.
Poids mort
Ceux qui me lisent régulièrement connaissent mon cadre analytique. Il est d’une simplicité enfantine :
– le système économique dans lequel nous vivons, c’est le capitalisme ;
– la variable centrale, majeure, du système, c’est le profit. C’est son moteur, sa motivation ;
– si le système ne marche plus c’est parce qu’il ne produit pas/plus assez de profit ;
– s’il n’y a pas assez de profit, c’est parce qu’il y a trop de capital qui en réclame sa part ;
– s’il y a trop de capital, c’est parce que nous refusons de détruire le capital inefficace, le capital périmé, parasite – et, singulièrement, ce capital qui nous empoisonne, le capital fictif des actifs financiers hypergonflés.
Il n’y a pas assez de profitabilité parce que nous traînons un capital de poids mort. Parce que nous ne détruisons pas assez, parce que nous ne sanctionnons pas assez, parce que nous acceptons les rentifications, parce que nous acceptons que le capital boursier gonflé par l’inflation des signes monétaires prenne une part plus grande que celle qu’il devrait avoir.
Note : la profitabilité, c’est le ratio de la masse de profits divisée par la masse de capital qui réclame sa part.
Nos sociétés sont frileuses, rentières, conservatrices en raison de la collusion du monde des entreprises, des banques et de la classe politique.
Tout ce beau monde veut rester en place, c’est son seul objectif : durer. Et pour durer il se paie des béquilles fiscales et bien sûr monétaires. Regardez les Lagardère et autres…
Des secteurs entiers sont sous perfusion. On maintient la fiction des passifs en asphyxiant les actifs. Quand une firme fait faillite, bien souvent son actif est sauvable ; c’est son passif qu’il faut détruire, c’est le capital et la dette qu’il faut oser dévaloriser.
Notre système refuse les sanctions de sa gabegie et de son inefficacité.
On ne sanctionne pas et si on ne sanctionne pas on n’a pas les moyens de récompenser, voilà le problème de fond de ce système que j’appelle « capitalisme monopolistique d’Etat, de copains, de coquins et de banques centrales réunies ».
La prolifération des zombie économiques fait partie de nos maux ; nous refusons les faillites et les restructurations, nous entretenons les morts.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]