** Nous le pressentions depuis 10 jours : la prodigieuse capacité des marchés à digérer les mauvaises nouvelles au prétexte que le pire est derrière nous préfigurait un nouvel épisode haussier qui a peut-être trouvé son épilogue avec le test de la barre symbolique des 5 000 points par le CAC 40 vendredi dernier en début d’après-midi.
Mais comme nous l’avions expliqué vendredi matin, la hausse de la seule place parisienne ne pouvait suffire à valider le franchissement des résistances issues au début du mois de février. Les places européennes ont refusé l’obstacle au dernier moment, ce qui repousse de quelques heures ou de quelque jours l’émergence d’une troisième vague haussière en direction des planchers de la mi-janvier.
Le CAC 40 a cependant franchi le cap des 5 000 points à deux reprises avant la réouverture des marchés américains. Les opérateurs ont même retrouvé de l’appétit pour des valeurs délaissées depuis l’automne 2007, à l’image d’Alcatel-Lucent (+9,6% la semaine dernière), STMicro et Valéo (+6,8%) ainsi que Dassault Systèmes et Oberthur (+5%).
Mais les opérateurs ont sensiblement réduit leurs prises de risque avec la remontée en flèche du cours du baril à 119,5 $ sur des rumeurs d’incidents entre un navire de ravitaillement de la flotte américaine et des embarcations iraniennes dans le golfe Persique. Il n’en fallait pas davantage pour provoquer la consolidation de Wall Street — qui était pourtant attendue en nette hausse dès vendredi matin — et ralentir la progression des indices sur le Vieux Continent. Le CAC rétrogradait ainsi sous les 4 980 points pour revenir au contact des zéniths de clôture des 4 et 26 février derniers.
Un petit sursaut d’une dizaine de points au moment du fixing a néanmoins permis aux valeurs françaises d’afficher un gain de 1% et une performance hebdomadaire positive (+0,33% après +3,4% la semaine précédente).
Les volumes d’échanges — voisins de 5,1 milliards d’euros — ne traduisaient pas une vague d’achat de grande ampleur comme cela avait été le cas le vendredi précédent avec plus de sept milliards d’euros négociés.
** Il aurait fallu l’appui de Wall Street pour déclencher une poussée haussière décisive mais, au moment de la fermeture des marchés européens, le Dow Jones cédait 0,5% dans le sillage de Microsoft — la société chutait de 6% après la publication d’un résultat net en baisse de 11% à 4,39 milliards de dollars.
L’indication la plus négative provenait du compartiment des technos avec un Nasdaq en recul de 1,3%. Le « composite » retombait non seulement sous la résistance des 2 413 points mais également sous les 2 400 points, ce qui invalidait le signal positif dont nous avions fait état jeudi dernier — là encore, un exploit en solitaire n’a pas suffi.
Le suspense concernant le scénario haussier envisagé d’ici la réunion de la Fed de mercredi prochain demeure donc entier. L’Euro Stoxx 50 (+0,85%) a ainsi calé sous les 3 800 points et termine la semaine sur une performance globale légèrement négative (-0,33%).
Cela s’est joué à presque rien… mais la mécanique s’est grippée à 90 minutes de la clôture avec la publication de l’ultime statistique de la semaine aux Etats-Unis : le baromètre du moral des ménages américains (indice de confiance du Michigan) a fait une chute de six points et atteint un plancher de 62,6, ce qui n’avait pas été vu depuis 26 ans !
Plus de 90% des Américains estiment que l’économie US est en récession — mais les cambistes ont déjà intégré cette réalité et ils poursuivent sans faiblir leurs rachats de dollars. L’euro consolide donc sous les 1,5590 et affiche un repli de 2,5% par rapport à son zénith des 1,60 inscrit mardi puis mercredi derniers. Cependant, tant que le pétrole flirtera avec les 120 $, la rotation sectorielle au profit des actions ne pourra pas s’enclencher pour de bon !
Philippe Béchade,
Paris