Par Jean-Claude Périvier (*)
Les pays d’Amérique du Sud ont plutôt bien résisté au ralentissement économique qui a commencé aux Etats-Unis au deuxième semestre 2007. Grâce à quoi ? Encore une fois grâce aux investissements étrangers attirés par les activités d’exploitation de ressources naturelles. En 2007 déjà, ces investissements avaient progressé de 66%, atteignant 72 milliards de dollars. Cette progression a concerné tous les principaux pays destinataires, mais une grande partie était dirigée vers le Brésil (35 milliards de dollars).
Les plus fortes hausses ont été enregistrées dans les industries minières, notamment les métaux, et dans la fabrication de biens manufacturés provenant de ressources naturelles. Dans l’automobile, les constructeurs étrangers ont accru leurs investissements dans leurs usines sud-américaines, qui offrent un avantage économique de fabrication déterminant pour les petites voitures à bas coût et pour les véhicules fonctionnant aux biocarburants, dont la demande explose dans le monde. Depuis peu, les entreprises latino-américaines, surtout brésiliennes, cherchent à prendre la tête dans les secteurs du pétrole et du gaz, des produits métalliques, du ciment, de l’acier ainsi que des denrées alimentaires et des boissons.
Suivant en cela le processus qui fut celui des pays développés, de nombreuses entreprises latino-américaines ont commencé à apparaître dans des secteurs nouveaux comme les logiciels, les produits pétrochimiques et les biocombustibles.
Evidemment, le flux financier s’est inversé au second semestre 2008, les investisseurs étrangers ayant besoin de liquidités ont vendu tout ce qu’ils pouvaient et ont rapatrié leurs capitaux. Mais retenez ce point fondamental pour vous, en tant qu’investisseur : il n’en reste pas moins vrai que les investissements réalisés sont là, et qu’ils constituent un outil de premier ordre pour la machine économique, capable d’injecter des gains de productivité susceptibles de hisser les pays concernés à des niveaux équivalents à ceux des grandes puissances économiques.
Les pays latinos sont de moins en moins dépendants
L’investissement est aussi local, ne l’oubliez pas. Les surplus venus des matières premières — comme les recettes fiscales dégagées par le boom économique récent — ont permis de financer de grands projets de modernisation, dont beaucoup dans les infrastructures.
Les principaux pays d’Amérique latine ne sont pas aussi liés à l’économie des Etats-Unis qu’on le pense généralement. Savez-vous que les exportations brésiliennes et argentines vers les Etats-Unis représentent moins de 1% de l’économie de ces pays ?
Le système financier est sain, et ne souffrira pas des mêmes maux que ses partenaires occidentaux. Les institutions financières des Latinos, pour différentes raisons, n’ont pas acheté les actifs toxiques et les autres produits dérivés "pourris" qui ont fait imploser les banques aux Etats-Unis et en Europe. Sans doute parce qu’elles étaient en retard, les institutions financières latino-américaines ne se sont pas engagées dans ces pratiques risquées qui ont anéanti le système financier mondial.
Pourtant l’Amérique du Sud est évidemment liée à l’économie mondiale par son commerce et ses investissements, et ne pourra échapper totalement au ralentissement de l’économie mondiale. Mais ses Etats sont décidés à poursuivre des politiques monétaires expansionnistes et spécialement des politiques fiscales — exactement comme les pays riches le font — afin de maintenir une croissance économique saine.
Qu’ont fait les Chinois lors de la crise asiatique il y a 10 ans ? Ils ont investi des milliards de dollars dans les travaux publics et les infrastructures. Cette réaction n’est pas étrangère à leurs formidables progrès économiques. Que font-ils maintenant ? La même chose ! Et les pays sud-américains ont décidé de faire de même, à leur propre échelle : le Chili engage un plan de relance de quatre milliards de dollars, ce qui fait tout de même 2,8% de son PIB, dont 700 millions iront à l’investissement public ; l’Argentine y va d’un plan de relance de 21 milliards de dollars ; le Brésil a débloqué 21 milliards de prêts bancaires, injecté 2,1 milliards de dollars dans son agriculture, et, c’est un peu différent, se dote d’un fonds souverain de 5,5 milliards de dollars pour investir dans son économie. Sans parler de son plan antérieur d’accélération de croissance (PAC) de 196 milliards d’euros sur les deux ans à venir.
L’Amérique du Sud bénéficie d’un atout indéniable : son indépendance énergétique. Le sous-continent n’a pas besoin d’importer du gaz, du pétrole, ou du charbon, il est régionalement autosuffisant, et au contraire il exporte ! Certes les cours du pétrole et des autres matières premières ont baissé drastiquement ; mais cette baisse est provisoire et vous devez la mettre à profit pour entrer car l’énergie repartira vigoureusement à la hausse à moyen terme. Dès que les premiers effets des plans de relance de la Chine se feront ressentir en fait… toutes les matières premières repartiront à la hausse ! L’Amérique du Sud sera une des premières à en profiter, à la fois comme producteur et comme consommateur.
Nous verrons la suite dès demain — mais si vous voulez grimper dès maintenant dans le train de la hausse latino-américaine, c’est par ici…
Meilleures salutations,
Jean-Claude Périvier
Pour la Chronique Agora
(*) Parallèlement à sa carrière dans le conseil aux entreprises et l’intelligence économique, Jean-Claude Périvier s’intéresse à la Bourse et à l’investissement depuis 1986. Analyste de talent, il excelle à détecter et anticiper les tendances futures… pour en déduire les meilleures opportunités de gain dans sa toute nouvelle lettre d’information, Défis & Profits.