La Chronique Agora

Joachim Son-Forget, un OVNI dans le microcosme parisien

Devenu fin décembre 2018 une célébrité sur twitter après une « blitz troll party » d’anthologie, Joachim Son-Forget (JSF) fait figure d’OVNI dans le microcosme politique parisien.

Samedi passé, nous avons vu que sa stratégie de communication n’a pas grand-chose à voir avec celle de nos petits marquis de la langue de bois. La spécificité du député des Français établis en Suisse et au Liechtenstein ne s’arrête cependant pas à son marketing. Aujourd’hui, je vous propose de voir ce que propose le Dr Joachim lorsque Mr l’Oiseau Teuteur le laisse s’exprimer.

Le Docteur Joachim, ou quand JSF jette le socialisme à la poubelle au profit d’idées libérales

Je pourrais vous dire que JSF, c’est le député qui met le mythomane Richard Ferrand hors de lui, ce qui suffit à faire de lui un saint dans mon esprit. Mais je vais essayer d’adopter un angle de vue un peu plus large.

Précisons tout d’abord que JSF n’est pas un politicien professionnel. En tout cas, pas pour le moment. Arrivé à l’Assemblée nationale en juin 2017, il a eu le mérite de conserver, jusqu’en avril 2019, 10% de son activité de supervision d’un projet de recherche au centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV, où il a fait son internat en radiologie) en plus de son mandat de député. Il a par ailleurs fait clairement savoir qu’il a vocation à retourner dans le privé à l’issue de son mandat.

Ancien militant socialiste, il a pris ses distance avec cette mouvance en 2014. Cinq ans plus tard, ses opinions politiques s’en sont admirablement détachées puisqu’au mois de mars dernier, il faisait la déclaration suivante dans L’Incorrect :

« J’ai rejoint ce parti qui avait l’ambition de parler à la gauche et à la droite. Or j’ai compris très vite que la majorité n’était qu’une officine de fin de race du Parti socialiste. Si En Marche c’est de droite et de gauche, pourquoi on pète la gueule des mecs qui proposent des idées de droite ? »

Bonne question, en effet…

Le 8 mars, il précisait dans Technikart :

« Ceux qui revendiquent leur filiation avec DSK ou Moscovici, je les déteste. C’est cette ‘familia’ qui a pris les rênes de certaines décisions autour du président ou de groupes parlementaires. Et s’il y a une critique à formuler sur Macron, c’est d’avoir continué à être un caméléon social – qualité nécessaire pour accéder au pouvoir (il faut être très adaptable) – une fois élu président. »

A l’attention de ceux pour qui ce constat n’aurait pas été assez clair, JSF a tout récemment mis les points sur les i :

Alors qu’il avait soutenu François Hollande en 2012, c’est désormais du côté du libéralisme que JSF voit la lumière. Peut-être a-t-il d’ailleurs déniché un héraut du libéralisme dont le nom n’avait encore jamais été évoqué dans ces colonnes…

S’il faut en revenir à nos lectures d’enfance pour mettre à jour le grand malentendu qui règne en France au sujet du libéralisme, en ce qui me concerne, ça me va très bien.

Bref, si vous aviez besoin d’une preuve que l’on peut revenir du socialisme même après avoir été militant, la voilà !

Le pragmatisme plutôt que l’idéologie

En dépit du fait qu’il semble avoir laissé derrière lui toute velléité de constructivisme social en quittant LREM, JSF maintient sa confiance à Emmanuel Macron, qu’il distingue du parti présidentiel. Comme vous vous en doutez, je trouve cela pour le moins curieux. Voici comment le député explique sa position :

Je pense m’être déjà exprimé sur ce que je pense du « libéralisme » que certains prêtent au président, ainsi qu’au sujet de l’éminent technocrate constructiviste Jacques Attali dont JSF était réputé proche aux débuts de LREM.

Quoi qu’il en soit, lors de la création de son parti JSFee en janvier 2019, JSF s’est positionné en faveur d’un gouvernement de coalition sur le mode suisse, regroupant le meilleur des idées de chaque parti politique. Une telle « concordance » permettrait selon lui de sortir de la crise des gilets jaunes.

C’est d’ailleurs la logique qui a conduit les électeurs à élire Emmanuel Macron à la tête de la République, ce dernier incarnant dans l’esprit de beaucoup d’entre eux le meilleur des idées de la droite et de la gauche de gouvernement. Le président a d’ailleurs respecté ce principe, le problème étant que les idées du PS et celles de LR sont identiques sur toutes les thématiques centrales.

Mais JSF voit beaucoup plus large qu’Emmanuel Macron en cela qu’il n’a rien d’un castor politique. Pour lui, il faut regrouper toutes les bonnes volontés sur les sujets où il existe des points de convergence : au diable les cordons sanitaires !

C’est pourquoi même s’il se permet ce genre de vanne au micro de l’Assemblée…

[NDLR : le 8 mars, il expliquait à Technikart : « je me suis rattaché au groupe UDI parce que Jean-Christophe Lagarde m’a offert deux garanties : celle de la liberté des votes, et celle de pouvoir développer mon propre parti. »]

… il a travaillé avec Jean-Luc Mélenchon à la rédaction d’un rapport sur la pollution océanique issue du plastique…

… de la même manière qu’il déposé une proposition de loi corédigée avec des députés RN et Ligue du Sud sur la légitime défense, ou encore qu’il a fait quelques appels du pied à Marion Maréchal.

Lorsque certains s’en sont inquiété, voici ce qu’il a répondu :

La France et la Suisse : si proches géographiquement, et pourtant tellement éloignées sur le plan politique !

Après avoir fondé le parti politique JSFee le 22 janvier en vue des élections européennes, le député a déclaré mi-février qu’il trouve finalement « plus utile de former les jeunes » à la politique, son parti ayant l’ambition d’être une « école de vie ». Exit donc la possibilité d’une liste JSFee aux municipales de 2020.

Mais outre une activité débordante sur Twitter, JSF, ça reste une action politique claire et concrète à l’Assemblée nationale.

Quelles sont les opinions politiques du député ? Au lendemain de la création de son parti, les choses étaient encore quelque peu brouillonnes…

Puis le discours de JSF s’est recentré sur une idée forte, comme nous le verrons samedi prochain.

Joachim Son-Forget : celui qui a décidé de faire de la politique autrement

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