Avec autant de création monétaire, pourquoi l’hyperinflation ne fait-elle pas – encore – rage un peu partout dans le monde ?
L’inflation serait dit-on un phénomène monétaire, donc si on crée beaucoup de monnaie, les prix doivent monter, non ?
Eh bien non, absolument pas.
La monnaie peut aller soit dans les biens de consommation si elle est distribuée aux consommateurs – soit dans les biens de capital si elle est allouée aux riches.
Si la monnaie est allouée sous forme de crédit, comme c’est le cas actuellement, ceux qui la reçoivent sont ceux qui sont solvables, c’est-à-dire ceux qui offrent des garanties. Ceux-là, ce sont les déjà riches : ils sont près des robinets d’où coule le pognon du crédit, et ce sont eux qui se goinfrent.
Ils ne consomment pas car ils consomment déjà trop – non, ils ont des excédents considérables. On dit que leur propension à consommer est faible et leur propension à épargner forte. Ils achètent donc des biens d’épargne, ils investissent, ils spéculent ou ils thésaurisent.
Ils achètent ce que l’on appelle des actifs financiers, réels, refuges ou autres, comme les œuvres d’art. Ce sont donc les prix de toutes ces catégories de biens qui, bénéficiant d’une demande élevée, montent et font bulle.
L’hyperinflation attendue se retrouve dans la valeur globale des biens de patrimoine du monde entier.
Ces biens sont plus rares que les biens de consommation ; ils ne se fabriquent pas en masse, souvent ils sont uniques.
Rendons le capital encore plus rare
De plus les capitalistes ont compris le système : pour faire monter encore plus les prix de ces biens, ils les retirent de la circulation. Ils rachètent les actions, les rendant encore plus rares !
Pour rendre les biens de capital encore plus chers, les capitalistes décapitalisent grâce à la création monétaire qui leur est soi-disant allouée… pour investir !
L’argent que vous créez, si vous le distribuez par le biais du crédit aux déjà riches, alors les consommateurs n’en voient pas la couleur : leur pouvoir d’achat n’augmente pas !
En revanche, tout ce que les déjà riches ont envie d’acheter monte.
L’inflation monétaire ne va donc pas dans les indices des prix à la consommation mais dans les prix des actifs financiers divers, les indices des prix des biens de capital.
L’inflations des prix des actifs financiers, c’est une inflation de la valeur du capital : si vous achetez un titre 200, vous espérez qu’il va vous rapporter deux fois plus que si vous achetez un titre 100.
Vous espérez donc que les profits qui rentabilisent votre investissement vont augmenter.
Plus vous payez cher votre bien en capital plus vous exigez de profits pour ne pas perdre sur votre investissement. La hausse de la bourse produit l’exigence de la hausse des profits : les entreprises et les managers sont sommés de « délivrer », d’où les rachats.
La hausse du prix des biens de capital crée donc une pression pour exiger des profits toujours plus élevés : on dit que l’inflation du prix du capital augmente, pour le système, la contrainte de profits.
Or la contrainte de profit est déflationniste. Elle impose en effet d’éliminer tout ce qui n’est pas rentable et de rentabiliser tout ce qui peut l’être par la pression sur l’emploi et la prudence extrême sur les investissements.
Elle oblige à faire un profit plus élevé et donc à refuser de faire des investissements qui rapportent moins que le profit actuel. Vous créez une exigence de profit minimum renforcée et vous déplacez sans cesse vers le haut la barre du malthusianisme – c’est-à-dire le couperet qui élimine les investissements.
La politique monétaire actuelle, en résumé…
… Produit de l’hyperinflation des prix des biens de capital, des actifs financiers, de l’immobilier et des placements refuges…
… Ne produit aucune hausse des prix des biens de consommation car elle n’en augmente pas la demande…
… Augmente la contrainte de profit dans le système et place plus haut la barre qui déclenche les investissements, ce qui la rend donc malthusienne…
… Etant malthusienne et augmentant la pression sur les revenus du travail pour satisfaire à l’exigence de rentabilité, elle rogne les pouvoirs d’achat et pèse sur les prix des biens de consommation au lieu de les gonfler.
La politique monétaire est une politique de Gribouille qui se jette à l’eau pour ne pas être mouillé.
Un jour j’expliquerai pourquoi, en raison du lien entre la valeur des biens de capital et les cash-flows, le système est condamné. Je vous donne la clef de la démonstration : la valeur d’un bien de capital est la somme actualisée des cash-flows qu’il procure sur sa durée de vie.
Ceci me conduit à annoncer (bien sûr sans calendrier) :
– soit la dévalorisation réelle colossale des biens de capital ;
– soit la très forte hausse des revenus du travail, c’est-à-dire l’hyperinflation des prix des biens de consommation.