La Chronique Agora

La guerre commerciale de Trump fauche l’Amérique rurale

Comment une république fondée sur la liberté et la responsabilité individuelle en est-elle venue à répéter les erreurs des empires déchus ?

Fox rapporte :

« Farmageddon : la guerre commerciale et le shutdown de Trump écrasent le cœur du pays

Dans tout le Midwest, les moissonneuses-batteuses restent à l’arrêt et les silos débordent de céréales invendues. Les prix du maïs ont chuté de près de 50 % depuis 2022, ceux du soja de 40 %. Dans le même temps, les coûts des engrais et des équipements ont grimpé de plus de 10 %. Huit agriculteurs sur dix estiment désormais que les Etats-Unis sont au bord d’une nouvelle crise agricole, digne de celle des années 1980. Ils lui ont même trouvé un nom : Farmageddon.

Cette fois, la crise ne résulte pas de conditions macroéconomiques défavorables, mais des décisions prises directement à la Maison-Blanche. La guerre tarifaire imprudente menée par le président Donald Trump étrangle littéralement les agriculteurs américains. »

Aujourd’hui, nous allons revenir sur le thème abordé dans notre précédente chronique : certaines politiques publiques – guerres choisies, guerres commerciales, communisme, dette, inflation, dérive politique et monnaie fiduciaire – sont manifestement néfastes. Pourquoi, dès lors, les mettons-nous en œuvre ? Et que pouvons-nous en attendre à l’avenir ?

G.K. Chesterton nous rappelle que les choses que l’on ne comprend pas ont souvent une raison d’être. Pourquoi les hommes font-ils la guerre ? Peut-être parce qu’elle stimule le « développement » de nouvelles technologies. Peut-être aussi parce qu’elle permet aux personnes animées de mauvaises idées – comme la conquête du monde – de disparaître. Un historien (dont le nom nous échappe) affirmait même que la guerre est l’un des rares moyens de « faire bouger les choses »… et de déloger une élite parasitaire. Sans guerre, les élites finissent par utiliser leur contrôle du gouvernement pour capter une part toujours plus importante de la richesse nationale. En d’autres termes, les riches s’enrichissent jusqu’à ce qu’un événement les en empêche.

Mais laissons ces spéculations aux philosophes.

Notre hypothèse est plus simple : les guerres sont, comme l’esclavage, des vestiges d’un âge révolu. Avant l’avènement du commerce civilisé – à l’époque où l’on pouvait produire plus que ce dont on avait besoin et échanger le surplus –, la guerre avait un sens. C’était même un progrès : on pouvait tuer ou asservir ses rivaux, s’emparer de leurs terres, de leurs femmes et de leurs enfants. C’était une façon « d’avancer ».

Aujourd’hui, ce n’est plus possible. Les guerres choisies – celles que l’on ne mène pas par nécessité, mais par ambition – sont des erreurs. La richesse provient désormais de la coopération pacifique, non de la force. On peut encore conquérir des territoires, certes, mais ils ne rapportent plus rien. La Russie dispose d’un immense territoire ; Monaco, la Suisse et Singapour sont minuscules. Lequel est le plus riche ? Lequel offre la meilleure qualité de vie ? Et imaginez un instant tenter de diriger Nvidia ou même Starbucks avec des esclaves !

Utiliser la force à d’autres fins que la défense est un pur gaspillage. Ce sont le travail volontaire, l’innovation, la production et le commerce qui améliorent le sort des peuples. Et grâce à cette richesse, ils peuvent s’offrir les armes nécessaires pour se protéger.

Les fondateurs des Etats-Unis connaissaient bien les « erreurs » des empereurs romains. Par un heureux hasard, le grand ouvrage de Gibbon relatant ces fautes est paru pour la première fois en 1776 – l’année même où les Etats-Unis ont déclaré leur indépendance.

Adams, Jefferson, Madison et les autres avaient tenté d’éviter que la jeune République ne reproduise ces erreurs classiques, en encadrant strictement les pouvoirs du gouvernement. Les Etats-Unis devaient être une république, non une démocratie, et ses institutions devaient obéir à des limites précises.

Or, même une lecture superficielle de la Constitution montre que les autorités fédérales actuelles dépassent largement leurs prérogatives. Le président n’a pas le pouvoir de déclarer la guerre, de punir les agriculteurs, de tuer sans mandat, d’imposer des droits de douane, de dicter leur conduite aux universités, ou encore d’indiquer aux Etats comment lutter contre la criminalité. Même l’usage de la monnaie fiduciaire semble excéder ses droits.

Plus étonnant encore : le président agit ainsi avec l’appui du Congrès. Un seul élu vote systématiquement « non » à ces abus de pouvoir : le représentant Thomas Massie. Voici ce qu’en rapporte The Hill :

« Le représentant Thomas Massie (R-Ky.) a tenu sa promesse de faire en sorte que les menaces de destitution proférées par le président Trump se retournent contre lui. Les fonds récoltés pour sa campagne ont atteint des sommets records : plus de 2 millions de dollars en caisse et près de 768 000 dollars levés entre juillet et septembre, selon la Commission électorale fédérale — un record personnel. »

Trump n’a pas mâché ses mots :

« Thomas Massie, le pire membre républicain du Congrès, qui vote presque toujours contre, est une honte pour le Kentucky, a-t-il écrit sur Truth Social. Paresseux, lent et totalement hypocrite – un vrai loser ! »

Fox poursuit :

« Massie a voté contre le projet de loi de dépenses de l’administration qui supprimait des fonds Medicaid pour les États, et il a réclamé que le département de la Justice publie les dossiers liés au délinquant sexuel Jeffrey Epstein. »

Dans un contexte de recrudescence des fusillades à motivation politique, Massie a exhorté Trump à modérer son discours, après la mort de l’activiste conservateur Charlie Kirk. Plus récemment, il a voté contre la mesure provisoire des républicains visant à mettre fin au shutdown.

Le « non » de Massie est, en réalité, un oui à la Constitution et à un gouvernement limité. Mais ce que nous tentons de comprendre, c’est pourquoi tant d’Américains renoncent aujourd’hui aux principes mêmes de la République.

La guerre est peut-être un cas particulier, inscrite dans notre ADN. Mais le contrôle des loyers ? La dette ? L’inflation ? Pourquoi tant de citoyens sont-ils prêts à répéter, encore et encore, les erreurs du passé ?

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile