La Chronique Agora

Le futur du commerce en Afrique sera-t-il vraiment libre ? (partie 2/2)

Pour réussir, l’AfCFTA doit garantir une véritable zone de libre-échange et l’établissement d’un marché africain libre et unifié. 

Le marché est le seul moyen de générer un développement économique à grande échelle, décentralisé et durable. Le marché libre est le seul système économique soutenable. C’est également le seul système qui permettrait de s’assurer que le dividende démographique de l’Afrique devienne une bénédiction et non une malédiction. En d’autres termes, l’approche basée sur le marché est le seul moyen de garantir la réalisation du plein potentiel de l’AfCFTA. Il n’y a pas de troisième voie. Un système économique est nécessairement dirigé soit par le marché, soit par l’État. 

Les Africains doivent pouvoir de nouveau commercer librement

Un libre-échange sous supervision du gouvernement n’est pas un véritable libre-échange. L’AfCFTA devrait avoir comme objectif un véritable libre-échange. Un marché africain libre et unifié. 

Dans cet article, Forbes Afrique pose la question suivante : « L’AfCFTA deviendra-t-il le cœur de l’économie mondiale ? » 

L’AfCFTA a effectivement le potentiel de devenir le cœur de l’économie mondiale. Mais pour atteindre un tel objectif, les décideurs africains devront nécessairement abandonner leur vision profondément étatiste et socialiste de l’économie pour se faire à la place les défenseurs du marché libre, du libre-échange et de la libre entreprise. 

Plus important encore, les dirigeants africains doivent renouer avec la tradition économique africaine qui reposait historiquement sur le marché libre, le libre-échange et la libre entreprise, car c’est le seul moyen de recréer un commerce africain libre et affranchi des frontières, qui libérerait le continent de son héritage colonial pernicieux et encore omniprésent, comme l’explique le Dr Steve Davies.  

Dans son article, « L’humanité du commerce« , Frank Chodorov clarifie le débat :  

Examinons le bien-fondé des affirmations des tenants du « protectionnisme » à l’aide d’une expérience de pensée. Si la prospérité d’un peuple est d’autant plus grande que la quantité de produits étrangers qu’il est autorisé à acheter est faible, alors un embargo complet, plutôt qu’une simple limitation des importations, devrait lui être le plus profitable. En poursuivant dans cette logique, ne serait-il pas préférable pour chaque communauté qu’elle soit hermétiquement isolée des communautés voisines, par exemple Philadelphie vis-à-vis de New York ? Cliquez ici pour lire la suite. En poursuivant dans cette logique, ne serait-il pas préférable pour chaque communauté qu’elle soit hermétiquement isolée des communautés voisines, par exemple Philadelphie vis-à-vis de New York ? Mieux encore, chaque ménage ne serait-il pas plus prospère s’il était contraint de vivre de sa propre production domestique ? Aussi stupide que paraisse ce raisonnement par l’absurde, il n’est pas plus stupide que l’argument « protectionniste » selon lequel la prospérité d’une nation serait une fonction directe de la quantité de produits étrangers qu’elle évite d’importer sur son marché, ou que l’argument de la « balance commerciale » selon lequel une nation prospère en exportant davantage qu’elle n’importe.  

Il n’existe effectivement aucun argument convaincant que les protectionnistes pourraient avancer pour justifier la balkanisation économique de l’Afrique et le maintien des nombreuses barrières tarifaires, non tarifaires et autres restrictions artificielles qui empêchent les Africains de commercer librement. 

La plupart des sociétés africaines se situent essentiellement au même niveau de développement économique et de précarité socio-économique. L’idée qu’il faudrait maintenir les barrières artificielles actuelles au commerce entre pays africains, ou ne les supprimer que partiellement, est aussi absurde que si les habitants de la Caroline du Sud se sentaient économiquement menacés par les habitants de la Caroline du Nord et réclamaient des barrières douanières.  

Comme l’a fait remarquer Alexander Jelloian dans son article intitulé « L’AfCFTA pourrait-il récréer les réseaux commerciaux africains aujourd’hui disparus ? » : 

Le colonialisme eut pour conséquence de renforcer les politiques protectionnistes étant donné que les puissances européennes ont divisé l’Afrique sans prêter suffisamment attention aux facteurs sociaux, économiques ou géographiques. Les contrôles imposés par les autorités coloniales ont provoqué une réorganisation de la vie économique, mettant fin à des relations commerciales naturelles qui existaient depuis des centaines, voire des milliers d’années. Dans la plupart des pays, la situation ne s’est pas améliorée après l’indépendance étant donné que de nombreux dirigeants africains fraichement arrivés au pouvoir ont poursuivi une stratégie de développement dirigé par l’État et espéraient que la limitation des importations favoriserait l’accroissement de la production nationale. La plupart des pays du continent ne se sont jamais véritablement industrialisés. Les gouvernements qui après l’indépendance ont défendu l’idée d’un socialisme africain ont généralement maintenu jusqu’à ce jour des droits de douane élevés et des contrôles aux frontières encore, ce qui continue d’étouffer la croissance économique.  

Conclusion

Pour réussir, l’AfCFTA doit garantir une véritable zone de libre-échange et l’établissement d’un marché africain libre et unifié. L’idée d’un « libre-échange » sous contrôle de l’Etat n’est qu’une chimère.  

Concevoir l’AfCFTA sur la base des théories économiques radicalement étatistes d’aujourd’hui est le meilleur moyen d’en assurer l’échec total ou partiel, bien qu’il s’agisse du projet de zone de libre-échange le plus ambitieux et le plus prometteur à travers le monde. Compte tenu de l’importance essentielle de l’AfCFTA, pour des raisons qui vont au-delà de la promotion du libre-échange, il est absolument vital d’en assurer le succès. 

Bien qu’il soit difficile d’imaginer que les gouvernements africains renoncent au contrôle répressif et au pouvoir sur la vie des Africains qu’ils se sont accaparé après l’indépendance, il est pourtant vital que les dirigeants africains abandonnent les concepts étatistes importés de l’étranger et renouent véritablement avec la tradition économique africaine qui reposait sur historiquement sur le marché libre, le libre-échange et la libre entreprise, si l’on veut que l’ AfCFTA réussisse à générer un développement économique continental intégré, décentralisé, à grande échelle et durable.  

Les dirigeants africains d’aujourd’hui et de demain doivent supprimer toutes – oui, je dis bien toutes – les restrictions artificielles qui étouffent, freinent et entravent la production, les échanges et la consommation de biens et de services en Afrique.  

Article traduit avec l’autorisation du Mises Institute. Original en anglais ici 

Biographie de l’auteur

Manuel Tacanho est le fondateur d’Afridom, une fintech proposant un service de banque en ligne basée sur une monnaie saine à destination de clients situés en Afrique et en Europe. Il est également un partisan du marché libre et d’une monnaie saine afin de favoriser le développement économique de l’Afrique. 

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