La Chronique Agora

Fed 2020 : bienvenue à Weimar !

Certaines déclarations de la Fed laissent à penser qu’elle veut donner une nouvelle dimension à sa politique de relance. Gare à la bombe…

Eric Rosengren, de la Fed de Boston, fait allusion à de possibles achats d’actifs de style BCE et Bank of Japan (BoJ) :

« Dans une situation où les taux d’intérêt à court terme et les taux du Trésor à 10 ans approchent de la borne inférieure du zéro, permettre à la Fed d’acheter une gamme d’actifs plus large pourrait être important. »

Ceci est interdit par la charte de la Fed.

Ceci a déjà été évoqué par Yellen.

Ceci plantera le dernier clou dans le cercueil du pseudo-libéralisme qui n’est qu’un capitalisme de copinage, monopolistique, d’Etat et de banque centrale réunis.

Ceci n’aura aucun autre effet que de tenter de soutenir les cours de bourse des ultra-riches au même titre que le capping des taux à long terme.

Des erreurs colossales

La Fed se prépare à un effondrement boursier qui n’aura rien à voir avec le virus – celui-ci n’étant qu’une causa proxima – et tout à voir avec ses erreurs antérieures.

Les erreurs antérieures ont planté le décor. Il ne manque que le déclencheur ; ce ne sera pas encore le virus, il est trop tôt, mais les décisions prises à l’occasion du virus vont grandement accélérer le processus historique.

L’organisme économique est fragilisé, une masse incroyable de promesses non tenables, cynisme des agents économiques, théories fausses, tout se met en place.

La Fed veut se donner les moyens d’entrer un peu plus sur la route de l’hyperinflation de type allemand des années 20.

La Fed a commis l’erreur de laisser se constituer une masse, un stock incroyablement élevé d’actifs financiers et d’actifs quasi-monétaires. Les gens, les détenteurs, sont persuadés que ces actifs sont aussi bons que de la monnaie : on leur a laissé croire qu’ils étaient liquides !

Mais quand la vraie baisse arrivera, cette croyance disparaîtra. Les gens se rueront vers la sortie ; ils voudront échanger leur actifs monétaires et quasi-monétaires contre de la vraie monnaie de banque centrale. C’est le run version moderne.

Ce que nous voyons déjà, c’est un run préliminaire ; on vend des actions et on demande de la monnaie sous sa forme la plus sûre – les emprunts d’Etat. Au moindre frémissement, on passera à l’étape suivante : on déversera les emprunts d’Etat, on demandera à les échanger contre de la monnaie banque centrale.

C’est à ce moment-là que tout se nouera.

Une pyramide inversée

La Fed aimerait bien que l’on change la législation afin de lui permettre de faire face à un run !

La masse exceptionnellement élevée d’actifs financiers et de quasi-monnaie repose sur une pointe étroite, constituée de base money, de monnaie de base.

Si la pyramide s’écroule, les vendeurs demandent en contrepartie du cash, de la monnaie de base – c’est-à-dire de la monnaie banque centrale. Cela signifie que pour éviter l’effondrement, la banque centrale met le doigt dans l’engrenage dans lequel il ne faut jamais s’aventurer : créer de la monnaie pour soutenir le prix des actifs alors qu’ils sont bullaires.

Elle se positionne au plus serré dans l’engrenage :

– soutien des marchés ;

– création monétaire pour financer ce soutien ;

– perte de confiance dans la monnaie ;

– rétention de l’offre et pénuries ;

– hausse des prix ;

– perte de confiance accélérée ;

– création monétaire accélérée…

C’est le moment, c’est l’engrenage de l’hyperinflation de Weimar.

Des tombereaux de monnaie

La pyramide d’Exter repose non pas sur l’or, mais sur la monnaie de banque centrale, sur la base money, puisque quand les couches supérieures s’effondrent, les ventes se font contre de la monnaie de banque centrale.

Si on entre dans la mécanique terrible de Weimar, il faudra d’abord élargir la base/pointe de la pyramide et créer des tombereaux de monnaie de base. Ce n’est que dans un autre temps de la crise, quand le système va se bloquer, que se posera la question de savoir si l’or peut ou non constituer une base stable, une base de confiance pour stopper la crise.

Dans un premier temps, la demande sera une demande de cash.

L’hyperinflation allemande a été causée de loin ; elle a pour origine le financement non-orthodoxe de la Première guerre mondiale. Ici, l’équivalent du financement non-orthodoxe de la guerre militaire est le financement non-orthodoxe de la guerre économique contre la déflation/surproduction.

A force de truquer et de mentir, les élites ne savent même plus ce qu’elles font et pourquoi elles l’ont fait.

Savez-vous que, dans les années 1920, la banque centrale allemande a refusé jusqu’au bout de croire que c’était sa politique monétaire qui fabriquait la crise ! Elle était persuadée qu’elle ne faisait que suivre les besoins de l’économie.

C’est exactement ce que pense Powell, qui n’a jamais lu l’Histoire – la vraie, pas celle des manuels de l’establishment.

[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]

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