La Chronique Agora

Emmanuel Macron, complotiste ?

Le complotisme est à la mode en ce moment – mais qu’est-il exactement ? Est-il fondé… et d’où vient-il ? 

Le complotisme ne se définit pas par sa production d’informations – cela, c’est ce que veulent faire croire les élites. Non : le complotisme se définit comme schéma répétitif d’interprétation simplifiée du monde qui fait croire que tout procède de la subjectivité malicieuse des élites.

Les thèses complotistes prétendent que les gens, les élites, les puissants complotent.

En ce sens, la doctrine complotiste est un volontarisme, comme le dirigisme politique ; elle croit fondamentalement que le monde est produit par la volonté de quelques-uns.

La grande mode, par exemple, c’est de croire que les malheureux qui se pavanent à Davos produisent le monde !

Le complotiste n’arrive pas à admettre que le monde est mû par des forces objectives, par des antagonismes ou par des contradictions.

Forces objectives

Ces forces objectives s’incarnent dans des humains qui les portent, certes, mais les humains n’en sont généralement que les supports ou les porte-paroles.

Le complotisme est la réponse, c’est le symétrique de l’illusion des puissants qui se prennent pour des démiurges alors qu’ils sont agis par des forces matérielles et historiques qui les dépassent.

Les volontés de puissance forcenée de gens comme Emmanuel Macron, par exemple, leur font croire qu’ils commandent alors qu’ils ne font qu’endosser les nécessités qui découlent à la fois des conditions objectives du système et de leur position dans ce système.

Macron se plie aux nécessités de la crise du système et, en même temps, à la logique qui l’a conduit à être mis en place dans ce système.

Tout est sur-déterminé, ce qui produit une impression de complexité – et cette dernière donne la possibilité aux hommes de se faire passer comme conduisant les événements dont ils ne sont que les jouets.

Pas de magie

Il n’y a pas de démiurges ou de magiciens. Il n’y a que des gens qui veulent tirer profit des situations et jouer le rôle, se faire passer pour le maître – alors qu’ils ne sont que de pauvres médiateurs entre le réel et nous. Celui qui se prend pour le maître est encore plus étranger à lui-même, plus aliéné que nous !

Ce que je dis pour Macron est encore plus vrai pour Christine Lagarde, qui est une caricature de ce que j’explique. Lagarde ne choisit rien, elle est « dans la seringue ». Comme le monde est une pyramide monétaire branlante, il n’y a qu’une chose à faire : créer encore plus de monnaie.

Le fait que les puissants soient des usurpateurs produit l’interprétation complotiste : « Ils veulent se faire passer comme dirigeant le monde, eh bien, disons alors qu’ils complotent. »

A un mensonge répond un autre mensonge.

Logique de survie

Les accusations complotistes sont le produit logique, incontournable du système du maître, c’est-à-dire du système dans lequel certains se posent (et quelquefois se croient) en maîtres du monde et de notre destin.

C’est la monnaie de leur… fausse monnaie. Car en dernière analyse, toutes ces paroles sont des fausses monnaies.

Tous, à quelque niveau que ce soit, accomplissent « God’s work », l’œuvre divine, pour reprendre la formulation de Lloyd Blankfein, le patron de Goldman Sachs… étant entendu que « Dieu » n’a pas besoin d’être compris comme religieux, mais comme système inconscient, non-su, sous-jacent à nos sociétés – et qui les structure.

Le système capitaliste a sa logique, le système néo-libéral financiarisé aussi, le système libéral-autoritaire aussi, etc.

Rien de tout cela n’est choisi, tout s’impose en vertu de la logique de survie et de reproduction du système, et de ce qu’on appelle maintenant ses boucles d’auto-régulation.

[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]

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