Des géants comme Auchan annoncent des suppressions massives d’emplois.
Des signes de dérapage sont en train de survenir dans l’économie française, avec des faillites d’entreprise et des licenciements qui se multiplient, et une réduction des investissements.
Les difficultés touchent, par exemple, le secteur de l’immobilier ou encore les supermarchés.
Jean-Marc Daniel, auteur et économiste, s’est exprimé sur le sujet sur France Inter :
« On a maintenu artificiellement la croissance et l’économie à grands coups de dettes sans résoudre les problèmes structurels de l’économie française. »
Les magasins Auchan n’ont pas été épargnés par ces problèmes. Ils ont entamé, comme bien d’autres enseignes, un plan de licenciement et de fermetures.
Le Monde rapporte :
« Le distributeur a annoncé la suppression de 2 389 postes dans le cadre d’une nouvelle stratégie pour renouer avec la rentabilité. L’entreprise et ses salariés paient l’immobilisme d’un groupe qui n’a pas su anticiper le déclin de l’hypermarché. »
Les fermetures de magasins et d’usines grimpent depuis la fin des aides liées au COVID ou au prix de l’énergie.
L’Eveil de la Haute Loire explique :
« La phase critique approche, au point que la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet multiplie les alertes ces derniers jours. ‘Plus de 150.000 emplois vont disparaître, probablement plus’, a-t-elle prévenu. En octobre, déjà, elle brandissait une carte des plans sociaux de l’année 2024 : 180 recensés dans le pays, symboles de ‘l’échec total de la politique de l’offre d’Emmanuel Macron’.
Le début du mois de novembre est funeste pour l’emploi. Après Michelin et Auchan, près de 500 emplois en moins ont été annoncés chez Vencorex (Isère), plateforme chimique en redressement judiciaire. »
Chez Auchan, les premiers signes de faiblesse sont apparus en 2018, avec une chute des résultats, des coûts de réorganisation croissants et une baisse de la valeur des actifs de l’entreprise.
Le graphique ci-dessous montre le résultat net de la holding des magasins Auchan – le groupe Elo – sur la période de janvier à juin, année après année.
Une partie des problèmes rencontrés par le groupe provient des effets d’amortissements. Le groupe réduit la valeur de ses actifs via la baisse des résultats.
La perte de 2019, de 1,3 milliard d’euros, est due à la perte de valeur de leurs magasins en Italie et au Vietnam, lors d’une cession d’activité à des concurrents.
Le plongeon de 2024 – une perte de 981 millions sur six mois – s’explique par plusieurs facteurs.
D’une part, le bénéfice sur les opérations (hors taxes, amortissements et intérêts) a chuté de 200 millions d’euros par rapport à la même période en 2023. D’autre part, le groupe a perdu 495 millions d’euros en charges exceptionnelles. On compte 350 millions d’euros de pertes sur les actifs – soit la valeur des entrepôts et magasins – chez Auchan France. De plus, il a perdu 47 millions d’euros en raison de litiges avec la SNCF, concernant des défaillances dans la rénovation de la Gare du Nord à Paris.
Dans La Dépêche, Olivier Dauvers, journaliste du secteur de la distribution, explique la situation par le déclin des hypermarchés dans le pays :
« L’arrivée dans le paysage du hard discount ainsi que le désamour des Français pour les hypermarchés – les plus grands magasins avec lesquels Auchan s’était construit sa notoriété et qui sont beaucoup moins en vogue en 2024 – ont précipité la chute d’Auchan. ‘Ce plan social signe quelque part la fin des très grands hypermarchés, notamment ceux qui dépassent 12 ou 15 000 mètres carrés de surface’, renchérit l’expert [Olivier Dauvers]. ‘Aujourd’hui ils ne représentent que des problèmes : ils sont grands, il faut y aller et ça prend beaucoup de temps. Le bénéfice qu’apportait l’hypermarché il y a une ou deux générations est aujourd’hui masqué par le temps nécessaire afin de l’atteindre. Le grand hypermarché est un format d’hier’, conclut-il. Auchan va devoir se réinventer après ce plan social. »
Mais les licenciements et l’envolée des faillites d’entreprises va peut-être marquer un tournant…
Vous trouverez ci-dessous les commentaires de Simone Wapler au sujet de la venue d’un « Tsipras gaulois ». En effet, l’envolée de faillites génère encore plus de pression sur les finances du pays, et les plans de relance via la dette pourraient bien devenir nécessaires.
Licenciements, déficits… vers un « Tsipras gaulois »
Vous vous souvenez d’Alexis Tsipras, Premier ministre grec du temps où l’Europe faisait « tout ce qu’il fallait » pour sauver la Grèce de la banqueroute ? Tsipras était un bon petit bourgeois (son père était entrepreneur), communiste, à l’origine d’une union de la gauche dans son pays et du parti Syriza.
Il arriva au pouvoir fin 2014 avec des promesses de jeter aux orties l’austérité imposée en 2010 par les créanciers internationaux :
- suppression des 13e et 14e mois de salaire dans la fonction publique compensée par une prime annuelle de 1 000 euros pour les fonctionnaires gagnant moins de 3 000 euros et gel des salaires des fonctionnaires pendant trois ans ;
- treizième mois maintenu dans le secteur privé en contrepartie d’un renforcement de la flexibilité du marché du travail ;
- durée de cotisations retraites portée de 37 annuités à 40 annuités en 2015 ;
- TVA passée à 23%.
Tsipras fut finalement obligé de signer en juillet 2015 un accord avec les créanciers de la Grèce conditionné au maintien de ces mesures dites d’austérité qui avaient été progressivement mises en place depuis 2010.
Ce sont les contribuables européens qui ont payé l’addition : l’effacement d’une partie de la dette publique et le renflouement des banques qui avaient trop prêté à la Grèce.
Face à l’enlisement des déficits, nous aurons probablement droit à un Tsipras tricolore. Dans un premier temps, les élus refuseront la potion amère de l’austérité (plus exactement le fait de ne dépenser que l’argent qu’on a).
Puis, comme toujours, il faudra se rendre à l’évidence : l’argent gratuit n’existe pas et le gaspillage finit par être sanctionné par une « perte de pouvoir d’achat » pour toutes les classes sociales assortie d’impôts supplémentaires pour les classes moyennes.
Bien sûr, l’Histoire ne se répète jamais à l’identique et Tsipras n’a pas de clone français.
De surcroît, il existe trois différences importantes entre la France et la Grèce :
- la France est aussi médaille d’or de la pression fiscale tandis qu’en Grèce l’évitement de l’impôt était une discipline nationale. Ceci signifie que la diminution du déficit courant par l’alourdissement de la pression fiscale est illusoire ;
- les banques françaises, gorgées de dettes françaises, sont plus grosses que les banques grecques ;
- la taille de la France dépasse les facultés de financement du FMI qui intervient surtout dans des « petits » pays.
Il est par conséquent possible que les déposants français se retrouvent dans le cas des déposants chypriotes ou libanais avec des comptes gelés ou confisqués.
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