La Chronique Agora

Comment les arnaques financières déjouent votre méfiance (2/3)

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Les escrocs sur internet savent redoubler d’inventivité lorsqu’il s’agit de voler votre argent. Aujourd’hui, faisons le point sur les placements atypiques qui peuvent vous être proposés dans ce but, et les usurpateurs d’identités.

Comme nous l’avons vu hier, les arnaques financières se sont multipliées avec le développement d’Internet. Certaines, comme les pyramides de Ponzi, sont bien plus anciennes, mais peuvent désormais atteindre bien plus d’investisseurs. Tandis que d’autres, comme le phishing, sont non seulement nouvelles, mais se perfectionnent de plus en plus, au point de devenir presque impossible à différencier, pour quelqu’un qui ne s’en méfierait pas, de messages bien réels provenant d’une banque, d’un service de la Sécurité sociale, etc.

Aujourd’hui, nous allons nous tourner vers deux autres types d’arnaques auxquelles vous pourriez être confrontés, voire l’avez déjà été. Dans les deux cas, elles reposent sur des gens qui se font passer pour des professionnels de l’investissement.

Les faux professionnels aiment les placements atypiques

S’il est un lieu où les faux professionnels prolifèrent, c’est bien internet. Ils opèrent dans tous les secteurs. En matière de finances, ils font preuve d’une grande créativité et proposent d’investir dans les diamants, les cryptomonnaies, les parkings, les Ehpads, les containers, le vin, les cheptels, l’or et les métaux précieux, les énergies renouvelables, les NFT, le metavers, le cannabis thérapeutique et même le nucléaire… entre autres.

Il existe bien sûr des vrais professionnels qui opèrent dans ces domaines. Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer ici le placement en vaches laitières, les NFT, l’art contemporain, les automobiles de collection, le vin ou encore la forêt, par exemple.

Les escrocs procèdent toujours de la même manière. Ils vous proposent d’investir dans un produit qui va offrir un rendement attractif, bien au-delà de ce qui se pratique habituellement sur le marché. En réalité, l’investissement n’existe pas et, lorsque vous voulez retirer vos fonds et prendre vos plus-values, vos interlocuteurs disparaissent.

Par exemple, l’arnaque aux diamants de la société Stock Diamond découverte il y a quelques années était très bien rodée.

Intrigué par une publicité sur internet ou après une conversation avec un ami qui vous a avoué avoir investi dans ces pierres précieuses, vous cherchez à en savoir plus en consultant le site web de l’entreprise. Pour recevoir la brochure qui explique tout, il vous faut donner votre adresse mail, mais aussi votre numéro de téléphone. Vous recevez alors un appel d’un conseiller de Stock Diamond qui prétend vous appeler de la place Vendôme à Paris, où la société a des bureaux. Il vous explique le placement, forcément sans risque, avec un rendement garanti de 10%. En effet, la demande mondiale de diamants est supérieure à l’offre, le prix des pierres ne fait donc que monter.

Prudent, vous investissez petitement. Mais les escrocs ne lâchent jamais leur proie. Vous recevez de multiples appels vous incitant à investir davantage. On vous envoie des photos pour vous montrer combien les pierres sont belles. On vous précise qu’elles sont détenues dans un entrepôt sécurisé. Si vous demandez à les détenir chez vous, on vous explique que l’entrepôt est dans une zone franche et que sortir les diamants de cette zone entraîne le paiement de la TVA, ce qui met à mal le rendement de votre investissement.

Convaincu, vous laissez les diamants dans l’entrepôt. Et puis, quand vous indiquez à vos interlocuteurs que vous souhaitez vendre pour récupérer votre argent, vous n’avez plus de nouvelles. Plus personne n’est joignable et c’est alors que vous réalisez que vous vous êtes fait avoir. Certains Français se sont fait dérober ainsi jusqu’à 200 000 € par Stock Diamond, les économies de toute une vie !

L’usurpation d’identité de professionnels connus

Cette autre arnaque ressemble à la précédente, mais les voleurs, au lieu de vous faire croire qu’ils sont des experts d’un placement atypique, se déguisent en vrai banquier pour vous proposer des produits classiques comme des livrets bancaires, des crédits, des assurances, etc.

En effet, ils usurpent l’identité de banques connues et respectées et même parfois le nom des produits. On a affaire ici à des escrocs aguerris qui se donnent les moyens d’arnaquer le plus grand nombre de personnes. Ils créent de faux sites internet copiant celui d’établissements réputés.

Tout commence par une publicité en ligne ou par l’envoi d’un mail, vous proposant, par exemple, un livret rémunéré à 6%. C’est mieux que le Livret A, mais ce n’est pas extraordinaire, puisque c’est le montant de l’inflation actuelle. Cela n’apparaît donc pas comme une arnaque, mais comme un moyen de ne pas perdre trop d’argent avec ses économies.

De toute façon, vous savez bien que des établissements proposent régulièrement des livrets avec des taux boostés… mais pendant une période limitée (3 à 6 mois en général). Dans ce cas, il s’agit d’un produit d’appel.

Avec nos escrocs, le taux est garanti sur la durée. Jamais il ne baissera. Comme dans le cas précédent, une fois que vous avez répondu au mail ou cliqué sur l’annonce, un « conseiller financier » prend le relais et vous persuade d’investir. En général, les sommes sont importantes : un tel taux est réservé aux investisseurs fortunés, il n’est pas accessible au vulgum pecus. Un versement initial de 10 000 € est souvent demandé, voire davantage. Comme l’indique l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), une arnaque au livret d’épargne coûte, en moyenne, 72 000 € à l’épargnant floué !

Évidemment, votre argent file vers des comptes hors de l’Union européenne et vous n’en reverrez jamais la couleur. Le rendement de 6% s’est ainsi miraculeusement transformé en 100%… de perte !

Des arnaques variées

Dernièrement, c’est le site de l’association de consommateurs UFC-Que Choisir qui a été usurpé. Les escrocs invitaient, par mail, à se rendre sur un site « Epargne.quechosir » pour comparer les offres actuelles sur les livrets bancaires. Le site ressemblait en tous points au site officiel. Certains liens renvoyaient même sur le vrai site de l’association. Tout était fait pour berner l’internaute. Après quelques secondes de connexion, une fenêtre pop-up apparaissait, pour mettre en valeur l’offre à ne pas manquer : une prime de 300 €. Pour cela, vous devez laisser vos coordonnées. Puis, quelques heures plus tard, un conseiller vous appelle pour vous proposer un placement sur un livret d’épargne au taux alléchant.

L’usurpation d’identité frappe aussi les courtiers. Les faussaires, par exemple, contactent les particuliers qui ont réalisé des travaux de rénovation énergétique – pose de panneaux photovoltaïques, changement de chaudière, etc. – financés par un prêt. Ils leur proposent de racheter leur crédit, c’est-à-dire de leur faire bénéficier de meilleures conditions d’emprunt dans un autre établissement bancaire. Ils envoient des documents imitant à la perfection ceux de courtiers connus : logo identique, numéro d’immatriculation à l’Orias conforme, plaquette de présentation originale (récupérée sur internet), etc.

Alléchés par l’offre vraiment intéressante, les particuliers transmettent toutes les pièces demandées : avis d’imposition, carte d’identité, relevé d’identité bancaire… Avec ces documents, les faux courtiers souscrivent un emprunt auprès d’un organisme de crédit. Quand les sommes arrivent sur le compte bancaire des victimes, ils leur demandent de transférer les fonds pour rembourser les anciens crédits. L’argent atterrit bien sûr sur le compte des faussaires. Les victimes découvrent trop tard que leur ancien crédit court toujours et qu’ils doivent le rembourser en même temps que le nouvel emprunt souscrit en leur nom. Bref, c’est la double peine.

Double peine également pour l’arnaque aux arnaques. Vous avez été victime d’une des escroqueries précédemment citées ? Qu’à cela ne tienne, un professionnel – de l’Autorité des marchés financiers (AMF) ou de la Banque de France – va vous aider à récupérer vos fonds ! Par exemple, victime d’une arnaque à l’investissement en crypto-actifs, vous êtes contacté par un « ingénieur » qui va vous assister techniquement dans la récupération de vos fonds « directement sur la Blockchain ».

Dans ce cas aussi, tous les documents et sites falsifiés ressemblent à s’y méprendre aux vrais sites. Votre méfiance est endormie. Et vous vous laissez aller à verser un peu d’argent pour couvrir les frais, une somme presque dérisoire par rapport à ce que vous avez précédemment perdu. Mais une somme que vous ne reverrez évidemment jamais…

Nous verrons dans un prochain article quelques exemples d’arnaques supplémentaires dont il est essentiel de se méfier, avant de voir quelles sont les règles à suivre pour s’en protéger.

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