Pour faire s’effondrer l’économie russe, faut-il plutôt lui imposer des sanctions… ou la faire suivre le modèle argentin ? Les gouvernements occidentaux ont clairement choisi leur voie.
Hier, nous avons posé la question suivante : sommes-nous en train d’entrer dans une nouvelle ère où l’énergie se fera rare, où la monnaie ne sera plus fiable et où l’Etat de droit ne sera plus là pour nous protéger ? Qui voudrait d’un monde comme ça ?
La réponse est juste sous nos yeux. Bienvenue en Argentine !
Le modèle à ne pas suivre
Une blague circule dans les rues de Buenos Aires :
« Comment sanctionner les Russes ? En leur coupant l’accès au commerce international ? En bloquant les transferts d’argent ? En envoyant des troupes ? En établissant une zone d’exclusion aérienne ?
Non, simplement en les forçant à suivre le modèle argentin. Cela les mènera à la ruine, comme cela nous a menés à la nôtre. »
Le gouvernement argentin a maintenu le prix des carburants à des niveaux bas pour apaiser les électeurs. Résultat : des pénuries d’électricité. Ils financent la moitié de leurs dépenses publiques en faisant tourner la planche à billets (seulement la moitié de la population du pays travaille…). Résultat : le pays fait actuellement face à un taux d’inflation d’environ 50%.
Le système est désormais miné par la corruption. Les gens ne font plus confiance à la monnaie, pas plus qu’ils n’ont confiance envers le système politique ou le système judiciaire. Résultat : l’investissement se faire rare, l’économie stagne et la pauvreté touche de plus en plus de personnes.
Mais ce ne sont pas les Russes qui adoptent le modèle argentin. C’est le gouvernement de Joe Biden et l’essentiel des démocraties occidentales.
L’essentiel de notre message du jour : le modèle argentin est largement dysfonctionnel mais, au moins, il est appliqué avec une telle incurie et tant de désinvolture que c’en est presque plaisant et tolérable. Il y a fort à parier que cela ne sera pas aussi agréable lorsque ce seront les dirigeants du « monde libre » qui se chargeront d’appliquer la même méthode.
Les poches pleines de billets
Hier soir, nous avons rempli nos poches de billets et sommes partis à la recherche d’un restaurant pour dîner à Buenos Aires. Alors que nous arpentions les rues du quartier Recoleta, nous avons pu constater que les boutiques étaient pleines de vêtements et de meubles onéreux. Des gens élégants promenaient leurs chiens, des familles sortaient des restaurants. Nous n’avons croisé que quelques mendiants. Ce quartier de la capitale de l’Argentine est bien plus agréable que l’essentiel de Baltimore, par exemple.
Nous nous sommes assis à une terrasse de café. Les serveurs étaient très professionnels. Les gens étaient tous courtois et bien habillés. Nous avons commandé une bavette pour deux, qui était trop grosse pour nous. Ainsi qu’une bouteille d’un grand cru, le « Yacochuya », qui provient d’un vignoble non loin de notre ferme. Nous l’avons payé 8 700 pesos. Cela correspond à 43 $ au taux de change applicable sur le marché noir – un prix très raisonnable pour un vin d’une telle qualité.
Oui, cher lecteur, il est possible de bien vivre, même dans un pays partiellement fonctionnel, rongé par l’inflation et la corruption. Les prix augmentent, mais le peso se déprécie encore plus vite. Par conséquent, les prix réels baissent. Mais il est impossible de compter sur le gouvernement… ou sur sa monnaie. Il vous faut une monnaie réelle qui vous appartient.
Le sujet qui nous intéresse est celui de la monnaie. Mais c’est bien plus qu’un simple outil qu’on utilise pour acheter un café latte. La monnaie est une « construction sociale » explique les chercheurs. Elle régule et enregistre les échanges entre les gens. Il y a un prêteur et un emprunteur. L’un est l’esclave de son salaire, l’autre est son maître. L’un prend, l’autre fabrique.
Pour quelle contribution ?
Dans un système intègre, avec de l’argent intègre, un individu intègre peut évaluer sa valeur dans la société en grande partie (mais pas uniquement) à l’aune de l’argent qu’il possède. Il gagne de l’argent en échange des biens et de services qu’il prodigue aux autres. Plus il donne, plus il reçoit. Et la valeur de sa contribution à la société correspond à ce qu’il lui reste après ses dépenses. En d’autres termes, son épargne. On dresse le bilan à la mort de l’individu en question, et on peut alors voir s’il a apporté une contribution à la société ou s’il a été un poids.
Bien sûr, nous autres humains sommes honnêtes seulement par moments. Nous trichons régulièrement… souvent… dès que l’on peut s’en tirer à bon compte. C’est ce qui rend le monde de la monnaie si intéressant.
Or, ce monde a été récemment marqué par un événement particulièrement intéressant : les Etats-Unis et ses partenaires du monde occidental ont plombé leurs propres monnaies en imposant des restrictions à leur utilisation.
Ils en ont fait des armes et ont braqué ces armes contre les Russes. Une personne qui aurait fait fortune en fournissant du gaz pour chauffer les ménages en Europe de l’Ouest pourrait se retrouver privée de son argent. Boom… Elle est désormais morte financièrement.
Oui, c’est un monde cruel, cher lecteur, et c’est un épisode particulièrement effrayant et cruel qui se déroule sous nos yeux. L’intelligentsia occidentale a décidé que les Russes étaient de mauvais bougres. Ils ont imposé des sanctions.
Chaque jour de nouveaux articles nous présentent Vladimir Poutine comme un ogre. Le Congrès américain l’a écrit noir sur blanc, en condamnant la Russie et en apportant son soutien à l’Ukraine. Seuls trois membres ont voté contre : la presse les a considérés comme des traîtres à la nation.
Sphères d’influence
Il y a un adage connu à Wall Street : « Si tout le monde pense la même chose, alors personne ne pense. »
La doctrine Monroe donne aux Etats-Unis une « sphère d’influence ». Tout au long de leur histoire, les Etats-Unis ont envahi, soumis et maltraité leurs voisins. Ils ont envahi le Nicaragua à deux reprises et ont également soutenu une guérilla contre le gouvernement en place. Lors de la crise des missiles de Cuba, ils ont failli précipiter le monde dans une guerre nucléaire, en exhortant les Soviétiques à retirer leurs missiles de Cuba. La CIA a même facilité l’invasion de l’île.
Les Etats-Unis n’ont jamais été sanctionnés. Le dollar ne s’est pas effondré. Les Américains fortunés n’ont pas été expropriés de leurs yachts amarrés dans les ports étrangers.
Nous ne prenons aucun parti dans le conflit entre la Russie et l’Ukraine. Mais la Russie a également sa sphère d’influence. Il faudrait être stupide pour penser le contraire. En contribuant à renverser le gouvernement ukrainien pro-russe en 2014, les va-t-en-guerre américains n’ont-ils pas eux aussi franchi une ligne rouge ?
Mais, comme pour la guerre contre le terrorisme, le sauvetage de Wall Street ou la réponse au Covid, il est interdit d’exprimer une opinion contraire.
Même dans notre petite église en Irlande, l’organiste a joué l’hymne ukrainien – par solidarité, selon ses propres mots. Pourquoi ne fait-on preuve d’aucune solidarité avec les Russes ?
Comment peuvent-ils savoir ? Peuvent-ils vraiment distinguer le grain de l’ivraie dans les confins de la Toundra ? Qu’est-ce qui est le mieux pour le peuple ukrainien : les marionnettes de Washington ou celles de Moscou ?
Nous n’en savons rien. Mais nous sommes persuadés que la plupart des gens n’en savent pas plus que nous.
La suite au prochain épisode…