Le panorama économique devient spectaculaire avec une dette publique américaine qui croit deux fois plus vite que l’économie. Qui va payer ?
Où en sommes-nous ? Avec tout ce qui se passe, nous risquons de perdre le fil.
Fermer la frontière avec le Mexique ? Un accord commercial avec la Chine ? Un catcheur assommé ?
Aucune actualité n’est si idiote et si visiblement insipide qu’on ne la prend pas au sérieux. Mais qu’est-ce qui compte ? Qu’est-ce qui n’a aucune importance ?
Revenons un peu en arrière pour tenter d’y voir plus clair…
Comme vous le constaterez, une vraie urgence nationale est en train de prendre forme aux Etats-Unis – et elle n’a rien à voir avec le Rio Grande.
Mise à jour géographique
Avant d’en arriver là, une petite mise à jour sur nos voyages. Il s’est passé quelque chose d’extrêmement inhabituel dans la vallée de Calchaqui la semaine dernière : il a plu. Personne ne se souvenait d’avoir vu de la pluie aussi tard dans l’année… et personne ne s’en plaignait.
Mais cela causait des problèmes à votre correspondant.
« Patron, je ne suis pas sûr que vous réussirez à sortir », a dit notre intendant.
« La pluie aura peut-être emporté la route. Et même si vous atteignez la rivière, vous ne réussirez peut-être pas à traverser ».
Nous nous sommes rappelé qu’un voisin avait passé trois ans avant de pouvoir se rendre sur sa propriété. Chaque fois qu’il arrivait à la rivière, le courant était trop fort – il ne pouvait pas traverser.
Mais nous en sommes arrivé à apprécier notre camionnette Toyota 4×4. C’est le petit modèle. Il n’est pas disponible aux Etats-Unis ; c’est le véhicule préféré des dealers de drogue en Amérique du Sud, et des terroristes au Moyen-Orient. Il est confortable et fiable, et il va presque partout. Nous nous sommes donc mis en route.
Après deux jours de pluie, dans la vallée, les montagnes des deux côtés étaient couvertes de neige. Un ciel bleu vif. De la neige immaculée. Le paysage était à couper le souffle.
La route sortant de la propriété se révéla être en assez bon état. Il y avait de profondes ornières ici et là, mais rien qui puisse nous arrêter.
Une fois arrivé à la rivière, cependant, nous avons vu des voitures et des motos. Elles n’avaient pas pu traverser et étaient plantées sur la rive, patientant.
Devant nous, la rivière – une petite centaine de mètres de large, l’eau charriant de la boue écarlate.
Dans le siège arrière se trouvait Nolberto. Aide au ranch désormais retraité, Nolberto nous avait demandé de le conduire en ville. Nous avons accepté avec plaisir… mais là, nous avions besoin de son aide.
« Eh bien, Nolberto, qu’en pensez-vous ? On se risque ? On tente la traversée ? »
« Sí… allez-y », déclara le vieil homme, un large sourire aux lèvres. Demander des conseils de conduite à Nolberto revient à demander à Natalio de corriger nos fautes d’orthographe. Natalio est illettré ; Nolberto n’a jamais conduit un véhicule motorisé de sa vie.
Mais nous n’avions pas envie d’attendre – et à en juger par les deux personnes qui traversaient à pied, l’eau était à hauteur de genou.
Nous avons fait ronfler le moteur et sommes entré dans la boue. D’abord, la camionnette sembla couler et ralentir… embourbée. Puis les roues ont dû trouver le fond : elle a avancé, émergeant triomphalement de l’autre côté de la rivière.
Nolberto a souri : « Ha ha… no problema« .
La véritable menace
Nous sommes désormais à Paris… et nous nous concentrons sur les données.
Lorsque Donald Trump a été élu, l’équipe Obama et la Fed de Bernanke avaient déjà planté le décor. La dette nationale américaine avait augmenté de 9 000 Mds$ au cours des huit années précédentes, et la Fed avait imprimé 3 600 Mds$ supplémentaires pour acheter des obligations.
Toutes ces choses ne signaient pas la fin du spectacle — ce n’était que le début. Mais si les autorités s’en tenaient à un tel script, la pièce finirait en tragédie, non en comédie.
Le PIB américain augmente de 2,5% par an. La dette fédérale augmente deux fois plus rapidement. Il n’y a aucune chance que cela finisse bien.
Les démocrates affirmaient cependant qu’ils avaient le contrôle de la situation. S’ils avaient autant augmenté les déficits, c’était uniquement à cause de l’urgence nationale causée par la crise de 2008-2009 ; à partir de là, les déficits baisseraient, dirent-ils.
La Fed, elle aussi, avait commencé à « normaliser » les taux d’intérêt et prévoyait de supprimer les 3 600 Mds$ d’argent bizarre injecté en urgence dans le système.
« Ne vous inquiétez pas », ont-ils dit… « nous savons ce que nous faisons ». Mais durant la dernière année Obama, le déficit était toujours à 581 Mds$ – une somme énorme pour une année d’expansion économique.
A l’heure des élections de 2016, nous étions d’avis que ni les terroristes étrangers… ni l’immigration illégale… ni le copinage avec la Russie… ni même l’Iran ne constituaient une vraie menace pour les Etats-Unis.
La vraie menace était à Washington, pas à l’étranger. Le vrai danger, c’était ce que les Etats-Unis s’infligeaient à eux-mêmes, et non d’autres.
A moins que la Maison Blanche et/ou le Congrès ne fasse preuve d’un peu de clairvoyance et de cran, le pays fera faillite – d’une manière ou d’une autre.
Cela – comme nous l’avons vu dans la République de Weimar, au Venezuela, au Zimbabwe, au Brésil ou en Argentine – n’est pas qu’une question d’argent. Lorsque la monnaie se délite, d’autres choses tendent à faire de même – la politique, la justice, la société civile… tout ou presque.
Mais recevoir quelque chose en l’échange de rien est une habitude difficile à perdre.
En 2016, les gens étaient accros. Les baby-boomers prenaient leur retraite ; ils avaient payé des impôts – dont la Sécurité sociale – toute leur vie. Ils attendaient donc qu’on prenne soin d’eux durant leur vieillesse.
Peu leur importait que les autorités aient déjà gaspillé jusqu’au dernier sou. Quant aux finances gouvernementales – c’était le problème de quelqu’un d’autre.
Mais de qui ?