Le Venezuela est l’illustration de tout ce qui ne marche pas mais qui est si populaire : prendre l’argent des autres, s’endetter et créer de la monnaie à partir de rien.
« Des soldats se révoltent… »
« Des millions de personnes au bord de la famine »…
« Le plus gros exode de masse de l’histoire des Amériques »…
Quel magnifique spectacle ! Juste devant nos yeux… une expérience en direct et en temps réel. Toutes les illusions… les prétentions… les sottises… les escroqueries…
… Révélées aux yeux de tous. A présent, étalé devant nous comme un dealer de drogue à la morgue, se trouve un Grand Rêve si complètement démoli qu’il est impossible d’en douter : c’était une arnaque dès le départ.
Ceci dit, quand on met une marmite sur le feu, elle finit par bouillir. Et Caracas est en ébullition depuis mercredi.
Cette semaine, défiant directement la présidence de Nicolás Maduro, Juan Guaidó, président de l’Assemblée nationale vénézuélienne, s’est auto-proclamé président légitime du pays.
Des malandrins au gouvernement
Le gouvernement est toujours une manière pour quelques-uns d’exploiter la masse. Cependant, ces quelques-uns ne sont pas toujours les mêmes.
Le contexte : Hugo Chávez a remporté le vote populaire en 1998. Le Venezuela était alors un pays riche, soutenu par ce qui semblait être un flot inextinguible de revenus pétroliers.
- Chávez combinait certains des pires traits d’Alexandria Ocasio-Cortez (AOC) et Donald J. Trump (DJT). C’était un « homme fort », un je-sais-tout qui affirmait représenter le petit peuple. Il entretenait également toutes les illusions populaires : les déficits ne comptent pas… les autorités doivent apporter éducation et soins de santé gratuits… et l’on peut « stimuler » l’économie et « sortir de la dette par la croissance » en dépensant de l’argent qu’on n’a pas.
- Chávez avait réalisé qu’il y avait bien plus d’électeurs pauvres que d’électeurs riches.
Il a proposé, comme Mme Ocasio-Cortez, divers larcins du genre socialiste, destinés à consolider son soutien parmi les masses. Parmi ces programmes : saisies de terres, contrôles des prix et nationalisation de secteurs majeurs.
Ces programmes ont eu un succès retentissant. Sa cote de popularité a grimpé à 80%. Inévitablement, certains sont devenus jaloux de son pouvoir… d’autres en ont eu peur… et quelques-uns ont réalisé que ses politiques détruiraient le pays.
Ils se sont soulevés contre Chávez en 2002. Mais la révolte n’a pas duré longtemps et Chávez a bien vite repris les commandes du pays. En 2006, il a remporté un troisième mandat avec une substantielle majorité et a continué à renforcer son pouvoir jusqu’à sa mort, en 2013.
A partir de là, Nicholás Maduro, un allié de Chávez, a pris le contrôle et a continué dans la même direction que son prédécesseur, vouée à l’échec.
A l’époque, le pétrole s’échangeait encore à plus de 100 $ le baril… mais aucune somme d’argent n’est si énorme qu’on ne peut pas la gaspiller ou la voler.
L’argent facile provenant des revenus pétroliers a attiré les rêveurs et comploteurs habituels. Ensuite, lorsque le prix du baril est passé sous les 50 $ en 2015, l’argent facile n’était plus si facile… et le pays a changé de cap pour foncer droit dans le mur.
Les refuges familiers de l’emprunt et de la planche à billets
Les zombies abandonneraient-ils leur riche butin ? Les compères rendraient-ils leur bien mal acquis ? Le gouvernement vénézuélien réduirait-il les dépenses pour protéger le bolivar ?
Bien sûr que non. Ce n’est pas ainsi que ça fonctionne… ni à Caracas, ni à Washington.
Les gens aux commandes ont préféré avoir recours au refuge familier des canailles — l’emprunt… et la planche à billets.
La dette gouvernementale a grimpé, passant de 25% du PIB en 2009 à une estimation de 160% du PIB en 2018 (à titre de comparaison, le ratio dette/PIB du gouvernement US est de 105%).
L’inflation s’est aggravée. Le bolivar, comme le dollar, est de l’argent factice (il n’est pas adossé à l’or). Cette année, le taux d’inflation devrait atteindre 1,3 millions de pourcents. C’est à ce niveau-là que les gens arrêtent de compter et commencent à faire leurs valises.
C’est exactement ce que font nombre d’entre eux. Ils prennent le large… et se rendent aux frontières comme ils le peuvent.
Heureusement pour eux, leurs voisins n’ont pas érigé de murs pour les empêcher d’entrer, si bien qu’ils fuient vers la Colombie, le Brésil ou la Guyane… et font de leur mieux pour survivre.
Un désastre financier typique
Oui, c’est un désastre financier plutôt typique… causé par les promesses et illusions habituelles… et imposé par les flics et criminels habituels.
A présent, il semble atteindre une sorte de dénouement… une apogée… où les dirigeants qui ont saigné à blanc le pays doivent désormais passer à autre chose… et permettre à une nouvelle série de dirigeants de faire leur travail.
Un article de Reuters paru mercredi :
« Les manifestants ont envahi les avenues de l’est de Caracas, scandant : ‘Maduro dehors’ et ‘Guaidó, Presidente’ tout en agitant des drapeaux nationaux. La police a tiré des grenades lacrymogènes pour disperser les manifestants dans plusieurs zones, après qu’un rassemblement mardi soir aurait fait quatre morts.
Guaidó, âgé de 35 ans, a galvanisé l’opposition avec une campagne où il déclarait que Maduro était un usurpateur après les élections de l’an dernier, largement considérées comme frauduleuses, et a promis une transition vers un nouveau gouvernement dans un pays qui subit un effondrement économique hyper-inflationniste.
‘Je jure d’assumer tous les pouvoirs de la présidence afin d’assurer la fin de l’usurpation [par Nicholás Maduro]’, a déclaré Guaidó, récemment élu à la tête du Congrès, devant une foule exubérante ».
Presque immédiatement, les Etats-Unis se sont rangés du côté du nouveau gouvernement. M. Trump a déclaré qu’il reconnaîtrait M. Guaidó comme président légitime. Son vice-président, Mike Pence, a fait la remarquable affirmation que les Vénézuéliens finançaient la caravane de réfugiés en route vers la frontière américaine…
Apportant une contribution gratuite et comique, le sénateur Rick Scott, de Floride, a déclaré que le Venezuela devrait être nommé Etat terroriste et que son président, Nicholás Maduro, « est clairement un terroriste ».
Démocratie consensuelle
Ce qui rend la démocratie consensuelle — tout juste — acceptable, c’est le côté consensuel, pas la démocratie.
Même le crétin le plus ignorant et le plus incompétent peut se faire élire, comme cela a souvent été prouvé et largement illustré. On ne peut pas tromper tout le monde tout le temps, notait Abraham Lincoln. Au fil du temps, les politiques les plus absurdes tendent à être découvertes… et rejetées.
Evidemment, cela pousse les aspirants-dirigeants ambitieux à se débarrasser de la partie « consensuelle » des institutions dès que possible. C’est ce qu’Hitler a fait en 1933. Chávez s’est lancé dans une série de réformes constitutionnelles peu après son élection.
En 2010, les conséquences des nationalisations, contrôles de prix et déficits commençaient à s’accumuler. Mais à ce moment-là, le besoin de consensus avait disparu. Chávez et son successeur, Maduro, pouvaient faire à peu près tout ce qu’ils voulaient… jusqu’à un certain point.
Ce point a peut-être été atteint hier.