La Chronique Agora

Une attaque insidieuse de votre porte-monnaie

En garde, cher lecteur ! Nous sommes attaqués !

Jean-Claude Trichet, président de la Banque Centrale Européenne, a tiré la sonnette d’alarme.

"Toutes les banques centrales, dans des périodes comme celle-ci où on a des menaces inflationnistes qui proviennent des matières premières, doivent (…) faire très attention à ce qu’il n’y ait pas d’effets ‘second tour’", a indiqué M. Trichet lors d’un entretien accordé au Wall Street Journal depuis son bureau donnant sur le quartier d’affaires de Francfort.

Pouvez-vous y croire, cher camarade ? Si nous lisons bien le commentaire de M. Trichet, il semblerait que les communautés alimentaires et énergétiques mondiales se rassemblent sciemment contre nous. Longtemps considérées comme des végétaux et des minéraux sans âme et sans conscience, il semblerait que les matières premières aient décidé de leur propre chef de devenir plus chères, d’augmenter d’elles mêmes leur prix. Nous pouvons presque entendre les clameurs des batailles en provenance des champs : "épis de maïs, unissez-vous !"

On a prévenu les agriculteurs de ne dormir que d’une oreille, on ne sait jamais : une laitue trop zélée pourrait rompre les rangs et attaquer à la faveur de la nuit.

▪ M. Trichet est occupé à maintenir le bon ordre parmi les 17 pays de la Zone euro avant la tenue du Forum économique mondial ce week-end à Davos, en Suisse. Il les encourage à renforcer la "surveillance" les uns par les autres des politiques fiscales de chacun.

Le téméraire Français a noté que c’est la discipline budgétaire qui profite le plus à la croissance et à la création d’emplois en "améliorant la confiance des ménages, des entreprises, des investisseurs et des épargnants".

Etonnant ! Que ferions-nous sans les banquiers centraux de la planète, notre première ligne de défense contre les prix alimentaires qui gonflent d’eux-mêmes ? Comment saurions-nous épargner et investir si ce n’était pour les clameurs des champs de bataille de ces combinards intrépides et convaincus ?

Gaspillage… mauvais investissements… distorsions de marché… émeutes de la faim… Voilà ce qui nous attendait sans la présence généralisée de planificateurs centraux omniscients.

Pourtant, malgré les efforts considérables de nos sauveurs monétaires, les prix alimentaires ont obstinément augmenté à travers toute la planète. Le Moscow News a l’explication :

"Les prix alimentaires ont explosé à la hausse au second semestre de l’année suite à la sécheresse mondiale de l’été ; un semblable fléau en 2011 pourrait conduire le monde à une catastrophe totale".

"Le panier moyen de produits alimentaires a augmenté de 10,6%, dépassant l’inflation, qui a atteint 8,8%".

"Mais l’inflation alimentaire globale a atteint 25% sur un an fin 2010 – en hausse de 7,5% en juin par rapport à son point bas avant que la sécheresse ne sévisse".

Que se passe-t-il ici ? Comment se fait-il qu’une armée d’épis de maïs — en hausse de 94% depuis juin — s’est montrée plus maligne que nos plus grands économistes ?

Peut-être, comme l’a expliqué avec tant d’éloquence Milton Friedman, l’inflation est réellement "toujours et en tous lieux un phénomène monétaire".

Certes, si l’on admet cette position à la marge, nous devrions aussi croire, comme l’a postulé Friedman, "qu’il n’existe pas de repas gratuit". Insensé, non ? Mais laissons notre imagination divaguer juste un instant…

Admettons que, en imprimant des millions de millions de dollars en nouveaux billets, les banques centrales en réalité provoquent l’inflation plutôt que de la combattre.

Et alors ?

Oui, oui… Nous savons que les "Bernanke" du monde entier agissent en ayant à coeur de défendre nos intérêts. Nous comprenons qu’ils savent quel levier actionner exactement et sur quel bouton appuyer précisément au bon moment. Mais qu’arriverait-il si — ce n’est qu’une hypothèse, bien évidemment — ils se trompaient ? Verrions-nous l’inflation se répandre sur les marchés, faisant hausser les prix à la pompe et au supermarché ?

Ce dont nous avons besoin ici c’est d’une mission de reconnaissance. Dites-nous donc, cher camarade éclaireur, ce qui se passe dans votre voisinage. Remarquez-vous une augmentation de vos factures mensuelles ? Serait-ce que l’inflation est déjà là, qu’elle a infiltré nos défenses et rôde parmi nous ?

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