La Chronique Agora

Un mois de mai qui a tourné en rond…

** Les indices boursiers se sont beaucoup mieux comportés ces trois derniers jours que les statistiques macroéconomiques ne le suggéraient depuis le début de la semaine. A part un trou d’air de -1,9% mardi dernier, les opérateurs se sont montrés plutôt prompts à digérer les nombreux signaux alarmants provenant du secteur immobilier (en France, en Angleterre ou en Espagne) et du secteur de la consommation — elle était en berne de 0,5% en Allemagne, reculait de 1,7% en France et plongeait de 3,8% en Espagne au mois d’avril.

La croissance américaine a été revue à la hausse jeudi dernier (de +0,6 à +0,9%). Cependant, ce correctif résulte principalement d’une révision du ratio import/export qui réduit certes le déficit américain mais traduit également un tassement de la demande intérieure (-0,1% au premier trimestre 2008).

Le mois de mai 2008 a donc démenti sa mauvaise réputation boursière puisqu’il s’achève sur une note globalement positive. Non seulement le CAC 40 a aligné une troisième séance de hausse consécutive — et de quatre sur une série de cinq ! — mais le score hebdomadaire avoisine +1,6% et le score mensuel +0,35. C’est peut-être un écart symbolique, mais les acheteurs prouvent ainsi qu’ils gardent la main après l’avoir reprise à la mi-mars, alors qu’ils semblaient l’avoir brutalement perdue une semaine auparavant — avec un score hebdomadaire de -2,85%.

** Les gérants d’OPCVM ont procédé ce mois-ci à quelques arbitrages (rotation sectorielle) en faveur des valeurs du luxe (Hermès bondit de 23%), des SSII et des technos. Altan a ainsi pris 14%, Alcatel 12%, Cap Gemini 12%, ST-Micro 11,5%, Neopost 11%. Les bancaires — grandes gagnantes du mois de mars — ont quant à elles été délaissées : -21% sur le Crédit Agricole qui prépare une augmentation de capital, -15% sur Dexia (dividende exclu), -11% sur la Société Générale, -10% sur Natixis ou Nexity.

Les titres du secteur « produits de base » ont également été privilégiés, à l’image de Vallourec (+13,5%) ou d’Arcelor-Mittal (+12%) ; les utilities ont connu un net retour en grâce ces derniers jours. Sur la semaine écoulée, Suez a bondit de 8%, son partenaire Gaz de France de 7% et Véolia de 4,5%. Le titre Total manque à l’appel : il cède 0,8% dans le sillage du pétrole.

** Le recul du baril se confirmant (sous 126 $) vendredi après-midi, le marché parisien affichait jusqu’à 1,1% de hausse vers 16h30 ; le CAC 40 culminait alors vers les 5 030 points. Il a cependant reperdu la moitié de ses gains une heure plus tard. Heureusement, un petit sursaut de 0,2% au moment du fixing — sur une belle envolée d’EDF de 2,3% — lui a permis d’afficher un gain plutôt flatteur de 0,76% (à 5 014 points). L’indice parisien prenait ainsi la tête du peloton européen devant Francfort (+0,59%) et Madrid (+0,45%).

L’évolution de Wall Street à la mi-séance s’avérait conforme aux anticipations de fin de matinée avec un gain de 0,1% pour le Dow Jones tandis que le Nasdaq progressait de 0,5% dans le sillage de Dell qui bondit de 8% — sa croissance est tirée par les marchés émergents.

** L’après-midi de la séance de vendredi fut riche en statistiques américaines. Conformément aux attentes, les dépenses des ménages ont progressé de 0,2% et l’indice PCE, un indicateur de l’inflation particulièrement surveillé par la Réserve fédérale, a affiché une progression équivalente de 0,2% en avril, ce qui annule en quelque sorte la hausse de 0,2% des revenus des ménages américains.

Ces derniers n’ont pas le moral, comme le démontre l’indice de confiance du Michigan. Le baromètre mensuel est tombé à son plus bas niveau depuis juin 1980 (59,8 contre 62,6 fin avril) et les attentes chutent de 2,2 points à 51,1 points (au plus bas depuis octobre 1990).

Seule petite consolation, l’indice d’activité PMI de Chicago s’est redressé en mai à 49,1 après 48,3 en avril (contre 48,5 attendu). L’autre élément favorable fut le recul du prix du baril WTI livraison juillet qui s’inscrit en baisse hebdomadaire de 4% à 126,9 $. Il avait dépassé les 135 $ jeudi dernier avant de tester 125,5 $ au plus bas vendredi.

** Cette semaine a également été marquée par une dégradation du marché obligataire. Les taux longs référence « 10 ans » se retendent à 4,05% aux Etats-Unis et à 4,5% en Europe suite aux rumeurs de resserrement du loyer de l’argent dans un contexte inflationniste d’ici l’automne. Cette hausse de rendement des Bunds, des OAT (qui affichent 4,6%) et des T-Bonds a concurrencé le métal précieux qui perdait 4% d’un vendredi sur l’autre : l’or en termine à 885 $ l’once après avoir reculé jusque vers 875 $.

La thématique inflationniste martelée par les banques centrales devrait lui permettre de prendre sa revanche ; en attendant, tout repli vers 830 $ ou 820 $ sera le bienvenu !

Philippe Béchade,
Paris

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