▪ Presque trop facile ! Tellement prévisible ! Les marchés sont sous contrôle et le mot d’ordre de la semaine (comme de la précédente et de celle d’avant) reste : « on ne va nulle part tant que le VIX (l’indice du stress à Wall Street) ne sera pas retombé au voisinage du plancher historique des 15 ».
A Paris, c’est bien simple, le CAC 40 n’est plus ressorti du corridor 3 900/3 940 depuis la première heure de cotation lundi.
Ce jeudi, il s’est contenté d’effacer (au point près) ses 12 points de gains de la veille et revient au contact des 3 917 points. Les 3 910 points ont été préservés, les 3 900 points même pas menacés.
▪ Le but poursuivi depuis trois jours a été facilement atteint. Aucun signal technique directionnel ne se matérialise dans ces conditions. Regardez ce qui se passe pour le Dow Jones, cela crève les yeux : il est enfermé au sein d’un corridor de 12 340/12 440 depuis lundi ; le S&P navigue entre 1 315 et 1 300 points. Ces deux indices ont testé les extrémités de ces fourchettes jeudi.
Même les traders intraday — connus pour n’avoir aucun état d’âme face à des évolutions absurdes ou surréaliste des cours — en ont assez d’être roulés dans la farine. Ils sont de plus en plus nombreux à déserter ce que nous avons du mal à appeler un marché.
Ce ne sont pas des affirmations gratuites : les volumes d’échanges sur le Dow Jones sont là pour le prouver. Les volumes quotidiens plafonnent sous les 150 millions de titres depuis quatre jours. Un total dont il faut retrancher entre 50 et 60% de transactions ultra-rapides qui ne correspondent à aucune prise de position de quelque nature que ce soit.
C’est comme un jus de citron dans un mixeur… Tant que l’hélice tourne, on a l’impression que le bocal est rempli à ras bord mais dès que l’on cesse d’appuyer sur la touche « pulse », le liquide retombe et suffit tout juste à tapisser le fond.
Voilà ce qui se produirait si les trois ou quatre plus grosses banques d’investissement qui sévissent à Wall Street — elles ne font que leur métier qui est de gagner de l’argent par tous les moyens — débranchaient leurs supers ordinateurs de trading algorithmique. La liquidité retomberait à des niveaux qui rappelleraient le milieu des années 80. Les opérateurs plongeraient la tête la première dans une piscine à peine plus profonde que la pataugeoire des nourrissons.
▪ Wall Street n’est plus qu’un tourbillon de transactions à la milliseconde !
De loin cela ressemble à une tornade F5 (du calibre de celles qui ont dévasté Joplin dans le Missouri le 22 mai dernier). Mais vu de dessous, c’est tout creux à l’intérieur, ce n’est que du vent.
Et il n’existe pas de tornade (même de la catégorie plus impressionnante) qui à un moment ne se dissipe… et nous serions tenté d’ajouter : ne cesse de nuire.
Le problème c’est qu’à la différence des tornades, les victimes risquent d’être plus nombreuses après que pendant la tempête. Une fois envolée l’illusion de la liquidité ainsi que les courants ascensionnels, les actions retomberont inexorablement comme le font tous les débris en suspension.
Si la Fed cesse d’alimenter la machine à tourbillons avec son argent bidon, rien ne viendra contrarier les lois de la gravité. Ceux qui soutiennent les cours le savent mieux que nous.
Toute autre option que la hausse est impossible, impensable même. La moindre correction non maîtrisée aurait le même effet qu’un accident de terrain sur une tornade : les flux d’air seraient brusquement perturbés, déstabilisant le vortex. La situation tournerait au chaos en quelques minutes, comme le 6 mai 2010.
Garder le contrôle est absolument primordial et tous les moyens sont mis en oeuvre pour y parvenir. Le mensonge et l’intox sont aussi de mise. Rappelez-vous que le tsunami du 11 mars puis l’explosion de Fukushima le 13 mars ont été classés dans la catégorie des « destructions créatrices ».
Destruction de la croissance japonaise et création de plus de dette, le marché n’y voit aucun motif de douter de la solvabilité de l’Archipel. Il ne perçoit pas non plus que les autorités nippones se retrouvent en concurrence frontale avec les Etats-Unis sur le marché des capitaux.
A propos de croissance qui se dissipe comme un tourbillon de sable arrivant au-dessus de la mer, le PIB américain est confirmé à +1,8% au premier trimestre 2011. Cela malgré les 75 milliards de dollars injectés chaque mois par la Fed au titre du QE2. N’oublions pas non plus les 25 milliards de dollars correspondant aux bons du Trésor arrivant normalement à échéance.
▪ Les investisseurs et les cambistes n’étaient pas au bout de leurs déceptions puisque les inscriptions au chômage ont rebondi de 10 000, à 424 000 (au lieu d’une décrue attendue vers 400 000). Et n’oublions pas l’inflation qui s’élève à 1,4% au premier trimestre (hors énergie).
Le dollar avait logiquement accusé le coup vers 14h30 ; il rechutait alors vers 1,42/euro mais il limitait jeudi soir son repli à tout juste -0,4% vers 1,4130/euro.
L’euro éprouve bien des difficultés pour remonter la pente. Les Européens (les politiques comme les patrons des banques centrales) font bloc pour soutenir la candidature de Christine Lagarde à la direction du FMI.
Mais les images des manifestations contre les mesures d’austérité en Espagne et en Grèce (dont le stock de 111 tonnes d’or pourrait être gagé par ses bailleurs de fonds européens) sèment le trouble. D’autant que la situation apparaît potentiellement explosive en Angleterre puisqu’un scénario de récession à l’irlandaise se met en place du fait de l’effondrement de la consommation.
Elle sera opportunément masquée au mois de mai par l’euphorie consumériste liée au mariage royal. Mais les chiffres de mars et d’avril ne permettent guère de se faire d’illusions sur la tendance à cadenasser les porte-monnaie des ménages britanniques.
La principale inconnue concerne le moment où vont sauter les verrous de la colère.