La Chronique Agora

Indice Stoxx Technology : au secours, la bulle internet revient !

▪ En l’espace de quelques mois, la valeur de Facebook est passée de 34 à 50 milliards de dollars, selon l’estimation du prix d’acquisition d’actions par Goldman Sachs. Ce prix me semble bien élevé pour une entreprise qui pourrait bien être le symbole de la bulle Internet 2.0.

Son chiffre d’affaires repose à 99% sur la publicité. Il est estimé à deux milliards de dollars pour 500 millions de bénéfices nets. Cela représente certes une belle marge, mais de là à justifier de tels multiples de valorisation…

Pire encore, selon le Wall Street Journal, la valorisation de Facebook à partir de la croissance de ses bénéfices en 2011 pourrait mener à une valorisation de 100 milliards de dollars, avec un bénéfice net qui approcherait les deux milliards de dollars sur l’année. Certains nous expliquent d’ailleurs que Google avait été introduit en 2004 sur les mêmes bases de valorisation… Certes.

Mais Facebook n’est pas Google ; Facebook n’a rien d’indispensable et la mode semble être de plus en plus à se désabonner de ce réseau social. Cette folie du marché pour ce qui pourrait être la plus grande introduction en Bourse de l’histoire est, à mon avis, symptomatique d’une valorisation excessive de ce type de société. Nous n’avions pas connu cela depuis une bonne dizaine d’années…

Cela m’amène donc à me pencher sur l’indice des valeurs technologiques européennes, le Stoxx Technology, beaucoup plus sage dans sa valorisation que Facebook, bien entendu, mais qui donne des signes d’essoufflement ces dernières semaines.

▪ L’indice des technos s’essouffle

Comme d’habitude, commençons par un graphique en données hebdomadaires pour bien visualiser où en est l’indice après son rebond depuis deux ans :

Le Stoxx Technology a retracé « seulement » (mais au tick près) 50% de son mouvement de baisse depuis 2007. Il se montre donc plus faible que d’autres indices sectoriels — sans même parler du Nasdaq qui teste actuellement ses plus hauts de 2007 ! Déjà, contrairement à d’autres indices, le Stoxx Technology n’a pas fait de plus haut par rapport à ceux de février et une correction s’est maintenant mise en place.

La précision avec laquelle il s’est arrêté au niveau de ce retracement de 50% de la dernière vague de baisse est impressionnante. Ce niveau correspond aux anciens plus hauts de septembre 2008 et constitue une résistance horizontale importante (qui en plus est juste au-dessus d’une oblique descendante depuis 2007). Tout cela en fait une zone de résistance triplement importante pour les prochaines semaines, contre laquelle les cours viennent de buter par deux fois récemment.

Le récent rebond des cours apparaît donc comme une opportunité de vente. Les indicateurs mathématiques, y compris à l’échelle hebdomadaire, donc moyen terme, que j’ai mis ici en avant, se sont retournés à la baisse. Le RSI à 14 semaines est ainsi sous sa ligne de signal et il a cassé un support intermédiaire devenu résistance au niveau des 66.

▪ Quels objectifs pour les prochaines semaines ?

Désormais, sous la zone de résistance majeure des 246 points, une correction est donc en cours sur l’indice technologique européen. On pourrait donc s’attendre à un nouvel échec contre l’oblique baissière que nous testons avec pour conséquence une correction en direction du support horizontal des 206 points, ancien plus haut de juin 2010.

Ce niveau de support horizontal correspond également à la droite de tendance en place depuis mars 2009 sur les cours, ce sera donc un niveau très important à suivre dans les prochaines semaines. Si ensuite la correction s’amplifiait, après un rebond sur ce support, nous aurions une accélération en cassure en direction des plus bas de l’année dernière à 180 points.

Le secteur technologique n’a plus la même importance qu’il y a quelques années, mais il fait souvent partie des secteurs leaders dans les mouvements majeurs. Je surveillerai donc attentivement ces niveaux en corrélation avec ceux des indices à court terme.

__________________________

Les liquidités, une option à envisager pour vos investissements ?

Bill Bonner

▪ Il s’en passe, des choses, ces derniers temps ! Les Etats-Unis ont envoyé Oussama ben Laden fumer les mauves par la racine. L’argent-métal s’est effondré. L’emploi américain semblait épouvantable jeudi… et plus sympathique vendredi. On aurait dit que les actions avaient des problèmes… puis elles se sont stabilisées.

Et le président Obama est soudain devenu Le Décideur.

Que faut-il en penser ? Ou — une question plus concrète — si vous avez de l’argent à investir, que faut-il en faire ?

L’or a perdu un peu de terrain, lui aussi. Faut-il en acheter maintenant ? Qu’en est-il des matières premières, puisqu’elles semblent redescendre de leurs sommets record ? Le pétrole a perdu près de 10% la semaine dernière. Et les actions ? Faut-il en acheter — alors que toutes les preuves démontrent qu’elles sont susceptibles d’entamer une longue baisse… et produiront probablement des rendements inférieurs à la moyenne pendant de nombreuses années ?

Quelle est l’alternative ? Des liquidités !

Mais attendez un peu. Qui veut détenir des devises papier — et notamment des dollars — quand l’inflation grimpe… et que le billet vert perd actuellement du terrain au rythme de plus de 7% par an (selon le Billion Prices Project du MIT) ?

Une situation difficile pour les investisseurs, coincés entre le marteau et l’enclume.

▪ Voici ce que notre amie Merryn Somerset-Webb, rédactrice en chef de l’édition britannique de MoneyWeek, a à dire sur le sujet :

« Un baissier de long terme sur l’immobilier m’a dit cette semaine qu’il allait acheter un appartement. Pourquoi ? Parce qu’il ne peut se résoudre à garder son argent en liquidités alors que le taux d’épargne est de 3%, l’inflation est à 5% et les impôts sur le revenu sont à 40%. Mais il ne peut se résoudre à acheter d’autres choses non plus : la plupart des actions semblent surévaluées, les matières premières pourraient être au bord d’un nouveau sommet cyclique et on ne peut pas non plus détenir tout l’or du monde. Mais son argent doit bien ‘aller quelque part’. Au moins l’immobilier offre-t-il un peu de rendement ».

« Je comprends ses arguments — détenir des liquidités durant une période de taux d’intérêt négatifs peut être douloureux. Mais si c’était l’option la moins mauvaise ? Selon Dylan Grice, de la Société Générale, s’il est vrai que les liquidités ‘ont généralement un rendement réel attendu de zéro’, il y a au moins ‘une quasi-certitude quant à ce rendement attendu’. En gros, si vous avez des liquidités, vous savez que vous ne gagnerez pas d’argent, mais vous n’en perdrez pas non plus beaucoup ».

« En général, cela ne suffit pas. La plupart du temps, les actifs ‘à risque’ rapportent plus de 0%. Il semble donc raisonnable de favoriser les actions, les obligations, les matières premières, les maisons et le vin plutôt que les liquidités. Mais il y a également des occasions où les actifs à risque ne rapporteront probablement pas plus de zéro — des périodes où le risque de perdre de l’argent dans un actif autre que les liquidités est si élevé qu’il est plus sensé de viser un rendement zéro qu’un vrai rendement. Actuellement, déclare Grice, nous vivons peut-être ‘exactement une telle période’. »

Merryn a probablement raison. C’est du moins ce que nous avons conclu, à notre Bureau familial. La part du portefeuille de la famille Bonner dédiée aux liquidités est inconfortable.

Elle est inconfortable parce que nous sommes d’avis que les liquidités seront bientôt le pire endroit où mettre votre argent.

__________________________

Standard & Poor’s abaisse la notation de la dette grecque

Philippe Béchade

▪ Nous ne croyons toujours pas au hasard lorsque les indices américains ne font rien pendant les deux premières heures, puis s’envolent soudain de 0,7% dès que les places européennes ont clôturé. Ces dernières ont d’ailleurs terminé presque au plus bas, juste au contact d’importants supports moyen terme.

Sitôt le fixing achevé à Paris, Londres et Francfort, le Dow Jones a repris 100 points en ligne droite — dont 80 points en une demi-heure. Le Nasdaq a grimpé de zéro vers +0,7% sans marquer la moindre pause, et le S&P affichait +0,6% à 1 348 points.

Ne cherchez pas la nouvelle économique qui a provoqué ce soudain vent d’euphorie. L’arrache des cours, sans raison identifiable, a déclenché une vague de rachats automatiques de ventes à découvert. Nous imaginons sans peine qu’elles ont été motivées par les doutes sur la croissance américaine et la solvabilité de la Grèce.

D’après les commentaires glanés sur les sites boursiers américains, les indices se sont envolés dans le sillage des valeurs pétrolières et minières.

En effet, le baril s’est redressé de façon spectaculaire — de 4% à 101 $ sur le NYMEX. Le gasoil grimpait quant à lui de 5,5% à 3,26 $ le gallon. Il n’est pas certain que ce soit une bonne nouvelle pour les consommateurs mais c’est une bonne nouvelle pour les spéculateurs.

Ceux qui se sont fait étriller la semaine passée voient leurs pertes potentielles se réduire significativement et il n’est peut-être plus impératif de vendre des actions pour se couvrir.

▪ Certains hedge funds ont perdu très lourd dans la correction de la semaine passée. Le Britannique Clive Capital aurait subi une perte de 400 milliards d’euros, ce qui équivaut à 9% de son encours. D’autres, plus petits mais plus exposés, auraient chuté de 20%, compte tenu de l’effet de levier vertigineux et d’un appétit immodéré pour le risque. La devise des marchés reste : « avec l’argent de la Fed, ça gagne à tous les coups ».

A défaut de gagner sur tous les tableaux, une montée en flèche plus précoce de Wall Street aurait permis à la Bourse de Paris de limiter la casse. Le CAC 40 a effacé ses gains de vendredi et préservé in extremis les 4 000 points (à 4 007 points en clôture).

En revanche, l’Euro-Stoxx 50 chute de 1,6% (après +0,9% vendredi) dans le sillage de Milan (-1,3%), Madrid (-1,95%) et Athènes. Cette dernière constitue l’épicentre des inquiétudes qui ont ressurgi depuis vendredi soir.

▪ L’agence de notation Standard & Poor’s abaisse de deux crans la notation de la dette grecque à « B » avec perspective négative ; la Grèce juge cette décision infondée. L’autre agence de notation, Moody’s, ne devrait pas tarder à lui emboîter le pas pour une dégradation potentielle de deux à trois crans d’un coup.

Après six à sept semaines d’occultation délibérée — bien que le deux ans grec ait explosé avec un rendement passé de 15 à 25% — la question de l’insolvabilité de la Grèce refait soudain les gros titres. Tiens ? Juste au moment où l’euro s’en allait franchir la barre des 1,50 $… encore un des ces singuliers « hasards » dont les marchés ont le secret.

Wall Street avait tangué vendredi soir lorsque les opérateurs ont appris la tenue d’une réunion de crise (qualifiée de simple réunion de travail) entre les ministres des Finances et des représentants de la Commission européenne ce week-end au Luxembourg.

Dans le même temps, un des plus influents magazines économiques allemands publiait un article évoquant une sortie de la Grèce du système monétaire européen.

Le patron de l’institut allemand IFO (l’équivalent de l’INSEE en France) enfonçait ce lundi un nouveau clou dans ce qui pourrait être le cercueil de l’aventure monétaire grecque ; il a déclaré que la sortie de la Zone euro constituerait « la moins pire des solutions ».

Plus personne ne cherche à nier l’évidence selon laquelle « il va falloir remettre au pot » pour permettre à Athènes de rembourser ses prochaines échéance. Le pays s’enfonce dans une récession d’une ampleur jamais vue depuis les années 80 ; il est exsangue financièrement et la dette continue de s’aggraver alors que les recettes fiscales chutent dramatiquement.

Plus on cherche à réduire le train de vie de l’Etat, plus l’activité économique s’effondre. La hausse des carburants achève de déprimer la consommation.

Mais comme on ne change pas des recettes qui échouent systématiquement, les Finlandais ont repris à leur compte le leitmotiv rigoriste allemand et suggèrent que la Grèce va devoir faire d’avantage d’efforts.

Pour ramener les déficits dans les proportions promises, il suffit de procéder à quelques changements. Par exemple, diminuer la paye des fonctionnaires par deux (alors qu’un seul poste sur cinq sera remplacé à compter de maintenant)… ramener les allocations chômage à 400 euros par mois (plafond forfaitaire, comme en Angleterre)… et éradiquer la fraude fiscale — avec des effectifs de fonctionnaires réduits de moitié pour accomplir cette tâche, cela va de soi.

Mme Lagarde affirme que nous saurons d’ici le 16 mai si Athènes doit accomplir de « nouveaux efforts » pour bénéficier du soutien de ses partenaires. Comme si cela pouvait changer quoi que ce soit à l’équation actuelle…

▪ Il y a encore plus risible : il s’agit du fameux argument selon lequel, en optant pour une « monnaie de singe », la Grèce alourdirait d’autant sa dette libellée en euro !

Donnez-nous quelques secondes pour reprendre notre souffle car nous nous tenons les côtes !

Quand un pays qui fait défaut sur les intérêts de sa dette — ce n’est qu’une question de mois — se retrouve également incapable de rembourser le principal (comme l’Argentine il y a 10 ans), peu importe dans quelle monnaie la dette est libellée… puisqu’elle ne sera pas remboursée !

Quand vous êtes ruiné, peu importe que vous envoyiez une Trabant ou une Porsche dans un platane. Vous n’avez pas de quoi payer… et c’est celui qui vous a prêté son véhicule qui passe pour un idiot !

Les Allemands considèrent qu’ils peuvent encore se permettre de faire une croix sur une guimbarde — même si l’emblématique Trabant est devenue une pièce de musée. Mais il est inutile d’envoyer dans le décor un magnifique Roadster 12 cylindres turbocompressé, jantes ultra-larges et design intérieur par Hermès.

Le marché pense de même, et se dit déjà que le bon côté des choses, c’est que les vacances en Grèce pourraient coûter beaucoup moins cher en 2013 !

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile