La Chronique Agora

Stagflation et sushi

** Les dernières nouvelles nous disent que l’économie américaine ralentit vraiment — comme prévu. Le chômage atteint désormais 5%. Pas de quoi trop s’inquiéter, mais les choses prennent la mauvaise direction.

* "Le chômage tire le signal d’alarme sur l’état de l’économie", déclare un titre du New York Times.

* C’est "le dernier présage de récession", ajoute le Los Angeles Times.

** La cuvée Nouvelle Année est débouchée. Nous en humons le bouquet. Il est tel que nous l’attendions… avec un léger arôme de pourriture. Attendez une seconde… il y a également un petit arrière-goût de vin de riz… oui… c’est bien du Bourbier Sushi… le cru produit au Japon entre les années 90 et 2000 !

* Permettez-nous quelques explications.

* Aux Etats-Unis, 2008 commence comme une année où le pétrole est à 100 $ le baril… l’or est à 850 $ l’once… les actions baissent… le chômage est à 5%… et le dollar vaut à peine plus d’un euro et demi.

* Les petits pays de Malte et Chypre ont choisi d’adopter l’euro. Dans le monde entier, les investisseurs, les revendeurs de drogue et les banquiers centraux semblent faire le même choix.

* Qu’en penser ?

* Pour commencer, nous dirions que l’économie semble se diriger tout droit vers la terrible synthèse de l’inflation et de la déflation, connue sous le nom de "stagflation". Les prix des matières premières grimpent. L’or grimpe. Le pétrole a déjà grimpé. Encore et toujours plus haut… et pourtant, c’est à peine si l’économie arrive à sortir du lit le matin. Les consommateurs vont se trouver à court d’argent à dépenser. Et les actifs financiers — le genre d’actifs que les gens aiment à voir grimper — baissent.

* Ensuite, nous soulignerions que ce n’est pas la première fois que la stagflation frappe les Etats-Unis. La première fois, c’était dans les années 70. L’inflation a grimpé tandis que l’économie ralentissait. Réalisant que des politiques monétaires plus souples ne feraient qu’aggraver l’inflation, le grand Paul Volcker intervint. Il durcit les critères des banques… fit grimper les taux de prêts à court terme à 20%… et mit fin à l’inflation.

* C’était dans les années 70. Aujourd’hui, on est dans les années 2000. A l’époque, les Etats-Unis avaient bien moins de dettes qu’à présent. Et désormais, ce n’est pas l’inflation que craint le gouvernement, mais la déflation. Ils ont observé l’exemple japonais ces 18 dernières années. La dernière chose qu’ils veulent, c’est de voir un ralentissement déflationniste à la japonaise. Les dettes, le déficit courant et l’économie de crédit à la consommation des USA ne pourraient pas le supporter. Les autorités font donc tout ce qu’elles peuvent pour l’éviter. En matière de stagflation, peu leur importe la partie "flation" — c’est le "stag" qui les inquiète.

* Et donc, pour conclure, vous pouvez probablement vous attendre à de nouveaux efforts de la part des autorités US pour affaiblir le dollar… ce ne manquera pas de faire grimper le pétrole, les matières premières, l’or… et les prix à la consommation. Ce n’est pas la stratégie qu’a suivie Volcker. Non, c’est la stratégie appliquée par, tenez-vous bien, les Japonais !

* Oui, cher lecteur, dans nos efforts incessants pour vous permettre d’anticiper les nouvelles, nous avons tué une poule… observé ses entrailles… et nous y avons vu une masse gluante. Ce que les autorités craignent le plus, c’est un ralentissement à la japonaise. Mais elles suivent la politique de la Banque du Japon et du Trésor japonais… et non la politique de la Fed de Volcker à la fin des années 70/début des années 80. Au lieu d’écraser l’inflation, elles la gonflent. Au lieu de provoquer la récession… elles essaient de la retarder. Au lieu de protéger le dollar, elles essaient de le détruire.

* Si elles sèment la même chose que les Japonais, que récolteront-elles ?

* Nous n’en savons rien, mais nous avons hâte de le découvrir…

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