La Chronique Agora

Stabilité instable

monnaie, dollar, euro

Un décret soutenu par une promesse soutenue par un mensonge soutenu par une fraude – portons un regard attentif sur les monnaies fiduciaires modernes.

Des cœurs brisés et un amour qui n’est pas vrai
Cela va de pair avec l’apprentissage du jeu
Quand tu l’aimes mais qu’elle ne t’aime pas
Tu ne fais qu’apprendre le jeu
~ Buddy Holly

Le concept du « stablecoin » consiste à « lier » ou à « adosser » une chose à une autre – comme un parent qui garantit le premier prêt automobile de son enfant. Hélas, comme nous l’avons vu hier, les promesses sont faites pour être brisées.

Pour mettre cela en perspective, nous sommes au début d’une déflation de la dette. La Fed est absente. Et c’est M. le Marché qui mène la danse. Il évalue et efface les dettes qui ne peuvent pas être payées – en particulier celles des entreprises zombies et des sociétés de cryptofinance. Il dévalorise également la valeur collatérale des actions, des obligations et bientôt, nous le prédisons, de l’immobilier également.

Bloomberg fait le point sur la situation du logement :

« Selon Mark Zandi, économiste en chef de Moody’s Analytics, la correction du marché immobilier s’étendra d’un bout à l’autre des Etats-Unis, mais elle n’ira pas jusqu’au krach.

La Réserve fédérale ayant introduit la plus forte augmentation des taux d’intérêt depuis des années pour lutter contre la hausse de l’inflation, les prix des logements vont probablement baisser sur les marchés immobiliers les plus ‘gonflés’, selon M. Zandi.

Les régions présentant des signes de spéculation importante, notamment dans le Sud-Est ou dans les montagnes de l’Ouest, peuvent s’attendre à un retour du pendule. Les villes et les États qui devraient subir une correction sont Phoenix et Tucson en Arizona, les Carolines, le nord-est de la Floride et, surtout, Boise, ‘le marché le plus surévalué du pays’, selon l’analyse de Moody’s. »

L’effondrement

A court terme, cette déflation se concentre sur les prix des actifs. Mais la chute des prix de l’immobilier va également se répercuter sur les prix à la consommation. Et pas dans le bon sens. À mesure que les prix baissent, de plus en plus de « crédits » passent en dessous de la valeur de leurs « débits ».

Une entreprise ne vaudra que, disons, 1 M$… mais aura 2 M$ de dettes.  Les ménages se retrouveront « sans le sou » et perdront leur maison. Les entreprises se retrouveront au chapitre 7 ou au chapitre 11 [NDLR : deux des chapitres de la loi des Etats-Unis traitant des faillites].

Mais les nations souveraines ont plus d’options ; elles peuvent rompre leurs promesses et s’en sortir.

Oui, nous ne faisons qu’« apprendre le jeu ». Et le jeu des monnaies est impitoyable.  La monnaie légale est un monopole gouvernemental. Et comme dans les combats de poids lourds… ou les rencontres en ligne… ce que vous voyez n’est pas toujours ce que vous pensez.

Il y a des liens de facto, des liens de marché, des liens légaux et des liens contractuels. Tous les membres de la zone euro, par exemple, ont regroupé leurs différentes monnaies nationales en une seule monnaie centrale – l’euro. Cela a donné un grand coup de pouce aux emprunteurs douteux du sud de l’Europe, qui ont pu vendre des obligations dans une monnaie soutenue par les épargnants allemands.

Ce lien est considéré comme solide… et stable. Mais que se passera-t-il si les Grecs ne peuvent pas payer leurs dettes ?

Dans le cas de l’Argentine, lier le peso au dollar n’était rien de plus qu’une promesse politique.  Lorsque les Argentins n’ont pas pu payer leurs dettes en pesos liés au dollar, ils ont supprimé ce lien.

Promesses brisées

De notre vivant, le lien monétaire le plus important a été rompu il y a 51 ans. Soixante et un secrétaires du Trésor américain, sur 180 ans, avaient croisé leurs cœurs, espéré mourir et promis solennellement de racheter le dollar américain pour de l’or. Puis, sans loi du Congrès, sans débat et sans préavis, le 15 août 1971, l’administration Nixon a tout simplement fermé la « fenêtre de l’or » au département du Trésor. Le dollar adossé à l’or était devenu gênant.

Même avant cela, il existait un précédent important pour changer les règles du jeu… et arnaquer le public. Les « continentaux » de la Révolution américaine… les « graybacks » des Etats confédérés… et la confiscation de l’or de Franklin Roosevelt en 1933 – à chaque fois, les promesses n’ont pas été tenues.

Maintenant, toutes les principales devises du monde sont liées. Elles utilisent toutes le dollar comme monnaie de réserve. Toutes suivent plus ou moins les mêmes politiques fiscales et monétaires… et toutes essaient de maintenir leurs monnaies relativement stables les unes par rapport aux autres afin d’éviter un désavantage commercial.

Mais tous les banquiers centraux sont maintenant terriblement « en retard ». Tous leurs pays doivent beaucoup trop d’argent. Ils sont comme un groupe d’alpinistes encordés ensemble… trop haut… trop froid… et faisant face à une tempête.

Si les Grecs dérapent, les Allemands peuvent leur venir en aide. Et si les Japonais dérapent, Tom Dyson, notre directeur des investissements, s’attend à ce que les Etats-Unis viennent à la rescousse. Le Japon est la nation la plus follement surendettée de toutes. S’il perd pied, il est probable qu’il entraîne toute l’équipe dans sa chute. Voici l’explication de Tom :

« Pour renflouer le gouvernement japonais, la Fed va imprimer des dollars pour acheter des obligations du gouvernement japonais. Essentiellement, le gouvernement américain va assumer la dette du gouvernement japonais. »

Oui, c’est « un pour tous et tous pour un ». Les gouvernements imprimeront de l’argent pour sauver les obligations des autres. Ensuite, les monnaies et les crédits… les dollars et les livres…. Allemands et Italiens… tous ficelés ensemble ; ils seront stables, jusqu’à ce qu’ils ne le soient plus.

Il y a des règles. Il y a des accords. Il y a des garanties, des promesses, des contrats et des traités. Mais à la fin de la journée, les liens… comme les cœurs… se brisent.

Mais qu’en est-il de l’or ? Il y a sûrement un lien sur lequel on peut compter, non ?

Soyez à l’écoute lundi.

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