« Il est là, l’effroi d’aujourd’hui… Se dire que dans notre société on ne pourra pas compter sur la collectivité », tels furent les mots d’un procureur à l’occasion d’une sordide affaire d’agression dans le métro*. Cette société nous n’en voulons pas !
La question de la sécurité est un sujet qui dérange les consciences. Régulièrement cible d’attentats, notre pays ne peut se targuer d’être un havre de paix. Selon un sondage de l’Ifop, quatre français sur cinq se sentiraient en insécurité… et pour cause.
Ce n’est pas un canular : le candidat Philippe Poutou déclarait lors de la période électorale que « la police au contact de la population n’a pas besoin d’être armée ! » ; « on veut désarmer les policiers car ils agressent dans les manifs, les jeunes et les quartiers populaires ».Ironie du sort, au moment de ces allégations, un policier se faisait assassiner par un terroriste. « Peut-être que si la police n’était pas armée, les mecs ils ne viseraient pas… », justifia-t-il. Un raisonnement qui laisse songeur.
Passons sur les inepties, fruits de l’imaginaire de notre trotskiste national – moins élaboré que le monde de Tistou les pouces verts, fils d’un marchand de canons prospère, de Maurice Druon – et retournons dans le monde dans lequel nous vivons.
La France est un terreau fertile à l’insécurité : chômage élevé, prisons bondées, immigration et assimilation en échec partiel, peines écourtées, voire inexécutées… les causes sont nombreuses.
En 2016, le ministère de l’intérieur fournissait les statistiques suivantes : en tête de liste, la Seine-Saint-Denis est tristement célèbre avec 18 faits de violence pour 1 000 habitants, Paris se trouve à la deuxième place avec un ratio proche de 16. Outre-mer, la Guyane bat tous les records : plus de 23 faits de violence enregistrés cette année-là, selon le même calcul.
« Mais que fait l’Etat ? Que fait la police ?! »
L’agent Longtarin, personnage de la B.D. Gaston Lagaffe – source : www.bdessin.fr
Avec environs 144 000 policiers, 98 000 gendarmes, 18 000 policiers municipaux et 11 000 adjoints de sécurité, la France compterait 271 000 employés des « forces de l’ordre », selon l’expression consacrée. La France est l’un des pays d’Europe dont le ratio forces de l’ordre par habitant est le plus important (environs deux pour 500 personnes).
La solution résiderait-elle donc dans l’augmentation des effectifs ?
Pour Pierre-Olivier Drai, se concentrer sur le binôme antinomique malfaiteur/policier est limité, car il retire la société de l’équation. Or, pour ce spécialiste des questions de sécurité personnelle, « la sécurité est l’affaire de tous ».
Au-delà du binôme malfaiteur/policier
Voici un extrait de son livre Self-sécurité :
« ‘La sécurité est l’affaire de tous’, entendons-nous régulièrement. Voilà une première indication importante ! Littéralement la sécurité est donc ‘à faire par tous’ puisque telle est l’étymologie du mot ‘affaire’.
Loin d’être un slogan creux, cette phrase est un rappel à l’obligation citoyenne dans la vie en société. Elle est l’une des conditions de la citoyenneté. A telle enseigne qu’en contrepoint de ce rappel le discours public ambiant a retenu le terme de ‘démission’ ; celle des instituteurs, des parents, des citoyens de façon générale.
Evidemment, parler de ‘démission’ suppose en premier lieu une ‘mission’, un ensemble d’actions préalablement confiées.
Dans la discussion qui nous intéresse, cette mission est exprimée par le contrat social dans sa formulation la plus emblématique de ‘monopole [par l’Etat] de la violence physique légitime’.
En dépit des apparences, cette phrase n’exclut en rien l’utilisation d’une ‘force légitime’ par d’autres acteurs (la population, le secteur privé) que l’Etat, sans quoi la légitime défense et les vigiles de supermarchés ne pourraient exister.
La phrase implique simplement que la ‘force légitime’ est autorisée, déléguée et définie par l’Etat qui la détient. Au coeur du contrat social se situe donc l’action de l’individu pour sa sécurité. Tout au long de cet ouvrage, nous verrons comment l’individu peut ‘remplir sa part du contrat social’.
Que se passe-t-il lorsque l’individu, ou la société au sens large, cesse d’assumer son rôle ? Là encore, l’éloquence des mots suffit à répondre. La ‘délinquance’, grande ou petite, qui s’invite à la première page des journaux et dont on discute tant en se demandant si les pouvoirs publics devraient durcir le bâton ou allonger la carotte est en fait la nôtre !
La ‘délinquance’ a pour apparenté étymologique ‘ce qu’on laisse couler’, ‘ce qu’on laisse faire’. Il s’agit moins de juger ce que font les autres que d’évaluer ce qui n’est pas fait. Renier sa part du contrat social, ne pas remplir sa propre obligation de sécurité, revient à laisser le champ libre à celles et ceux qui se mettent ‘hors la loi' ».
L’individu et la société face à l’insécurité
A son échelle, un individu peut se sentir impuissant face à un déferlement de violence, quelle qu’elle soit.
Bien entendu, cela ne fait pas tout, mais il dispose d’un arsenal juridique lui permettant ou lui imposant d’avoir un effet : légitime défense (article 122-5 et -6 du code pénal) ; droit d’appréhension (art. 73), obligation d’assistance et de secours (article 223-6), etc.
L’union fait la force et lorsque les initiatives se conjuguent dans un même but, c’est-à-dire celui d’une société plus sûre et responsable, les résultats sont positifs :
Guardian angels, mouvements d’autodéfense, milice, police communautaire au Mexique, red shirt en Inde pour assurer la protection des femmes, sapeurs-pompiers volontaires, les GREAT aux Etats-Unis qui luttent contre les gangs, « Voisins Vigilants », Pâquis à Genève… de multiples exemples de succès sont à découvrir dans le livre.
Par exemple, au Pays-Bas, le réseau citoyen Burgernet s’est formé en 2004. 8,5% de la population est inscrite dans le réseau. Ces femmes et ces hommes sont les oreilles et les yeux de la police. En plus d’assurer un lien indispensable entre cette dernière et la société, leurs renseignements permettraient de « résoudre 70% des affaires de disparition en une heure et demie en moyenne », détaille l’auteur de Self-sécurité.
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Certes, il est rageant de devoir pâtir de politiques de sécurité laxistes qui furent menées depuis des décennies, mais la vision de Pierre-Olivier Drai va au-delà du problème et tout au long de son livre, il aura à coeur de démontrer que la société civile a son rôle à jouer dans la sécurité d’un pays.
Le sénateur Jean-Vincent Placé, au Figaro, commentant sa décision de faire une pause dans sa vie politique après une agression :
« C’est à la fois très violent, très pénible, physiquement et psychologiquement. Ce type d’agression sauvage est malheureusement assez banal. »
Si même les politiques démissionnent, il est important de voir quel rôle vous avez à jouer au quotidien, dans notre sécurité. Commandez ici Self-sécurité.
* « Agression dans le métro de Lille : personne ne m’a aidée », Le Figaro, 25 avril 2014.