En attendant d’y voir un peu plus clair sur l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, un petit détour par le Maryland – pour restaurer une vieille grange… et oublier un peu les folies du monde actuel.
L’investiture de Joe Biden est prévue pour aujourd’hui. Nous allons attendre d’avoir un peu de recul pour vous en reparler.
Pour l’instant, sans aucune raison précise, nous allons vous dire à quoi nous consacrons nos week-ends ces derniers temps. Nous étions confiné en Argentine pour une bonne partie de l’année. Nous sommes désormais de retour sur la ferme familiale, dans le Maryland.
Projets « immobiliers »
Sur le terrain se trouve une vieille grange de bois, étayée par des poteaux télégraphiques.
Nous en avons fait une habitation de fortune, dans laquelle nous avons vécu pendant quelques années – avant de construire une vraie maison, avec toutes les commodités et ennuis modernes.
Nos meilleurs souvenirs restent toutefois la vie dans cette grange, avec ses échardes et ses planches mal ajustées, sa cuisine de fortune et ses couchettes intégrées.
Nous étions souvent réveillé par le bruit de la pluie tombant sur le toit de fer-blanc… ou le parfum du chèvrefeuille – ou mieux encore, du févier épineux – entrant par les fenêtres lors des nuits chaudes et humides.
Nous avons déménagé de la grange il y a 25 ans environ, mais elle est encore là. Les enfants (et les petits-enfants, désormais) l’adorent. C’est comme une cabane dans un arbre, ou oubliée dans les bois. Nous sommes dont en train de la retaper pour leurs visites.
Souris et ratons-laveurs
C’est le coronavirus qui a rappelé cette habitation à notre bon souvenir.
En mars dernier, d’un seul coup, tout le monde voulait quitter la ville. L’un de nos enfants a réagi au quart de tour et réquisitionné la ferme pour sa petite famille. Les autres étaient coincés dans leurs appartements à Baltimore.
« Si seulement la grange était encore vivable », nous sommes-nous dit.
Notre projet, pour cet hiver, est de la rendre à nouveau confortable.
Mais l’endroit est négligé depuis longtemps. Les canalisations ont gelé et éclaté il y a des années. Il y a des fuites dans le toit de tôle ondulée. Les souris et les ratons-laveurs se sont installés dans l’isolation. Le fourneau a disparu.
Toutes ces choses sont faciles à réparer… plus ou moins. Durant les week-ends, nous sortons nos outils et nous nous mettons au travail.
Quel plaisir… de nettoyer les choses… de réparer ce qui est cassé… de récupérer ce que nous pensions perdu… et l’améliorer.
Bons souvenirs
Restaurer une vieille maison ou un jardin est bien plus intéressant que d’en faire un nouveau – surtout si c’est vous qui l’aviez construit à l’origine. Cela permet de remonter le temps.
On peut corriger les erreurs… On peut retrouver ce qui était bon, amusant et mémorable… et refaire ce qui ne l’était pas.
On en sait tellement plus qu’à l’époque ! Et désormais, en dehors du temps et de l’énergie, on a beaucoup plus pour travailler.
Restaurer la grange, c’est comme reprendre les morceaux de notre vie… et les réassembler – tels qu’ils étaient il y a un quart de siècle… en mieux.
Chaque réparation vient avec ses propres souvenirs.
Nous nous rappelons quand l’un des garçons est tombé dans les escaliers… quand le vent froid soufflait par les fissures et que nous nous rassemblions autour du poêle pour nous réchauffer… quand nous nous asseyions sur la véranda pour manger des huîtres toutes fraîches, en laissant joyeusement tomber les coquilles dans les buissons juste au-dessous.
Ils sont toujours là… rappelant une autre ère… une autre période de notre vie… un autre monde, avant le 11 septembre… avant Zoom… avant le coronavirus.
Mais il n’y a pas beaucoup de temps pour les souvenirs quand on travaille avec des outils électriques. C’est probablement ce qui rend tout cela aussi relaxant. Il faut faire attention. Il faut se sortir de la tête les derniers chiffres du chômage… les théories idiotes sur la relance… la censure… les confinements… les émeutes… les absurdités…
Il faut l’espace pour déterminer comment obtenir le bon angle sur un joint… ou comment éviter de scier son propre doigt.
Plus facile à dire qu’à faire !
Notre tâche du week-end était de recycler d’anciennes planches de chêne, provenant d’une palissade, pour les murs intérieurs.
Nous aurions volontiers demandé à l’un de nos amis charpentiers de raboter tout cela, mais il a pris sa retraite. Un autre artisan local a refusé la tâche, s’inquiétant des clous dans les vieilles planches.
Nous avons donc fini par acheter une petite dégauchisseuse Makita et nous sommes mis au travail nous-même.
Plus facile à dire qu’à faire ! Les vieilles planches sont tordues, déformées et irrégulières, de sorte que l’appareil avait du mal.
Nous avons remonté la fermeture éclair de notre veste. On aurait dit qu’un nuage froid et sombre s’était installé sur l’atelier. Peut-être que le passé avait disparu pour toujours… Peut-être que les dommages du temps, du vent et de la météo étaient trop importants. Peut-être que les planches ne pouvaient pas être réutilisées. Peut-être qu’il faudrait les réduire en petit bois pour le chauffage.
Et peut-être que la vie d’il y a un quart de siècle ne peut pas être redressée… peut-être qu’on ne pourra plus jamais en profiter.
Nous avons dû repasser plusieurs fois les planches, en abaissant à chaque fois la lame. Elles se sont battues. Elles ont résisté. La machine gémissait, comme pour dire « ne me faites pas travailler aussi dur ».
Enfin, le bois est redevenu suffisamment droit et lisse – du moins pour ce que nous voulions en faire.
Une fois les planches mises en forme, il a fallu les travailler à la « toupie », pour y faire des rainures : nous allons les mettre sur un mur, de sorte qu’il faut que chaque planche empiète légèrement sur la suivante.
Là encore, ce fut plus difficile que cela aurait dû l’être. La toupie tressautait autour du bois dur. Les joints conviendront pour une maison rustique, mais ce n’est pas le genre de travail qu’on peut admirer dans une démonstration sur YouTube.
En tout cas, le bois est paré. Nous sommes prêt à l’installer…
A suivre…