La Chronique Agora

Remontée des taux longs = sortie de crise ? (2)

Barack Obama a récemment annoncé un compromis fiscal qui vise à prolonger les baisses d’impôts mises en place par l’administration Bush, disions-nous hier. Qu’est-ce que cette décision implique pour les marchés ?

La finalité de cette "extension fiscale" est évidemment de soutenir la croissance. D’ailleurs, le célèbre fonds obligataire PIMCO a rapidement revu à la hausse ses prévisions de croissance pour l’économie américaine la semaine dernière. Ainsi, pour le quatrième trimestre, PIMCO table désormais sur une croissance de l’économie américaine comprise entre 3 et 3,5% (par rapport au quatrième trimestre 2009), soit un point de plus que sa précédente fourchette estimative (2/2,5%).

En termes d’implications de marché, si l’argent sorti des contrats se reporte dans un premier temps, et d’ailleurs comme à chaque "sortie de crise" sur les indices actions, c’est à plus long terme avec des craintes inflationnistes que le bât blesse.

 


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Comme vous le constatez avec la comparaison faite sur les deux graphiques ci-dessus : les taux longs baissent au début de chaque crise (janvier 2000/juillet 2007). Les investisseurs se reportent sur l’obligataire pour son côté sécuritaire, ce qui pousse mécaniquement à la baisse les rendements — les taux évoluant en sens inverse des prix.

A titre d’exemple du rôle de "valeur refuge", en pleine panique après la faillite de Lehman Brothers, le rendement des T-Notes était tombé à 2,03% en décembre 2008. A l’inverse, les taux longs remontent en sortie de crise — comme par exemple en juin 2003 ou encore en février 2009.

▪ Quelles conséquences pour les Bunds allemands ?
Alors que certains courtiers s’attendent à une poursuite de l’envolée des rendements — le plus agressif étant Jefferies qui voit le rendement du T-Note à 10 ans atteindre les 5% l’année prochaine –, je pense personnellement que les tensions en Europe sur les dettes souveraines pourraient venir freiner ce mouvement, notamment vis-à-vis des Bunds allemands.

Car, et c’est à mon sens un autre risque pour 2011. Si les taux longs allemands, qui présentent une corrélation historique forte avec les T-Notes US, venaient à progresser trop fortement, il y a fort à parier que la situation sur les pays périphériques d’Europe devienne insoutenable.

Dit autrement : si la rémunération de la signature allemande — la plus sûre d’Europe — venait à dépasser les 4% par exemple, il y a fort à parier que les rendements demandés pour détenir de la dette espagnole ou italienne ne soient plus uniquement de 5% comme c’est le cas en ce moment.

En résumé, si une hausse des taux longs indique historiquement que l’économie réelle va mieux, on est malgré tout en droit de s’interroger sur l’impact que ces pressions inflationnistes pourraient avoir à terme…

[Mathieu Lebrun est analyste financier. Il a commencé sa carrière chez Fortis Banque avant d’intégrer la table de négociations sur devises au sein de la salle des marchés du groupe Natexis Banques Populaires. Il est responsable du service de trading Agora CFDdécouvrez ses conseils dès maintenant…]

Première parution dans Le Billet du Trader le 15/12/2010

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