La Chronique Agora

Qu'est-ce qui ne fait pas encore les gros titres ?

** Un lecteur australien nous écrit :

– "Cela fait longtemps que vous parlez de votre ‘Transaction de la décennie’, qui consiste à acheter de l’or. Faut-il que nous en entendions encore parler jusqu’à la fin de la décennie en question ? Je lis votre chronique parce que je vous trouve irrévérencieux et contrariens. Mais maintenant que l’or est largement vanté un peu partout, ne serait-il pas temps d’aller voir ce qui se passe ailleurs ?"

– Oui, c’est vrai. Vous n’avez pas tort. Nous y avons beaucoup réfléchi dernièrement — et voici notre réponse.

– Quand la Chronique Agora a débuté, il y a quelques années, nous étions très en avance concernant les doutes sur le boom des dot.com. Plus tard, nous étions haussiers sur l’or alors qu’il dépérissait sous la barre des 300 $. Puis nous avons remarqué et annoncé (plus de deux ans avant tout le monde) l’énorme bulle qui se formait sur le marché des prêts hypothécaires aux Etats-Unis. Le peak oil, le marché baissier du dollar US… Toutes ces positions qui étaient encore un peu folles il y a trois ans font maintenant les gros titres.

– La question, c’est : qu’est-ce qui ne fait pas encore les gros titres et dont vous devriez être au courant ? Et bien, plein de choses. Le problème, c’est que ce ne sont pas des choses que vous pouvez immédiatement prendre, vendre ou dans lesquelles vous pouvez investir tout de suite. Mais puisque vous avez posé la question…

– Nous pensons que les principaux réseaux et systèmes qui ont soutenu la croissance économique et l’intégration politique ces 200 dernières années subissent actuellement une pression énorme. Certains d’entre eux n’y survivront pas — notamment les réseaux physiques mondiaux qui distribuent l’énergie et les marchandises. Et bien évidemment, cela comprend également le système financier mondial.

– L’effondrement de ces systèmes va entraîner une contraction de la croissance économique du commerce, ainsi qu’une désintégration politique progressive dans des régions où seule une monnaie faible parvenait à maintenir le lien entre les populations sur le plan économique.

– Il y aura un interlude dans la grande progression de la mondialisation, caractérisé par la rupture de connexions dans le commerce et les affaires. Ces réseaux complexes construits au cours des 100 dernières années sont aujourd’hui surchargés et s’effondrent, quand ils ne sont pas volontairement piratés (réseaux électriques, câbles internet et bien d’autres).

** Mais attention, nous ne sommes pas en train d’espérer un retour au Moyen Age ! Les systèmes qui vont remplacer ceux que nous avons en ce moment possèderont des propriétés essentielles : solidité, durabilité, adaptabilité — pour ne citer qu’elles. Le monde deviendra également un réseau plus souple d’ensembles économiques plus petits. Le modèle d’état-nation en lui-même sera victime de l’augmentation du prix du crédit et de l’énergie.

– Les grands gouvernements centraux du monde entier ont fait à leur peuple des promesses qu’ils ne pourront pas tenir dans les années à venir. L’état-nation centralisé sera incapable de fournir les services de base que ses citoyens attendent de lui (sécurité physique, sécurité des retraites, réseaux routiers ou électriques, alimentation en eau). Il sera concurrencé par des groupes plus petits (gangs, trafiquants de drogue, tribus, maîtres de guerre) qui exercent un véritable contrôle physique sur des quartiers dans lesquels les représentants de l’Etat (la police et l’armée) n’osent plus s’aventurer.

– Les grandes institutions, comme les dinosaures, vont laisser place à des institutions plus petites, plus agiles, plus adaptables. Le modèle de ville-état (Singapour, Hong Kong) par exemple, va devenir plus important. La sécurité va être privatisée. Le contrôle d’identité et le voyage sous permission vont se banaliser.

– Ce ne sera pas facile pour les institutions de s’adapter. Les villes-état y parviendront plus facilement. Mais elles auront aussi des difficultés. Les villes-état pauvres en ressources doivent trouver la nourriture, le carburant et l’eau ailleurs.

– Actuellement, la plupart des recherches et du développement public-privé de Singapour se concentrent sur ces problèmes. Pour les investisseurs, c’est vers là qu’il faut se tourner : les entreprises qui proposent des plateformes pour remplacer les systèmes que nous voyons aujourd’hui s’effondrer autour de nous.

– Voyez-vous, les journaux relatent en ce moment la destruction des anciens systèmes. Nous vivons une de ces ères de l’histoire au cours de laquelle l’ordre ancien s’effondre pour être progressivement remplacé. Le mauvais côté, c’est que cela s’accompagne de nombreuses incertitudes et instabilités.

– Le bon côté, en revanche, c’est que cela apporte quantité d’opportunités. Du point de vue de l’investissement, la préservation des richesses est essentielle : conserver et protéger ce que vous avez. C’est pourquoi nous pensons que, même après sept ans, la "Transaction de la Décennie" a encore de beaux jours devant elle.

** Mais qu’en est-il de la création de richesses ?

– Eh bien, cela demande une réflexion plus directe. Il ne reste plus vraiment de fruits sur les branches basses des marchés boursiers. Ils ont tous été cueillis.

– Si vous voulez engranger de gros retours sur investissement, vous devez voir plus loin dans le temps et imaginer le monde dans lequel nous vivrons dans dix ou vingt ans. Ce procédé, comme tous les types de prévisions, est dangereux. Mais nous pensons que c’est dans cette direction qu’il faut vous tourner si vous voulez traverser cette crise avec suffisamment de capitaux pour pouvoir encore faire des choix intéressants.

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