La Chronique Agora

Quel espoir pour les économistes ?

▪ « On dirait que Etats-Unis ont pris le pire », nous a dit un ami français la semaine dernière. Nous avons été pris de court. Tout le monde sait que l’Europe est dans un état de crise permanente. Les Etats-Unis semblent solides en comparaison, non ?

« Maintenant que la Cour suprême a approuvé le programme Obamacare, vous avez les mêmes problèmes qu’en Europe : des dépenses sociales sans limites… et en plus, vous avez des dépenses militaires colossales. Vous avez ‘du pain et des jeux’, comme dans la Rome antique. Vous êtes condamnés ».

Oui, cher lecteur, les Etats-Unis sont arrivés à la croisée des chemins après les attentats du 11 septembre. Et le gouvernement s’est trompé de route !

Tandis que l’Etat-Providence étend sa sphère avec le programme de santé, il en va de même pour la défense. Une autre mesure est débattue au Congrès US : déclarer les Etats-Unis eux-mêmes champ de bataille ou zone de combat. Cela permettrait à l’armée de faire ce qu’elle fait sans aller à l’étranger… et donnerait au président le pouvoir de cibler directement ses ennemis sur son sol.

Les drones pourront alors voler au-dessus du Kansas ou de l’Ohio… et abattre quiconque est désigné par les autorités.

Mais à qui vont-elles s’en prendre ? Personne… ou presque personne… ne s’oppose au programme militaire aux Etats-Unis. Il n’y a pas de terroristes sérieux… et pas de graves obstacles pour la machine à dépenser. Les deux candidats à la présidentielle sont d’accord sur l’essentiel : continuer à faire couler l’argent vers les industries zombies — de l’armée à la finance en passant par la santé et l’éducation.

Attendez… les Etats-Unis n’ont pas non plus d’ennemis sérieux à l’étranger. Cela ne rend pas le racket moins efficace pour autant. Au contraire, ça aide. Sans ennemis sérieux pour l’inquiéter, le secteur militaire peut dépenser son argent exactement comme il l’entend. Des quantités d’escroqueries. Des marges généreuses. Peu de victimes. Que demander de plus ?

Mais où en étions-nous ?

▪ Revenons-en au PIB
Nous parlions d’économistes. Plus spécifiquement, nous avons terminé la semaine dernière en affirmant que les chiffres du PIB n’ont quasiment aucune valeur. Ils disent quelque chose ; mais disent-ils quelque chose d’important ? Apparemment pas.

Vous venez tondre notre gazon. Nous vous payons. Nous venons tondre votre gazon. Vous nous payez. Nous avons tous les deux un emploi. Et nous versons chacun une portion de nos revenus au gouvernement. Le PIB grimpe. Les revenus gouvernementaux augmentent. Et les économistes nous disent qu’il y a de la « croissance ».

La semaine dernière, Paul Krugman citait l’expérience de l’économie américaine au début des années 40. Une poussée de dépenses fédérales entre 1940 et 1942 a produit une forte hausse de 20% de la production, dit-il avec approbation. Plus d’emplois… plus de PIB… selon les mesures des économistes, les choses allaient de mieux en mieux.

Vraiment ? Absolument pas, bien entendu. Le gouvernement dépensait son argent pour la défense. Un économiste ne sait pas faire la différence entre un char d’assaut et une BMW. Un passager si. Il ne lui faut guère de temps pour se rendre compte qu’un tank n’est pas un moyen de transport très efficace.

Il y a des époques où il faut construire des chars. Mais ce ne sont pas des temps où l’on construit de la richesse et de la prospérité. Au lieu de ça, on dépense pour se protéger (théoriquement — en pratique, la plupart des guerres sont des rackets… pour les deux côtés). C’est ce que faisaient les Etats-Unis au début des années 40 — ils dépensaient de la richesse, ils n’en construisaient pas.

Ce qui est une parfaite illustration de ce que nous pensons :

Si même des prix Nobel d’économie ne peuvent faire la différence entre construire de la richesse et la dépenser, quel espoir reste-t-il  à la profession dans son ensemble ?

A suivre…

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