La Chronique Agora

Propriétaires fonciers, tremblez !

Vous êtes en plein dans le collimateur de Bercy…

Alors que l’économie russe est en train de s’effondrer (ce qui valut à Vladimir Poutine une réélection, où il n’a obtenu que 87% des suffrages – 13% des électeurs ont bien compris que rien ne va plus dans ce pays), Bruno Le Maire publie un nouveau bouquin en forme de cri d’alarme face aux vents contraires qui soufflent de toutes parts.

Il s’intitule La Voie française… Ah oui, dans cet ouvrage, il n’est pas question de l’état alarmant de la Russie (qui renoue avec des scores électoraux « soviétiques », notre phrase d’introduction est évidemment à prendre au second degré).

Notre ministre/écrivain déclare vouloir alerter les 27 Etats membres de l’Union européenne qui, sans lui, n’auraient rien vu venir. Et de s’interroger : « Qui sont nos concurrents ? »

Une Chine de plus en plus interventionniste, qui construit chaque année deux centrales nucléaires, ouvre quarante fabriques de semi-conducteurs, réalise des milliers de kilomètres de voies ferrées à grande vitesse, assemble plus de 30 millions de véhicules électriques – le tout avec des commandes publiques massives et des soutiens financiers considérables ?

Des Etats-Unis de plus en plus protectionnistes, qui offrent à tout industriel qui s’installe sur son sol des crédits d’impôt massifs financés par l’Inflation Reduction Act, et des prix de l’énergie cassés ?

Et il nous délivre, en une phrase, cette conclusion d’une éclatante lucidité, qui fige d’admiration tous les économistes, les journalistes et les rédacteurs des Publications Agora… et que je vous livre sans plus attendre : « Economiquement, Chine et Etats-Unis frappent vite et frappent fort. Ils ont compris les défis du temps. Et l’Europe ? »

Eh oui, Bruno résume tout en quelques mots simples et percutants !

Et dire que nous nous égarons depuis deux ans dans des théories complotistes et considérations oiseuses comme… Qui a eu l’idée d’infliger à la Russie des sanctions boomerang qui dévastent notre industrie ? Qui a pu faire semblant d’ignorer que les Etats-Unis en tireraient tous les bénéfices ? Qui a fait sauter Nord Stream (permettant aux USA d’exporter massivement leur GNL vers l’Allemagne) ? Comment se fait-il que, malgré cet acte de guerre (ce n’est pas un simple sabotage du point de vue du droit international) contre l’Europe, nos chancelleries restent muettes ? Comment se fait-il que, malgré les sanctions de l’OTAN, le gaz russe continue de transiter par l’Ukraine (gazoducs ni détruits ni sabotés) en direction de la Slovaquie, de la Roumanie, de la Bulgarie ?

Et Bruno pointe avec raison l’interventionnisme de Pékin, les commandes publiques massives – un modèle dirigiste qui n’a heureusement pas le droit de citer en Europe. Il aurait été intéressant qu’il chiffre le coût de ces investissements.

En France par exemple, l’Etat s’est endetté de +900 Mds€ depuis mai 2017, dont +650 Mds€ depuis mars 2020 et la crise du COVID.

Pour presque +1 000 Mds€ d’ici les élections européennes de début juin, combien de nouveaux réacteurs nucléaires en France, combien de milliers de kilomètres de lignes de TGV, combien de barrages hydroélectriques, combien de nouvelles usines de production de semi-conducteurs, combien de nouveaux navires marchands ont été construits ?

Mais quel incompétent a bien pu occuper le poste de ministre de l’Economie durant ces sept dernières années, pendant lesquels la France s’est désindustrialisée, tandis qu’elle voyait son endettement exploser et ses services publics s’effondrer ? (Le bilan des morts pour cause de non-prise en charge aux urgences est le pire de la Ve République ; il faut six mois pour obtenir un passeport, alors que c’est le demandeur qui fait tout le travail en amont par Internet, l’Etat met parfois 18 mois pour régler ses fournisseurs, etc.)

Mais qui donc a légué un bilan aussi calamiteux à notre ministre-écrivain ?

A moins qu’il ne se soit aperçu de rien tandis qu’il écrivait ?

En tout cas, vu les dettes laissées par un certain Le Maire, notre Bruno vient de diagnostiquer que nos malheurs proviennent d’un problème de « gratuité » et de système de prise en charge du chômage trop onéreux.

Est-ce que quelqu’un lui a expliqué que la plupart des caisses d’assurance-chômage privées sont excédentaires, et que ce sont celles gérées par l’Etat, pour son propre compte, qui sont dans le rouge ?

Il semble en tout cas bien résolu à mettre fin à « la gratuité de tout, pour tous ».

Mais dans tout ce qui est « gratuit », qu’est-ce que le contribuable ne finance pas déjà (insuffisamment, certes) ?

Préparez-vous chers lecteurs à sortir le carnet de chèque dès 2024, ou à faire une croix sur une partie de prestations sociales pour lesquelles vous avez été ponctionné sans relâche, à des taux toujours plus élevés… et propriétaires fonciers, tremblez : vous êtes en plein dans le collimateur de Bercy !

Pour en revenir au nouvel opus de notre ministre, ce qui concerne « une voie française », celle poursuivie depuis 2017 n’est-elle pas celle du déclin ?

Et quel est le nom de l’aiguilleur depuis sept ans ?

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