La Chronique Agora

Processus de nettoyage

capital-risque, faillite, dette

Le capital-risque est en voie d’extinction, tandis que 10 000 Mds$ de dettes sont apparues, pour conclure 60 ans de déception…

Le cynisme ne se développe pas du jour au lendemain. Il faut des affaires qui tournent mal, des promesses politiques non tenues, des innovations et des inventions qui n’ont pas fonctionné, des politiques publiques illogiques au départ, et désastreuses à l’arrivée.

Aujourd’hui, où serions-nous sans le cynisme ? Cinq ans de prison pour s’être rendu au Capitole sans autorisation… Rejoindre l’armée ukrainienne pour « protéger notre démocratie »…  Acheter Nvidia et croire que la Fed sait vraiment ce qu’elle fait…

Il est difficile d’écrire ces mots sans nous esclaffer. Il y a seulement deux ans, la Fed prévoyait une inflation de 0,1% pour 2023 ; aujourd’hui, elle annonce qu’elle est de 5,6%. Elle ne s’est trompée que de 5 500% !

Plus forts, plus riches, plus libres ?

La semaine dernière, la dette publique américaine a dépassé les 32 000 Mds$. Et elle augmente rapidement : ce sont 10 000 Mds$ de plus au cours des quatre dernières années… et 2 100 Mds$ de plus par an.

Qu’en pensez-vous ? Un seul centime de cette dette a-t-il rendu les Etats-Unis plus forts, plus riches, plus libres ? Et à quel point faut-il être jeune pour y croire ?

L’augmentation de la dette s’accompagne d’une hausse des taux d’intérêt. D’une année sur l’autre, les paiements d’intérêts du gouvernement fédéral ont augmenté de près de 50%. L’année prochaine, il faudra plus d’argent de la part des contribuables pour soutenir la dette que pour soutenir le Pentagone.

Le secteur privé paie également des taux d’intérêt plus élevés. Les entreprises qui ont contracté des milliards de dettes à un taux d’intérêt de 3% doivent maintenant se refinancer à un taux de 7%. Et elles ne peuvent pas imprimer d’argent.

Wolf Richter rapporte :

« […] les entreprises qui n’ont pu survivre que grâce à l’argent gratuit se retrouvent aujourd’hui au pied du mur.

Les dépôts de bilan vont réduire le surendettement des entreprises. De nombreuses entreprises sortiront de la faillite avec moins de dettes, et elles seront plus agiles et plus aptes à prospérer. D’autres seront vendues par fragments, laissant la place à des entreprises bien gérées et non encombrées par ces problèmes.

Cette partie du cycle du crédit comporte un aspect purificateur qu’il faut laisser faire pour se débarrasser des excès et du bois mort au détriment des investisseurs. Ce processus de nettoyage, qui vient de commencer, aurait dû avoir lieu il y a longtemps. »

L’extinction de masse des sociétés de capital-risque

Et voici Garrett Baldwin de la lettre « Postcards from the Florida Republic » : le capital-risque a implosé au cours des 18 derniers mois.

« La semaine dernière, le Wall Street Journal a publié une analyse affligeante. Il a constaté que de nombreuses start-ups sont désormais incapables d’obtenir le financement dont elles ont besoin. Dire que le capital-risque a ‘souffert’ est un euphémisme. Tom Loverro, associé général de la société de capital-risque IVP, a déclaré que ‘l’extinction de masse des entreprises en phase de démarrage est en cours’.

Les pertes subies par le capital-risque au cours des deux derniers trimestres sont essentielles pour comprendre pourquoi les sept premiers titres du Nasdaq sont florissants. Les données de Pitchbook montrent que le ‘taux de rendement interne’ annuel pour le troisième trimestre 2022 a atteint les -7%. C’est le pire rendement annualisé depuis 2009. De plus en plus de start-ups ferment boutique. D’autres n’arrivent même pas à se lancer, car les transactions se tarissent. »

Ce « processus de nettoyage » est un élément essentiel du système de libre entreprise gagnant-gagnant. Le bois mort doit être éliminé pour qu’une nouvelle croissance puisse se produire.

Mais devinez quoi ? Le complexe militaro-industriel et l’élite américaine sont replis de bois mort. Et ils ne vont nulle part.

La plupart des gens progressent en échangeant pacifiquement des biens et des services. « Donnez et vous recevrez. » C’est peut-être écrit quelque part dans la Bible. Si ce n’est pas le cas, cela devrait l’être. C’est ainsi que fonctionne le « doux commerce ».

Mais ce n’est pas ainsi que fonctionnent le complexe militaro-industriel et les élites. Ils ne donnent pas, ils obtiennent.

Oui, les marchés et l’histoire présentent des schémas narratifs. Les tendances suivent leur propre chemin. L’inflation, par exemple. Une fois qu’elle est lancée, il est difficile de l’arrêter. L’augmentation des prix entraîne l’augmentation d’autres prix… plus les coûts augmentent, plus il faut d’argent. Les consommateurs ont besoin d’argent pour payer leurs factures. Les entreprises ont besoin de plus d’argent pour payer leurs employés. Les autorités ont besoin de plus d’argent pour faire tourner la machine et faire circuler l’argent. Pris dans le piège de l’inflation ou la mort, le moyen le plus simple d’avancer est d’ajouter de l’argent dans le système !

La dépendance à la drogue ou à l’alcool suit également un schéma. Au début, c’est amusant… il devient difficile de résister… puis cela ruine votre vie. Si vous avez de la chance, vous touchez le fond et vous rebondissez. Sinon, vous continuez à dégringoler.

Les Kennedy pensaient pouvoir changer le cours de l’histoire. Ils voulaient orienter le gouvernement vers la paix. Mais la violence est le fonds de commerce d’un empire ; la paix le mettrait hors d’état de nuire. C’est comme si l’on attendait d’un loup qu’il renonce à ses côtelettes d’agneau pour le Carême.

C’est une bonne chose de croire quand on est jeune. Mais à notre âge, si l’on croit encore que « le peuple » dirige le gouvernement… ou que chaque baisse des actions représente une opportunité d’achat… ou que le communisme ou le nationalisme, ou toute autre chose finissant par « isme » nous rendra meilleurs…

…et bien, vous êtes tout simplement un imbécile.

Valeurs américaines, RIP

C’est pourquoi les sociétés sensées ont des « conseils des aînés », constitués d’hommes et de femmes qui ont fait le tour de la question plusieurs fois dans le passé, et non des conseils de jeunes adolescents.

Mais nous aussi, nous avons été jeunes un jour. Et, ces derniers jours, nous étions presque jeunes à nouveau. Nous nous sommes remémorés les années 1960… et avons presque oublié le cynisme que nous avons mis plus de 50 ans à accumuler. En repensant à ces années après un demi-siècle, en lisant les mémoires de Robert Kennedy, American Values, nous avons imaginé avoir entendu les Rolling Stones… nous nous sommes remémorés une traversée des Etats-Unis en faisant du stop, d’un océan à l’autre, sur la route 66….nous voulions porter nos vieux pantalons à pattes d’eph… et laisser nos cheveux (disparus depuis les années 1990) pousser à nouveau.

Nous nous sommes également intéressés de nouveau à la politique, en encourageant les Kennedy et en aspirant à une nouvelle ère…

…et puis, lorsqu’ils ont été tués dans le livre – Jack puis Bobby Kennedy –, nous avons été attristés, encore une fois…comme si nous les avions connus personnellement…

…et notre cynisme est revenu.

Ce n’était pas du tout une nouvelle ère. Mais plutôt une très vieille époque…

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