La Chronique Agora

Platine et palladium : l'eldorado des PGM (1)

Par Sylvain Mathon (*)

La course au mode de vie "à l’occidentale"
Comme vous le savez déjà, investir, pour moi, c’est comprendre où va le monde — et tâcher d’y aller avec lui, en mettant son argent dans le bon sens. De gré ou de force, à mesure que les impacts environnementaux se feront plus spectaculaires, la conscience écologique va s’imposer toujours davantage aux décideurs de la planète. Des mesures devront être prises : l’espérance de vie d’un agent de la circulation chinois est tombée au-dessous des 50 ans… 

En même temps, les pays émergents n’ont aucune envie de ralentir leur course au mode de vie "à l’occidentale". Ces peuples ont été trop privés, trop longtemps, pour pouvoir entendre les arguments de l’écologie globale, aussi raisonnables soient-ils. Ils viennent à peine d’entrer dans le supermarché planétaire : ils ont bien l’intention d’en profiter. Entre ces deux tendances diamétralement opposées, des compromis vont se dessiner.

Où cela nous mène-t-il ? Aux PGM. Pour mieux vous présenter cette opportunité, permettez-moi un petit retour en arrière…

Le trésor oublié des conquistadores…
La scène se passe au 16ème siècle, dans les jungles équatoriennes. A la recherche de l’Eldorado, les conquistadores espagnols continuent de rançonner et de massacrer les villages indigènes. Parmi le butin qu’ils collectent, il y a des bijoux faits d’un métal étrange, inconnu dans l’Ancien Monde. De couleur gris-blanc, on le trouve parfois dans les rivières de la région, d’où les indigènes l’ont d’ailleurs retiré. Cela ressemble à de l’argent, mais ce n’en est pas vraiment. Les pillards sont déçus : il est impossible à fondre "par aucun des arts espagnols".

Ce métal ductile et incorruptible se prête aux falsifications : aussi les Espagnols, soucieux de préserver la valeur de leurs exportations (le bon argent des mines de Potosi, par exemple), vont-ils le rejeter par tonnes entières dans les fleuves du pays. Ils iront même jusqu’à en interdire par décret l’extraction !

Les chimistes des Lumières vont redécouvrir le platine mal-aimé
Il fallait un nom à ce métal trompeur ; selon les théories métalliques de l’époque, il avait toutes les caractéristiques d’un "argent naissant", pas encore mûr — on croyait alors que les métaux mûrissaient dans la mine. C’est pourquoi notre inconnu reçut le nom de "petit-argent" — ou plutôt, en espagnol, platina.

Il faudra encore deux siècles avant que les chimistes des Lumières ne commencent à explorer les extraordinaires propriétés du platine — et ne s’avisent que les conquistadores sont passés à côté d’un véritable trésor. Songez que dans une mine, pour obtenir une once de platine, il faut extraire environ 10 tonnes de minerai… Soit deux fois plus que pour une once d’or pur !

Les joailliers vont s’emparer de cette découverte et en faire la monture de choix pour le diamant, dont l’essor populaire commence vers le 19ème siècle. Parallèlement, la science découvre ses propriétés magnétiques, électriques et surtout catalytiques qui vont conduire ce métal à jouer un rôle toujours plus grand dans l’innovation industrielle.

Bienvenue dans le monde des PGM (Platinum Group Minerals)
Sous ce terme, on regroupe six éléments métalliques voisins dans la classification de Mendeleiev, présents dans les mêmes minerais (en général, on les extrait comme sous-produits de l’exploitation du nickel) et aux propriétés très semblables, à commencer par leurs propriétés catalytiques. Il s’agit du ruthenium, du rhodium, du palladium, de l’osmium, de l’iridium et du platine. Mais ce sont surtout le palladium et le platine qui vont nous occuper ici.

A quoi servent-ils ?  On les utilise en bijouterie ; dans la fabrication de couronnes dentaires ; en chimie, pour synthétiser des explosifs ou des engrais ; dans l’électronique de pointe… Mais avant tout (plus des deux tiers de la production mondiale annuelle !) dans la fabrication de pots d’échappement catalytiques.

La suite dès demain…

Meilleures salutations,

Sylvain Mathon
Pour la Chronique Agora

Globe-trotter invétéré et analyste averti, Sylvain Mathon, est un peu "notre" Jim Rogers… Après avoir travaillé durant dix ans au service de grandes salles de marché, il met depuis février 2007 toute son expertise en matière de finances et de matières premières au service des investisseurs individuels dans le cadre de Matières à Profits, une lettre consacrée exclusivement aux ressources naturelles… et à tous les moyens d’en profiter. Il intervient régulièrement dans l’Edito Matières Premières

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