La Chronique Agora

Petits bouchons

** Depuis les hauts plateaux argentins, nous vérifions ce qui se passe aux Etats-Unis.

* Vérifier, ce n’est pas aussi simple que lire les gros titres. Le problème, c’est que tout flotte. C’est un peu comme si on essayait de donner la localisation précise d’un bouchon de liège flottant dans l’Atlantique Nord. Il est ballotté par le vent. Il est emporté par le courant. Avant d’avoir eu le temps de dire ouf, il sera à Cape Town.

* Et lorsque le Dow a atteint un nouveau sommet record lundi… nous avons donc dû poser la question : par rapport à quoi ?

* En termes de dollars, le Dow n’a jamais été plus élevé. Sur les marchés, les joueurs se sentent plutôt bien. Les grandes sociétés boursières affirment à leurs clients que les beaux jours sont encore à venir. Même Alan Greenspan trouve que le credit crunch s’éloigne.

* Maintenant que la Fed distribue de l’argent… on peut de nouveau prendre du bon temps ! Non seulement le Dow grimpe, mais les matières premières baissent ! Le pétrole est toujours au-dessus des 80 $… mais moins haut qu’il y a quelques jours de ça. L’euro est toujours au-dessus d’1,4 $, mais plus bas que la semaine dernière. Et l’or a été mis à mal… mais attendez, il est toujours bien plus élevé qu’il l’était il y a un an, ou l’année précédente, ou l’année encore avant…

** Ce qui rend les actions précieuses, c’est que vous pouvez les vendre et utiliser l’argent pour des choses que vous voulez. On ne peut pas manger une action. On ne peut pas y vivre. On ne peut pas en conduire une pour aller travailler. Tout ce qui compte vraiment (outre les dividendes), c’est combien vous pouvez les vendre, et ce que vous pouvez faire avec cet argent.

* Eh bien, il y a cinq ans de ça — au plus bas de la correction — vous auriez pu acheter plus de pétrole avec la recette de vos ventes que vous ne le pouvez aujourd’hui… environ deux fois plus.

* Du blé ? Oui, là aussi en quantité plus grande — bien plus grande.

* Et de l’or, bien entendu. En prenant le Dow depuis son sommet de 2000… jusqu’à son nouveau sommet de 2007… vous ne pouvez pas acheter autant d’or avec vos actions que vous le pouviez il y a sept ans de ça. En fait, vendez vos actions aujourd’hui — même à des prix plus élevés — et vous n’obtiendrez que moitié autant d’or.

* Les actions grimpent peut-être… mais la devise dans laquelle elles sont libellées baisse.

* Et voilà que Bill Gross, à la tête du plus gros fonds obligataire de la planète, pense que les baisses de taux de la Fed ne font que commencer. Selon lui, le problème de l’immobilier n’est pas près de disparaître… et la Fed sera obligée de diminuer ses taux directeur d’un point de pourcentage en conséquent.

* De bonnes nouvelles pour les actions ? Bon nombre de personnes en sont convaincues. Des taux d’intérêt en baisse sont généralement bons pour les marchés boursiers. Et pas mal de gens pensent aussi qu’un dollar plus faible sera bon pour les exportateurs US. Les prix américains sont bon marché et deviennent encore meilleur marché. Dans peu de temps, les Etats-Unis seront une économie menée par les exportations — comme le Japon ou la Chine ! Dans peu de temps, les gens achèteront des voitures construites aux Etats-Unis… des parfums… des alcools… des ordinateurs… des gadgets. Les profits des entreprises américaines grimperont. Les salaires US augmenteront enfin. Et les actions grimperont elles aussi, tandis que les revenus des entreprises grimpent en flèche.

* Tout est possible. Mais nous avons tendance à penser que le dollar chutera plus rapidement que les actions US ne grimperont… si elles grimpent.

* Nous n’imaginons pas non plus que tous les petits bouchons flottant sur les marchés boursiers vont rester les bras croisés alors que des milliers de milliards de dollars d’actifs libellés en dollars se font laminer par l’inflation. Il est plus probable qu’ils se débarrasseront de leurs dollars… recyclant leur propre argent dans leurs propres économies…

* … forçant les taux d’intérêt US réels à la hausse… alors même que les autorités financières US essaient de maintenir les taux nominaux au plancher… provoquant un sévère ralentissement aux Etats-Unis !

* Ce genre de choses s’est déjà passé ailleurs — notamment en Argentine !

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