La Chronique Agora

Un petit tour, puis un autre

Bourse, investissement, actions, obligations

Il y a un temps pour les actions, un autre pour l’or… des épisodes haussiers, des épisodes baissiers… un temps pour acheter et un temps pour vendre.

Il fait chaud. Puis il fait froid. Les marchés prennent aussi un coup de chaud. Puis, un coup de froid. Mais nous ne voyons pas l’intérêt d’essayer de deviner si les indices boursiers évolueront à la hausse aujourd’hui ou à la baisse demain. L’argent réel ne se gagne pas en consultant les cours de Bourse tous les jours. Il se gagne en surfant durablement sur la bonne tendance.

Comme pendant l’épisode haussier de 39 ans qui a eu lieu entre 1982 et 2021, durant lequel il fallait simplement se positionner à l’achat en Bourse et conserver ses actions. Tant que les taux d’intérêt baissaient, la tendance primaire était celle d’une hausse continue des cours des actifs.

Nous n’avons pas voulu participer à la dernière phase de cet épisode haussier. Notre modèle nous avait indiqué de dénouer nos positions en Bourse à la fin des années 1990. Par la suite, nous avons acheté de l’or.

Sommet après sommet

Le plan, à l’époque et toujours d’actualité, était de conserver nos positions sur l’or jusqu’à ce que le Dow Jones se replie à un niveau 5 fois inférieur au prix de l’once d’or. Cela n’a pas eu lieu. Au lieu de cela, après l’éclatement de la bulle internet en l’an 2000, la Fed a volé à la rescousse des marchés : elle a abaissé les taux d’intérêt et mis fin à la correction boursière.

Par conséquent, nous n’avons jamais dénoué nos positions sur l’or, nous n’avons jamais misé sur les valeurs technologiques, nous n’avons jamais envisagé sérieusement d’investir dans les cryptomonnaies (nos fils l’ont fait à notre place)…

Nous nous sommes contentés d’attendre. Etait-ce une bonne idée ? Tout dépend du moment où l’on souhaite récupérer sa mise. Nous n’avions pas l’intention de récupérer notre mise, donc cela ne nous a pas dérangé d’attendre. Ce fut une attente longue et enrichissante. Après avoir atteint un sommet en 2011, le cours de l’or a stagné pendant neuf ans, alors même que les indices boursiers franchissaient sommet après sommet. Il n’y a rien de plus exaspérant que de voir vos amis et vos collègues s’enrichir pendant que vous passez à côté d’un des épisodes haussiers les plus incroyables de l’histoire.

Puis, en août 2020, les taux d’intérêt ont cessé de baisser. C’était le début d’une nouvelle ère. Les marchés obligataires ont reculé (les taux ont augmenté), indiquant la fin de l’épisode haussier. Il a fallu attendre plus d’un an pour que les marchés actions se mettent à la page.

Puis, c’est arrivé. En janvier 2022. Vous savez ce qui s’est passé depuis. Les cours de Bourse et la spéculation se sont effondrés. Le cours de l’or a augmenté. Après avoir touché un point bas de 1 000 $ en 2015, l’or semble enfin attirer l’intérêt des investisseurs ; l’once d’or vaut plus de 1 900 $ depuis maintenant une dizaine de jours.

De plus en plus étrange

Le plus curieux à propos de tout ça, c’est que, malgré le fait d’être passé à côté du plus grand épisode spéculatif de l’histoire (2009-2020), à notre grand désarroi, nous avons réussi à nous en tirer de manière très honorable. Le Dow Jones est passé de 11 500 points à la fin de l’année 1999 à 33 375 points actuellement. Cela représente un gain de presque 200%. Sur la même période, le prix de l’once d’or est passé de 280 $ à 1 900 $. Cela représente une hausse de 570%.

Mais prenons la durée totale de l’épisode haussier, de 1982 à son pic, lorsque le Dow Jones a dépassé les 36 000 points. En 1982, l’once d’or valait 350 $. À partir de cette date, le cours a baissé pendant 18 ans. Mais le prix de l’once d’or est désormais 5,4 fois supérieur à ce qu’il était en 1982. En 1982, le Dow Jones valait 1 000 points. Il affiche désormais un niveau 36 fois supérieur au niveau qui était le sien au début de la période. Nous aurions gagné beaucoup plus d’argent avec les actions.

C’est un fait. En 1982, on pouvait acheter la totalité du Dow Jones pour un prix inférieur à trois onces d’or, un prix largement inférieur à la limite de cinq onces. A l’époque, il n’était pas judicieux d’acheter de l’or. Il fallait acheter des actions.

Comme nous l’avons vu hier, au fil du temps, tout ce qui existe tend vers son contraire. C’est du moins le cas sur les marchés. De sous-valorisé à survaloriser, de bon marché à onéreux, de rouge à vert et de l’offre vers la demande. Cette tendance peut être considérée comme la tendance primaire.

De l’envie au besoin

De nos jours, la plupart des investisseurs s’attendent à une réplique des 20, 30 ou 40 dernières années. Cela nous semble peu probable. Pourquoi ? Énantiodromie. Les marchés cherchent toujours à aller vers le contraire de ce qu’ils sont. Les cours augmentent encore et toujours plus, jusqu’à ce qu’ils commencent à baisser. Durant un épisode baissier, les cours baissent jusqu’à atteindre des prix d’aubaine qui poussent les investisseurs les plus avisés à se positionner à l’achat. S’ensuit un nouvel épisode haussier.

Nous en sommes là. Le marché obligataire a signalé et confirmé un changement majeur. Le taux des bons du Trésor américain à 10 ans est passé de moins de 0,5% en mars 2020 à plus de 3,6% au moment où j’écris ces lignes.

Ce qui est incroyable, c’est que la correction n’at pas été plus brutale. Mais la tendance primaire prend du temps à s’affirmer. Les vieilles habitudes persistent. Les vieilles impressions ont la vie dure. Et l’envie laisse place au besoin. L’investisseur qui a acheté des actions Tesla à 400 $ l’unité avec un effet de levier a besoin que le cours augmente encore plus. Faute de quoi, il pourrait se retrouver sur la paille.

En 1982, alors que la dette publique américaine était inférieure à 1 200 Mds$, le gouvernement rechignait à emprunter de l’argent. En 2022, cette même dette a dépassé les 31 000 Mds$ et le gouvernement doit désormais emprunter 2 000 Mds$ pour la seule année 2023. Or, il lui faut des taux faibles pour pouvoir le faire.

Mais, si nous visons juste, les taux d’intérêt, qui s’étaient repliés à des niveaux historiquement bas, sont désormais voués à atteindre des niveaux historiquement hauts. L’actif le plus sûr et le plus liquide au monde, le bon du Trésor américain, est en passe de devenir l’un des pires investissements au monde.

La suite au prochain épisode…

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