La Chronique Agora

Où sont passés les volumes boursiers ?

▪ Allez, plus que 0,2% à reprendre et la Bourse de Paris s’épargnera une sixième semaine de repli consécutif. Elle a accompli la majeure partie du chemin hier, avec +1,06%.

Le CAC 40 affichait encore 7% de repli cumulé jeudi matin (depuis le 2 mai dernier) avec un re-test du seuil des 3 825 points… mais les acheteurs sont intervenus juste à temps. Ils ont évité qu’une perte de contact définitive avec les 3 890 points ne se transforme en véritable Bérézina pour les permabulls.

Nous sentions venir le coup depuis lundi, comme nous l’expliquions en détail sur le Téléphone Rouge, au 08 99 88 20 36* , alors que le CAC 40 tutoyait les 3 850 points. Ce jour-là, les volumes d’échanges fondaient comme les espoirs de voir la Fed initier un QE3.

La moyenne d’échanges quotidiens était tombée sous les 2,5 milliards d’euros dès le 2 juin. Nous avions donc du mal à croire au déclenchement d’une puissante vague de correction moyen terme mêlant programmes de vente informatisées et dégagements de précaution face au risque d’éclatement d’une crise de dettes souveraines de force 10 (à l’égal de l’ouragan Lehman en septembre 2008).

Mais l’activité sur les marchés depuis une semaine se compare seulement aux périodes les plus creuses d’un mois d’août ou de la Trêve des Confiseurs, entre Noël et le Jour de l’an.

Nous voulons bien admettre que les institutionnels s’échangent plus volontiers le papier par le biais des dark pools (des places aussi opaques que virtuelles qui siphonnent les volumes sur les plates-formes traditionnelles de type NYSE-Euronext). Toutefois, l’activité s’est également contractée sur les dérivés (options, turbos…) alors qu’il n’y a pas de « marché gris » pour dissimuler leurs stratégies aux yeux du grand public.

Les gérants limitent leurs initiatives à quelques ventes sur les rebonds. Certains de ces derniers sont créés de toutes pièces — comme celui orchestré le 31 mai par quelques gros arbitragistes — au gré des fluctuations de la paire euro/dollar.

▪ Non contents de manipuler les marchés à leur guise depuis que la finance s’est concentrée entre les mains de quelques groupes bancaires « hyper-systémiques », les tout-puissants de Wall Street s’alarment des velléités régulatrices de la Fed et du comité Bâle III.

Jamie Dimon, le patron surpayé et sur-bonussé de J.P. Morgan (sa banque est la plus grande manipulatrice d’un marché régulé, celui du cuivre et de l’argent, depuis les frères Hunt au début des années 80) a interpellé Ben Bernanke sur le sujet. Il l’a averti qu’un excès de règles (de bon sens) et d’exigences en matière de capitaux propres — le fameux ratio tier one — risquait de ralentir la « reprise » !

Mais à quelle reprise fait-il allusion ? A celle de l’inflation ?  A celle des mauvaises habitudes des banques d’investissement en matière d’excès spéculatifs sur les dérivés de crédit, de matières premières et de soft commodities ?

Et quel genre de bâtons réglementaires « Monkey Business Ben » a-t-il glissé dans les roues de ses complices de Wall Street depuis septembre 2008 ?

Comme le déclarait Jim Rogers, que les habitués de la Chronique connaissent bien, au micro de CNBC jeudi matin : « le patron de la Fed a subverti toutes les règles et achevé de détruire tout ce qui assurait la crédibilité de la banque centrale américaine ».

« Il ne connaît rien à l’économie, n’a aucune idée de ce qu’il aurait fallu faire avant l’automne 2008, aucune idée de ce qui se prépare pour 2012-2013. Il ne sait qu’imprimer de l’argent, toujours plus d’argent, en priant pour que ses complices de Wall Street en fassent un bon usage ! Et c’est bien le cas puisque cette fausse monnaie se transforme en vraie fortune pour les traders et les golden boys… et en monceaux de dettes supplémentaires pour les contribuables ».

A ce propos, ne manquez pas de relire l’article de Bill Bonner (un excellent ami de Jim Rogers) à ce sujet : il est encore d’actualité puisqu’il date juste d’hier matin.

▪ Pendant que les Etats-Unis laissent filer les déficits tout comme l’inflation, J.-C. Trichet évoque une « forte vigilance » concernant la stabilité des prix, ce qui préfigure à coup sûr un second tour de vis monétaire début juillet. Le taux directeur serait porté à 1,5% en Zone euro alors qu’il resterait inchangé à 0,15% (en moyenne) outre Atlantique et à 0,5% outre-Manche.

La Banque d’Angleterre a maintenu le loyer de l’argent au même niveau qui prévaut depuis mars 2009. Elle ne devrait pas le modifier avant fin 2012, selon les spécialistes : l’Angleterre n’a tout simplement pas les moyens d’encaisser le coût budgétaire d’une hausse de taux en pleine contraction de l’activité économique et des recettes fiscales qui en découlent.

La vraie question, ce n’est pas de savoir si le Royaume-Uni ira dans le mur avant les prochains Jeux olympiques… mais bien si la faillite sera prononcée avant que l’on ait fini de poser les pelouses et installé les panneaux de chronométrage.

▪ En attendant, le champion olympique de la dette toutes catégories confondues reste l’Oncle Sam. Cependant, le destin — et les fureurs de la planète — lui font un étrange cadeau : il s’agit d’une amélioration inattendue de la balance commerciale américaine, qui fournit à Wall Street une bonne excuse pour ne pas inscrire une septième séance de baisse consécutive.

Le déficit s’est subitement contracté de 3,1 milliards de dollars au mois d’avril, selon des statistiques publiées par le département du Commerce US, à 43,7 milliards de dollars contre 46,8 milliards en mars. C’est dû au fait que les importations en provenance du Japon ont chuté de près de trois milliards de dollars ; 400 000 véhicules japonais n’ont pu être construits ou exportés le mois dernier vers les Etats-Unis.

Nouvelle déception en revanche avec les inscriptions hebdomadaires au chômage. Elles ont remonté vers 427 000 au lieu de reculer vers 410 000 comme espéré — mais nous n’avons jamais vu Wall Street broyer du noir pour ce motif depuis le début de la seconde guerre du Golfe.

Ce ne sont plus les citoyens mais l’argent qui travaille : on peut le délocaliser sans qu’il se mette en grève ou qu’il occupe les usines… on peut surtout le convertir en or lorsque celui que l’on verse aux salariés voit sa valeur partir en fumée.

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