La Chronique Agora

On ne peut pas plaire à tout le monde ? Jean Castex a relevé le défi !

Nouveau gouvernement, nouvelle thématique ! Laissons de côté les drames de la politique française en matière de sécurité pour retrouver nos politiciens sous leurs aspects les plus clownesques. Comme dit l’autre, « mieux vaut en rire qu’en pleurer », n’est-ce pas ?

A tout seigneur tout honneur : débutons ce nouveau chapitre avec notre tout frais premier ministre, j’ai nommé Jean Castex.

Quand un « gaulliste social » tendance Xavier Bertrand nous explique que l’« on ne peut pas tout attendre de l’Etat »…

Ça y est, le remaniement est acté. Equipé de ses boutons de manchette en forme de tongs, Edouard Philippe a quitté Matignon pour « prendre des vacances » au Havre, a-t-il expliqué.

Il laisse sa place à Jean Castex, a.k.a. monsieur Déconfinement. A en croire notre président(-Premier ministre-député), c’est un « nouveau chemin » qui s’ouvre devant nous.

Il est vrai que si l’on s’en tient à ce qu’Europe 1 a retenu du premier JT du Gersois, il risque d’y avoir du changement. Voyez donc :

Le nouveau Premier ministre a déclaré vendredi passé :

« … Mes valeurs sont la responsabilité, c’est-à-dire qu’on ne peut pas tout attendre de l’Etat. Je ne peux pas admettre certains comportements, certaines déviances, certains communautarismes […] mes valeurs, c’est l’autorité, gardienne des libertés fondamentales. »

Autant vous dire que ces paroles du Docteur Jean sonnent comme une douce musique à mes oreilles. Le problème, comme pour tout ce qui touche de près ou de loin à Emmanuel Macron, c’est que l’on a à nouveau droit à tout et son contraire. Vous vous doutez bien que le président n’allait pas convier le Docteur Jean à Matignon sans « en même temps » y installer Mister Castex.

Mister Castex, c’est ce « gaulliste social » qui veut « un nouveau pacte social. » C’est celui qui, « avant de donner les solutions, […] souhaite que l’on en discute avec la Nation, avec les partenaires sociaux, dans les territoires, avec tous les acteurs pour les associer le plus possible à la recherche de solutions ».

En somme, c’est celui qui va poursuivre la tradition technocratique des grands débats citoyens et autres comités Théodule qui ne sont rien d’autre que des procédés fumigènes pour tenir le peuple aussi éloigné que possible des rênes de son destin.

Il ne fait aucun doute qu’avec Mister Castex, on n’a pas fini de discuter. Oh, rassurez-vous, sans doute le nouveau gouvernement vous demandera-t-il ponctuellement votre avis…

Mais pour ce qui est de sujets comme l’application de la loi dans les zones de non-droit ou la réforme de l’Etat, je doute que vous voyiez la différence entre le gouvernement Castex et le gouvernement Philippe – mais il est vrai que ce ne sont là que des questions mineures.

Au final, l’Etat occupera encore plus de place dans nos vies. C’est en tout cas ce qu’il s’est passé depuis que Lionel Jospin (1997-2002) avait précédé Jean Castex en expliquant que l’Etat ne peut pas empêcher tous les licenciements et que les individus doivent un minimum se responsabiliser.

On ne peut pas plaire à tout le monde ? Jean Castex a relevé le défi !

Dans le portrait qu’en a brossé France Info le 3 juillet, le nouveau Premier ministre est décrit comme « un représentant de la ‘droite sociale’ […]. L’ancien collaborateur de Xavier Bertrand et de Nicolas Sarkozy est également apprécié par certains à gauche », poursuit le site d’informations.

L’ancien secrétaire général de Force ouvrière Jean-Claude Mailly le considère comme « un ami », alors que Stéphane Troussel, président socialiste de la Seine-Saint-Denis, ou encore Patrick Pelloux ne tarissent pas d’éloges à son sujet.

Au fond, Jean Castex me semble le candidat parfait pour succéder à Edouard Philippe, dont vous vous souvenez peut-être qu’il a adoré Hayek lorsqu’il l’a lu étudiant, ce qui ne l’empêche pas d’être convaincu que la contrainte étatique est la meilleure solution à tous nos problèmes.

Certaines personnalités politiques ont tout de même témoigné leur désapprobation à l’annonce du nom du successeur d’Edouard Philippe. Pour les obsédés de la race, Jean Castex est avant tout un « homme blanc de plus de 50 ans », pour reprendre l’expression de Delphine Ernotte.

Chacun voit midi à sa porte…

Le cortex en formica de Jean Castex

En ce qui me concerne, je vois bien sûr en Jean Castex le « techno » Sciences Po-ENA-haute fonction publique qui n’a jamais pris le moindre risque professionnel de sa vie, mais je me demande si c’est ce qu’il y a de plus important.

Outre le fait que la France a jusqu’à présent été incapable de faire émerger des personnalités politiques issues du secteur privé, le logiciel de base de notre « élite » politique date en effet au mieux d’il y a un demi-siècle, et cela n’est vraiment pas rassurant.

Tout se déroule comme si nos politiciens étaient revêtus d’œillères qui enferment leur pensée dans la nostalgie de nos glorieuses années. Non seulement Jean Castex et ses semblables sont incapables de tourner leur regard vers l’avenir, mais il ne leur viendrait pas non plus à l’esprit de regarder quelles solutions politiques ont fonctionné en dehors des frontières de l’Hexagone. Comme quoi être d’extraction provinciale plutôt que parisienne n’est pas une garantie d’ouverture d’esprit.

C’est comme ça qu’avec la lente dégradation de la qualité du personnel politique français, nos technocrates contemporains se retrouvent inlassablement à se réclamer de Charles de Gaulle.

Le gouvernement, les parlementaires et la haute fonction publique ainsi équipés, il ne faut pas s’étonner du résultat.

A défaut de couper le cordon ombilical avec le Général, peut-être le nouveau premier ministre pourrait-il se pencher sur les conseils que le libéral Jacques Rueff prodiguait à de Gaulle en 1960, lesquels avaient très largement été appliqués.

Mais il est politiquement plus confortable de se parer des oripeaux d’un « gaullisme social »…

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