▪ Nous sommes de retour aux Etats-Unis après cinq mois en Europe. Quel plaisir d’être en Europe. C’est toujours un plaisir d’observer l’effondrement de quelque chose. Jusqu’où le Vieux Continent va-t-il s’effondrer ? Nous n’en savons rien. Mais on dirait qu’il va falloir en amputer de gros morceaux… sous peine de voir l’ensemble se désintégrer.
Parfois les choses se construisent. Parfois, elles s’effondrent. On gagne généralement de l’argent quand elles se construisent. Quand elles s’effondrent, c’est plus difficile. Parce que tout le monde commence à poser des questions.
Durant un boom, les points d’interrogation disparaissent. Lors d’un krach, ils refont surface.
« Que vaut vraiment cette action ? » veulent savoir les gens.
« Qui est de l’autre côté de cette transaction ? » demandent-ils.
« Quand la banque me renvoie mon chèque avec la mention ‘fonds insuffisants’, à qui font-ils allusion : nous… ou eux ? »
Les investisseurs obligataires veulent savoir si les autorités européennes vont les renflouer… Les autorités européennes veulent savoir si les Chinois vont les renflouer… Et les contribuables veulent savoir pendant combien de temps leurs allocations retraite vont continuer à tomber.
Angela Merkel a donné une réponse la semaine dernière.
« Si les politiciens croient que la BCE peut résoudre le problème de la faiblesse de l’euro, ils tentent de se convaincre d’une chose qui n’arrivera pas », a-t-elle dit durant un discours.
Quelqu’un lui avait demandé quand la BCE interviendrait pour acheter plus d’obligations et renflouer les investisseurs obligataires. Apparemment, c’est une question qui ne vaut pas la peine d’être posée, dit-elle.
Les Allemands veulent en réalité savoir si les Grecs et les Italiens peuvent agir comme des Allemands. De leur côté, les Grecs et les Italiens veulent savoir quand les Allemands cesseront d’agir comme des Allemands.
Quant aux Français, ils veulent savoir où l’on trouve du foie gras digne de ce nom ainsi qu’une bonne bouteille de Bordeaux.
Et tout le monde compte sur le fait qu’il se produise une chose impossible. Les dépenses gouvernementales doivent chuter… ou au moins cesser de croître. Parallèlement, les recettes fiscales doivent augmenter… ou au moins arrêter de baisser. Quant à l’économie, elle doit se développer de 6% par an afin que les recettes fiscales puissent augmenter assez pour soutenir ce niveau de dette. Comment l’économie peut-elle enregistrer trois fois la croissance actuelle sans le stimulant des dépenses gouvernementales… et alors que tout le monde réduit ses dépenses, rembourse ses dettes et épargne de l’argent ? A vous de nous le dire !
▪ Aux Etats-Unis, on ne se pose pas tant de questions. Personne ne doute de la fiabilité du gouvernement et du crédit américains. Du moins pas pour l’instant. Et personne ne doute que la Fed épongera la dette publique US… en imprimant autant d’argent que nécessaire.
Le problème, c’est que ce sur quoi ils comptent pour leur éviter de poser des questions implique aussi tout un tas de points d’interrogation. Lorsque la Fed recommencera à imprimer, les investisseurs finiront par se demander combien de temps elle peut continuer… avant que l’enfer ne se déchaîne.
Nous n’avons pas d’opinion sur le sujet. Nous n’en avons pas besoin. Cette question, comme disent les juges, n’est pas encore mûre pour une décision.