La Chronique Agora

Marché obligataire : les taux d’intérêt ont-ils vraiment renversé la tendance ?

▪ Des nouvelles de Londres : l’un des plus grands experts obligataires de Grande-Bretagne donne le même conseil néanderthalien que nous. Le Telegraph rapporte :

"Le gestionnaire d’un des plus grands fonds obligataires de Grande-Bretagne a conseillé aux investisseurs de garder du cash sous leur matelas.

Ian Spreadbury […] s’inquiète de ce qu’un ‘événement systémique’ vienne ébranler les marchés, d’une ampleur éventuellement similaire à la crise financière de 2008, qui a commencé en Grande-Bretagne avec la panique sur Northern Rock.

La meilleure stratégie pour les investisseurs, dans ce cas, a-t-il dit, est de répartir largement leur argent dans des actifs différents, dont l’or et l’argent-métal, ainsi que des liquidités sur des comptes-épargne. Il est allé plus loin, suggérant qu’il était sage de détenir ‘du cash physique’, une suggestion inhabituelle de la part d’un gestionnaire de fonds grand public.

Il s’inquiète de ce que la dette mondiale — en particulier la dette hypothécaire — a été gonflée jusqu’à des niveaux record, rendus possible par des taux d’intérêt exceptionnellement bas qui pourraient bientôt prendre fin ; en outre, M. Spreadbury n’est pas certain que les banques soient capables de supporter les chocs qui pourraient les attendre.

Il s’est refusé à prédire le déclencheur exact mais a déclaré que cela aurait des chances de se produire d’ici cinq ans plutôt que dix".

Les marchés semblent être en mode "attendre-et-observer"

Les marchés semblent être en mode "attendre-et-observer". La Grèce… les marchés obligataires…

On regarde ça comme un bâton de dynamite. Pendant longtemps, il peut rester là… silencieux… immobile… Et puis, tout soudain, boum !

▪ La mèche est allumée
Il y a environ deux mois, il semblait que les rendements obligataires avaient enfin trouvé leur plancher. Avec 5 000 milliards de dollars de dette souveraine s’échangeant à des rendements négatifs, les prix obligataires ont commencé à chuter (les rendements ont grimpé).

Nous avons pensé — et ce n’était pas la première fois : la mèche est allumée !

Nous n’avions que 33 ans quand ce marché obligataire a pris son dernier virage. A l’époque, les rendements obligataires grimpaient depuis 33 ans. Si seulement nous avions imaginé ce qui se passerait ensuite !

"Mon partenaire connaissait quelqu’un qui gérait de l’argent" — c’est ainsi qu’un de nos amis décrit l’origine de sa fortune. "Nous avons donc décidé de placer notre argent chez lui. Je n’avais jamais entendu parler de lui. Il s’appelait Warren Buffett".

Génie, chance ou un peu des deux, Buffett était au bon endroit au bon moment

Génie, chance ou un peu des deux, Buffett était au bon endroit au bon moment.

Rétrospectivement, ça semble si simple, si évident. Les autorités avaient changé le système monétaire 10 ans auparavant. L’heure de la récompense approchait. Sans la discipline du lien avec l’or, l’industrie financière pouvait prendre le mors aux dents ; elle pouvait prêter de l’argent que personne n’avait jamais gagné et que personne n’avait jamais épargné. Elle pouvait prêter des milliers de milliards de dollars qu’elle avait obtenus gratuitement. Et tant que les rendements chutaient, elle n’avait pas vraiment besoin de s’inquiéter de la qualité du crédit. Si un emprunteur avait des problèmes, elle pouvait prêter plus… à un meilleur taux.

Les obligations étaient dans un marché baissier depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale, les 33 années susmentionnées entre 1949 et 1982. Les rendements avaient grimpé à mesure que les prix obligataires tendaient à la baisse.

En 1982, le bon du Trésor US à 10 était arrivé au pied du mur, avec un rendement record de 14,92%. Depuis, les rendements baissent — c’est-à-dire la majeure partie de ma vie d’adulte.

A mesure qu’il devient moins cher d’emprunter, les gens refinancent leur ancienne dette et empruntent plus

▪ Les changements apportés par la baisse des rendements
La baisse des rendements et la hausse du crédit ont affecté quasiment tout et tout le monde depuis. Les prix obligataires plus élevés (rendements plus bas… taux plus bas) rendent l’emprunt moins cher. A mesure qu’il devient moins cher d’emprunter, les gens refinancent leur ancienne dette et empruntent plus. Ils achètent des biens de consommation. Quelle a été le plus grand succès parmi les détaillants américains ? Walmart — avec de gigantesques volumes de marchandises (souvent fabriquées en Chine) vendues à bas prix.

Il suffisait d’acheter Walmart, de croiser les bras et de laisser le boom nourri de crédit faire son travail. On pouvait acheter une action Walmart pour 42 $ en 1982. Aujourd’hui, elle se vend 72 $. Et encore : il y a eu sept splits (à deux pour une) sur le titre ! Voilà qui défie nos compétences mathématiques, mais nous sommes d’avis que ça représente à peu près un retour de 10 000 $ pour chaque 100 $ investis.

Encore mieux que le secteur de la vente au détail : la finance elle-même. Les profits, dans le secteur, sont passé de 10% environ du total des entreprises américaines dans les années 70 à 40% en 2007.

Cela illustre le phénomène connu sous le non de "financiarisation" de l’économie américaine

Cela illustre le phénomène connu sous le non de "financiarisation" de l’économie américaine. Au lieu de produire des choses pour gagner de l’argent, l’accent a été mis sur le prêt, la spéculation et le fait de gagner de l’argent à partir de l’argent.

Derrière ce phénomène se trouve une chose que personne ou presque n’a remarqué — la nouvelle devise. Elle ressemblait en tous points à l’ancien dollar. On pouvait la dépenser comme un ancien dollar. On pouvait la plier, la prêter, l’emprunter et l’épargner — exactement comme l’ancien billet vert.

Qui s’est rendu compte que ce n’était pas la même chose ? Qui s’en souciait ? Si ça ressemblait à un canard, que ça se dandinait comme un canard et que ça cancanait comme un canard, c’est que ce devait être un canard, non ?

A présent… 44 ans après la naissance de cette nouvelle devise… et après avoir injecté une telle quantité de cet argent qu’elle a multiplié la dette US par 60… une telle quantité que le monde entier en est saturé… inondé… trempé jusqu’aux os…

… On nous dit que cette étrange devise est précieuse et que nous devrions conserver une partie de cet argent bon marché chez nous, là où nous pourrons y accéder en cas d’urgence.

Est-ce que ça a vraiment un sens ? A suivre… bien entendu.

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