Les signes de déclin se multiplient pour l’économie américaine – et le sort du Zimbabwe est une sinistre leçon en la matière.
Ces derniers jours, nous faisons la liste des quelques petites choses que nous avons apprises ces 20 dernières années.
Parmi elles se trouve notamment le fait que les meilleures idées sur l’économie ne se trouvent pas dans les formules creuses de la Fed ni dans des rapports d’entreprise flatteurs – mais bien dans les dictons des vétérans et les contes de bonne femme.
Aujourd’hui, nous nous demandons si ce qui s’est passé au Zimbabwe et au Venezuela ne va pas se produire aux Etats-Unis.
Nous nous posons cette question suite à une nouvelle tombée la semaine dernière.
De « joyau » à « trou m***ique »
A la Chronique, nous ne souhaitons de mal à personne… mais cela n’empêche pas que, parfois, un fin sourire nous monte aux lèvres en lisant la chronique nécrologique.
C’est ainsi que nous avons accueilli un gros titre vendredi : « Robert Mugabe meurt à 95 ans ».
En 1980, Mugabe a fondé le Zimbabwe, ex-Rhodésie – alors l’un des pays les plus riches d’Afrique, se développant à plus de 5% par an.
« Vous avez hérité d’un joyau », lui a déclaré Julius Nyerere, président de Tanzanie. « Conservez-le. »
Hélas, le monde tourne. Les premiers seront les derniers, selon la Bible. Et Robert Mugabe n’a été ni le premier ni le dernier à prendre une nation solide pour la transformer en trou m***ique.
Aujourd’hui, le Zimbabwe est l’un des pays les plus pauvres au monde. Nous y reviendrons dans une minute : voyons d’abord ce qu’il se passe dans l’actualité…
La réélection n’est pas garantie
Donald J. Trump espère qu’une baisse des taux d’intérêt stimulera un peu l’économie – lui donnant ainsi de meilleures chances de réélection.
Mais, la semaine dernière, une étude universitaire démontrait exactement ce que nous avions prévu : une baisse de taux (ou toute autre forme de relance, d’ailleurs) ne fonctionnera pas.
Bloomberg :
« Les taux négatifs des banques centrales étaient censés augmenter les dépenses, mettre fin à la déflation et stimuler l’économie. Ils ont peut-être produit l’effet totalement inverse.
Selon des recherches de l’université de Bath, le fait que les banques centrales facturent les banques commerciales pour détenir des réserves excédentaires a en fait réduit les prêts. Cela est dû au fait que les coûts supplémentaires réduisent les marges des banques, menant à une chute de la croissance des prêts. »
Par ailleurs, on trouve un peu partout des signes que l’économie américaine bat de l’aile. Le Washington Post :
« […] Cette année, le secteur industriel est devenu négatif, entrant dans ce qui est, selon les données de la Réserve fédérale, une récession technique, ou ralentissement de six mois. Il ne se remettra probablement pas à court terme : un sondage majeur auprès des directeurs d’achats du secteur industriel US montre une perspective négative […]. »
La croissance de la production de biens de consommation et d’équipement des entreprises était elle aussi en baisse.
L’emploi US, également, est en piètre état. Les secteurs de l’exploitation minière, de l’exploitation forestière et de la construction ont tous perdu des heures de travail. Idem pour les secteurs liés au fret.
Mort-vivant
Rappelez-vous que les entreprises peuvent se livrer à tous les rachats, fusions et acquisitions qu’elles veulent : si les marchandises ne circulent pas, c’est que le « boom » est bidon.
C’est pour cela que nous surveillons l’indice Dow Jones Transportation. Il a atteint un sommet en octobre 2018. Depuis, en dépit des relances, des discours de la Fed et du battage spéculatifs, il n’a toujours pas grimpé.
Notre hypothèse – le marché a atteint un sommet il y a un an – reste donc valable. Et si c’est bien le cas, cela signifie que le Dow Jones est un mort-vivant… qui attend de s’effondrer.
Ceci étant dit, il n’y a pas à s’alarmer d’une future récession. L’économie a des hauts et des bas, c’est chose naturelle.
Comme nous le disons souvent : si on veut vraiment un beau gâchis, il faut un gouvernement.
Des records peu enviables
C’est ainsi que Robert Mugabe, tout frais arrivé après les élections de 1980, s’est mis au travail. La « Rhodésie » d’Ian Smith était de l’histoire ancienne. Désormais, ce serait le Zimbabwe, et c’était le pays de Mugabe.
L’une des innovations de Mugabe a consisté à exproprier les fermiers blancs pour donner les terres fertiles à ses compères. Malheureusement, les compères en question n’étaient pas agriculteurs. Ils n’avaient pas les équipements, les capitaux ou les compétences nécessaires pour faire tourner une exploitation digne de ce nom.
On trouvait 4 000 fermiers blancs au Zimbabwe en 1980. Lorsque Mugabe est reparti, ils n’étaient plus que 300. La production et les exportations disparurent – en même temps que l’argent qu’elles généraient.
A la fin des années 90, le taux d’inflation était déjà aux alentours des 30%. M. Gideon Gono, à la tête de la banque centrale, était tombé dans le piège « l’inflation ou la mort ».
Le moyen le plus simple de s’en sortir était d’imprimer de la monnaie – pour relancer l’économie, bien entendu !
M. Gono ajouta de plus en plus de zéros. L’inflation dépassa les 11 millions de pourcents en 2007, année où le Zimbabwe devint le premier pays de l’Histoire à émettre un billet de 100 Mds$Z. En termes nominaux, selon la devise locale, le Zimbabwe avait le marché boursier le plus performant en 2006.
L’économie finit pourtant par s’effondrer complètement, et M. Mugabe fut contraint d’abandonner le pouvoir.
Plus tard, on demanda à M. Gono pourquoi diable il avait gonflé la devise à des niveaux si désastreux.
« Je n’ai fait que ce que vous faites », a-t-il répondu, faisant référence aux grandes banques centrales du reste de la planète.