La Chronique Agora

Le FESF, « un machin » qui ne sert à rien

▪ Nous étions les seuls idiots à ne pas nous ruer à l’achat mardi et mercredi matin. La chance nous a souri puisque la journée de mercredi a été celle de toutes les angoisses… et de la rechute des indices sur les planchers testés au lendemain de l’annonce du faux référendum populaire sur les mesures d’austérité imposées à la Grèce.

D’ultra-minoritaire mardi, nos doutes sur l’avenir politique et le destin économique de l’Italie étaient devenus la thématique incontournable dans les salles de marchés dès hier matin. Nous affirmions dès le 27 octobre dernier que le FESF n’était d’aucune utilité, malgré son triple A dont le marché se moque comme de son premier appel de marge. En effet, personne ne manifeste l’intention de refinancer le FESF tant que son périmètre, le niveau de garantie offerte et la façon de le faire fonctionner restent dans le flou.

Le FESF est devenu aujourd’hui un couteau sans manche dont il manque la lame.

J’avais soutenu avec une coupable obstination — y compris lors de chacune de mes interventions sur BFM depuis fin septembre — que le FESF ne servait à rien, à moins que cet instrument ne soit mis à la disposition de la BCE… qui n’a jamais souhaité en faire usage.

Tant qu’à monétiser la dette, autant le faire au grand jour, en costume d’apparat (il n’y a que cela qui impressionne les marchés) plutôt que dans un petit costard étriqué dont il faudrait en permanence retoucher la largeur du dos et la longueur des manches.

Mario Draghi, en fin tacticien, n’a jamais sollicité le privilège de jouer le sauveur de la Zone euro… puisque le FESF a été conçu pour cela. Mais qui mieux que lui savait que ce « machin » était complètement inefficace en cas de défiance envers la dette italienne, si jamais les Européens parvenaient à s’entendre pour le rendre opérationnel avant janvier 2012 ?

Un délai de trois mois entre l’acceptation laborieuse de son principe et sa première mise en oeuvre revenait à sortir le défibrillateur de sa mallette trois heures après un arrêt cardiaque !

En ce qui concerne la Grèce, qui a fait une série d’infarctus depuis sa première attaque fin novembre 2009, l’Allemagne s’est toujours arrangée pour que sa réanimation soit déclenchée dans les ultimes instants précédant une mort cérébrale définitive.

Il fallait s’attendre à ce que la Grèce en ressorte à l’état de légume… en espérant qu’une âme charitable proposerait qu’on la laisse mourir dignement plutôt que de lui infliger des années de coûteux acharnement thérapeutique pour lui assurer au mieux une existence végétative, en attendant que la petite chandelle de la vie s’éteigne d’elle-même.

Il semblerait cependant que les marchés aient décidé de faire circuler un grand courant d’air !

Après la tragédie grecque de la fin de l’été, c’est maintenant la crise italienne qui s’invite en même temps que l’automne sur les rivages nord-américains, et elle n’est pas la bienvenue !

▪ Une atmosphère de fin du monde comme on n’en avait plus connu depuis le 10 août dernier régnait à Wall Street à moins de 90 minutes de la fin de la séance. Le Dow Jones plongeait de 400 points, vers 11 760 points. Le Nasdaq affichait pratiquement -4% à 2 620 points, et le S&P dévissait de 3,7% à 1 229 points, avec 99,8% de ses composantes en repli.

Les indices américains avaient pris l’habitude de renverser la vapeur peu après l’heure du déjeuner. Rien de tel ne s’est produit cette fois-ci pour sauver les marchés US d’un scénario catastrophe.

Wall Street a effacé en quelques heures tout ce qui avait été gagné depuis le 2 novembre, le Nasdaq et le S&P repassant dans le rouge sur l’année 2011. Le spectre d’une instabilité incontrôlable des marchés, évoquée par Christine Lagarde mercredi matin, a commencé à prendre forme comme une prédiction auto-réalisatrice.

La musique du film Le Parrain illustrait sur CNBC les premiers flashes de cette journée de mercredi. Ils étaient tous consacrés à la crise de confiance qui plombe la dette souveraine italienne, le rendement du 10 ans atteignant les 7,25%, le 2 ans les 7,3%.

Les marchés américains ont souffert d’une vague de dégagements massifs sur un très large front ; on n’avait pas vu cela depuis le 10 août dernier.

Un vrai climat de crise de confiance radicale a régné durant toute la séance. L’indice VIX de la peur (panique hier soir) a fait un bond quasi historique de +32%, à 36,2. De son côté, l’euro, l’autre baromètre de l’aversion au risque, chutait de 2,2%, passant sous les 1,3530 face au dollar.

Au sein du Nasdaq 100 mais également au sein du S&P 500, un seul titre en hausse : Best Buy avec +1,4%. Il s’agit du Darty nord-américain… et un « contrat de confiance », c’est bien ce dont les marchés auraient le plus grand besoin s’agissant des dettes souveraines européennes, parce que concernant celles qu’ils ont acheté en Italie, personne ne va leur rembourser la différence !

Ils signeraient certainement les yeux fermés la garantie additionnelle : en cas de pépin, dépannage sous 24 heures assuré par « Super Mario » Draghi.

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