La Chronique Agora

Le drôle de cahier de vacances de nos politiciens (3/4)

La semaine passée, nous avons vu que notre classe politique a de lourdes carences en français, en histoire et en géographie. Certains n’arrivent même pas à respecter un énoncé. Poursuivons notre tour d’horizon en débutant par ceux qui ont des difficultés avec les maths.

Mi-mai, l’ONG OXFAM a publié un rapport tout en nuances (1) sur les dividendes du CAC 40, lequel a beaucoup fait parler de lui. Sobrement intitulé « CAC 40 – des profits sans partage », les auteurs s’y indignent du fait que « les entreprises du CAC 40 ont […] redistribué 67,4% de leurs bénéfices en dividendes aux actionnaires contre 5,3% à leurs salariés », comme le rapporte La Tribune.

Sauf que voilà, les auteurs du rapport ne semblent même pas avoir le niveau de seconde en économie (pardon « science économique et sociale » comme l’appelle pompeusement le Mammouth). En effet, exiger un partage des profits largement plus en faveur des salariés, c’est oublier que ces derniers ont déjà été rémunérés pour leur travail sous forme de salaire, avant même que l’entreprise n’ait enregistré une perte ou un profit.

Les actionnaires sont quant à eux rémunérés si et seulement si l’entreprise dégage un profit. Il est donc logique qu’ils accaparent une part plus importante de ce dernier, la participation versée aux salariées étant une sur-rémunération qui vient compléter leur salaire.

Bref : zéro pointé (2). J’imagine que vous ne serez qu’à moitié étonné si je vous dis qu’OXFAM est l’ONG qui a choisi Cécile Duflot pour diriger son antenne française…

Autant il est difficile d’être étonné que l’ancienne secrétaire nationale d’Europe Écologie Les Verts ait de sérieuses carences en économie, autant la sortie d’Amélie de Montchalin au sujet du prélèvement à la source a de quoi laisser pantois. Celle dont Contexte expliquait en octobre 2017 qu’elle « s’est déjà imposée comme ‘la’ spécialiste en matière économique au sein de la majorité » a tout de même trouvé moyen de faire la déclaration suivante :

 

Je ne sais même pas par où commencer tellement rien ne se tient dans ce propos. Laissons tomber la première partie qui n’a aucun sens. Pour le reste, s’il s’agit de dire qu’avec le prélèvement à la source, l’Etat ponctionne le contribuable avant même qu’il ne puisse épargner, ça se tient. Cependant, de là à présenter le fait que le contribuable fasse une avance de trésorerie à l’Etat comme un progrès, il faut être sacrément culottée.

Par ailleurs, Amélie de Montchalin semble avoir oublié quelques subtilités techniques. Heureusement, Vincent Bénard était là pour les lui rappeler.

 

Si vous êtes un admirateur de la whip du groupe LREM au sein de la commission des Finances, de l’Économie générale et du Contrôle budgétaire, rassurez-vous, tant que Bruno Le Maire ou La France Insoumise n’apparaissent pas dans ce genre de classement, cela veut dire qu’il y a de bonnes chances que quelqu’un ait fait pire…

Arithmétique : niveau cancre

Voici le genre d’ « arithmétique collectiviste » avec laquelle LFI appâtait le chaland courant juin :

J’ai failli classer cette illustration dans la rubrique « on nous prend pour des buses », mais j’ai préféré me dire qu’elle devait avoir été pondue par un militant honnête mais pas parmi les plus brillants du mouvement de Jean-Luc Mélenchon.

Bref, une fois que l’on corrige les erreurs de raisonnement et de calcul, on arrive évidemment à la conclusion que  les prestations sociales ont augmenté beaucoup plus vite que le PIB depuis 1981, soit l’exact inverse de ce qui était avancé :

Si vous êtes dépités, accrochez votre ceinture, Bruno Le Maire n’a pas encore participé au concours.

Arithmétique : niveau magicien

Cet été, peut-être avez-vous été témoin de la recrudescence des tables de bonneteau dans les rues de Paris. Sachez que lorsque l’arnaque a lieu sur la voie publique, il s’agit d’un jeu illégal qui peut vous faire perdre d’importantes sommes d’argent.

En revanche, lorsque le trucage sort directement de la bouche de Bruno Le Maire et est relayé par l’AFP, c’est parole de ministre.

Ainsi Bruno Le Maire a-t-il déclaré au mois de mai que la récupération par l’Etat de 35 Mds€ de la dette de la SNCF « ne pèsera pas sur le déficit public ». Voici comment le ministre de l’Economie et des Finances explique son tour de passe-passe :

« Elle aura évidemment un impact sur la dette publique, puisque ça accroit la dette publique française […] mais elle n’aura pas d’impact sur le déficit ».

Suggestion à Bruno Le Maire :

– si la reprise des dettes des uns et des autres n’aggrave pas le déficit,

– et que c’est même de l’argent public dont il s’est assuré qu’il est dépensé de manière « efficace » (son rôle de ministre tel que défini par lui-même),

– alors pourquoi l’Etat ne reprendrait-il pas la dette de l’ensemble des entreprises et des ménages français ?

A l’en croire, cela n’a aucun effet sur le déficit et, mieux encore, cela relancerait sans doute la croissance économique !

Hum, hum… à vous aussi, ça semble vous semble compliqué ? C’est peut-être dû au fait qu’à force de pratique, Bruno Le Maire est devenu maître en manipulation des codes macroniens, tout en « ralentissement de la hausse continue de nos dépenses » et autres propos fumigènes.

En fait, si le ministre s’était exprimé dans un français honnête, il se serait contenté de dire qu’il pensait que compte tenu des montants en jeu, le retour à l’équilibre des finances publiques aurait toujours lieu en 2022.

Je précise « pensait » car tout le monde n’est pas d’accord avec lui, en particulier Joël Giraud, rapporteur général du budget. Ce dernier estimait en effet que « la reprise de la dette de la SNCF allait provoquer une hausse du déficit par rapport aux prévisions actuelles du gouvernement, et retarderait le retour à l’équilibre des finances publiques » [soit 0,1% de déficit en 2022, contre 0,3% d’excédant prévu par le gouvernement], comme le rapporte La Tribune.

 

 

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