La Chronique Agora

La Fed n'y va pas de main morte avec les taux

** Comme nous le soupçonnions, la Fed n’y est pas allée de main morte cette semaine. "Dans les faits, la Fed a mis son taux directeur à zéro", annonçait l’International Herald Tribune.

* Cette année a été une redite de 1929. Les autorités ne veulent pas voir les années 30 en plus.

* "Allant plus loin que l’anticipaient les analystes, la Banque centrale a fait passer son taux directeur dans une tranche entre zéro et 0,25%, un plancher record, ce qui mène les Etats-Unis aux politiques à taux zéro utilisées par le Japon durant six ans dans sa propre lutte contre la déflation".

* Comme prévu, les Etats-Unis suivent le modèle japonais… et leur propre modèle des années 30… des années 70… 80… 90… et 2000. L’emprunter, le prêter, le dépenser et l’imprimer. L’argent, bien entendu.

* Personne ne semble s’inquiéter du fait que ces politiques ne fonctionnent pas. La dernière fois que nous avons vérifié, le Japon était encore dans la déflation/récession par intermittence qu’il subit depuis 18 ans. Et plus récemment, le marché action japonais a atteint un plancher de 22 ans. Toute une génération d’investisseurs japonais n’a rien obtenu en l’échange de ses efforts. Les actions pour le long terme ? Heureusement que les Japonais ont une grande espérance de vie !

* Mais nous sommes tous Japonais, désormais. Sushi pour tout le monde ! La politique des taux zéro a été testée au Japon pendant de nombreuses années. Rien ne prouve qu’elle ait été efficace. Rien ! Nada ! Que dalle ! A présent, elle sera utilisée aux Etats-Unis… là encore pour de nombreuses années.

** En réalité, il n’y a que deux manières de se sortir de ce pétrin — à la hausse ou à la baisse. Les gens doivent trop d’argent… et ils ont investi dans trop de choses ne valant pas ce qu’ils les ont payées. Il n’y a pas de moyen facile de s’en sortir. Les erreurs sont les erreurs ; quelqu’un doit payer. Soit les gens qui ont fait les erreurs… soit les gens qui ne les ont pas commises.

* Les autorités pourraient simplement s’en aller… et laisser le marché se débrouiller. Cela signifierait une HAUSSE des rendements sur les capitaux. Le véritable argent se fera rare. Les gens paieront pour leurs erreurs — et ça coûtera cher. Les épargnants seront récompensés par des rendements plus élevés. Ils épargneront plus. Les prix chuteront. L’économie passera par une réorganisation difficile, mais relativement rapide. Les dettes seront perdues ou remboursées. Les investisseurs perdront de l’argent… les entreprises et les consommateurs aussi. Ce sera long et difficile, mais peu à peu, les bilans seront renforcés… et l’économie sera recapitalisée par l’épargne. Malgré tout, beaucoup de gens feront faillite. Et des émeutes se déclencheront… lorsque les lumpenmécontents descendront dans la rue pour exiger que leur gouvernement "fasse quelque chose".

* Bien entendu, le gouvernement ne peut rien faire… sinon causer plus de problèmes. C’est le chemin le plus facile — celui que les autorités ont emprunté… en faisant passer les taux d’intérêt à zéro et en dépensant des milliers de milliards de dollars qu’elles n’ont pas. C’est le chemin facile qu’elles parcourent depuis des années… c’est là qu’elles se sentent le plus à l’aise… et qu’elles peuvent faire le plus de dégâts. Au lieu de recapitaliser l’économie en favorisant les épargnants, les autorités continuent le processus de décapitalisation. Les rendements baissent au lieu d’augmenter. Les épargnants sont découragés… et dévalisés.

* L’argent perd de plus en plus de valeur… ce qui finit par réduire l’endettement par le biais de l’inflation. Les dettes des dépensiers imprudents sont effacées. Les prêts hypothécaires partent en fumée. Les spéculateurs gagnent des fortunes grâce à des paris au hasard. Les débiteurs s’en sortent avec une longueur d’avance — et cela inclut le plus grand débiteur de tous, le gouvernement fédéral américain.

* Pendant ce temps, les épargnants, les ménages ordinaires, les contribuables, les créditeurs étrangers, les enfants à naître — tous en paient le prix.

* Nous ne discutons pas les faits. Personne ne nous a demandé notre avis, de toute façon (mais nous le donnons malgré tout).

* Les autorités sont sur le chemin le plus facile, ça ne fait aucun doute. Mais jusqu’à présent, elles ne sont pas arrivées bien loin. Au lieu d’inflation, elles obtiennent de la déflation. Les prix à la consommation sont en baisse aux Etats-Unis. Les ventes aussi : les produits de luxe ont chuté de 33% depuis Thanksgiving.

* Et bien entendu, les mises en chantier sont en baisse… les états fédéraux réduisent leurs dépenses pour la première fois en 25 ans (ils n’ont pas de planche à billets, les pauvres)… et même le tout-puissant Goldman Sachs a dû annoncer sa première perte trimestrielle depuis qu’il est coté en Bourse.

* Si l’exemple japonais était la seule chose que nous devions observer, nous penserions que les autorités auraient une chance de gagner ce combat. M. le Marché est prêt et déterminé à baisser les prix. Jusqu’à présent, il ressort clairement gagnant.

* Mais d’autres exemples augmentent notre confiance dans les autorités. Elles finiront par y arriver.

* La baisse de taux "signifie que la Réserve fédérale devra utiliser de nouveaux outils, encore jamais essayés, pour lutter à la fois contre la récession et la pression à la baisse sur les prix à la consommation", disait l’article du International Herald Tribune. Jamais essayé ? Nous sommes prêts à parier que Gideon Gono peut leur montrer comment utiliser ces nouveaux outils.

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