La Chronique Agora

Inflation ou déflation : qu'en dit la Banque d'Angleterre ?

** La question qui taraude tout investisseur aujourd’hui — et qui pourrait exercer une très grande influence sur le sort de vos investissements — c’est de savoir qui de l’inflation ou de la déflation sera dominant au cours des deux prochaines années.

– Annonçons d’avance notre conclusion : nous parions sur l’inflation.

– Mais qu’est donc cette chose qu’on appelle "inflation" ?

– Si l’on en croit l’édition de 1962 du dictionnaire Webster, l’inflation est "une augmentation de la quantité de devises en circulation ou une expansion visible du crédit, qui entraîne une chute de la valeur de la devise et une augmentation importante des prix". Voici la définition classique.

– Mais pour ceux d’entre nous qui ne sont pas économistes, théoriciens, ou résidents d’une tour d’ivoire, l’inflation est ce qui a transformé une cannette de Coca à cinq cents en une cannette de Coca à 2 $. Et c’est ce qui a fait passer l’or de 32 $ l’once à 1 000 $… avant de l’emmener vers d’autres sommets encore plus hauts.

– La définition classique de l’inflation — une augmentation de l’offre de devises et/ou de crédit — et la définition du citoyen lambda — l’augmentation des prix — sont différentes, mais liées. Le premier excès entraîne le second.

– En ce moment même, l’offre de devises et de crédit augmente à un rythme alarmant aux Etats-Unis. Pourtant, les prix des biens et des services s’effondrent. Cette situation étrange a donc poussé beaucoup de gens à spéculer sur le fait que les forces déflationnistes allaient triompher des forces inflationnistes.

– Nous sommes sceptique.

– Le gouvernement américain s’est lancé dans une gigantesque expérience monétaire — une expérience qui ressemble plus à de la sorcellerie qu’à de la science. La Réserve fédérale est en train de faire sortir des milliards de dollars des chaudrons du Trésor pour aider à financer les plans de relance du gouvernement.

– Personne ne sait, encore moins Bernanke ou Timothy Geithner, si la Fed va faire sortir trop de dollars. Et personne ne sait si la Fed va pouvoir remettre dans le chaudron les dollars magiques utilisés pour vaincre la déflation quand elle n’en aura plus besoin.

** Enfin, en théorie, personne ne sait…

– En réalité, tout le monde sait : les dollars en surnombre ne retourneront jamais dans le chaudron. Ils vont s’échapper et se répandre dans l’économie au sens large, où ils vont sévir, en faisant monter le prix des oeufs à 10 $ la douzaine…ou 20 $… peut-être même 100 $.

– Les sorciers monétaires de la Fed — et ceux de toutes les autres banques centrales du monde — savent tout ce qu’il faut savoir sur les moyens d’encourager l’inflation, mais ne savent rien sur la façon de la freiner ensuite. De plus, l’inflation n’est pas exactement l’ennemi public numéro un. La plupart des banques centrales du monde s’inquiètent beaucoup plus de la déflation — à tel point qu’elles admettront ouvertement être en train d’imprimer des devises.

– "Le ministre des Finances, Alistair Darling, a laissé entendre que la Banque d’Angleterre pourrait imprimer des devises dès cette semaine pour aider à la relance de l’économie", rapporte Bloomberg News. "Les dirigeants de la Banque d’Angleterre ont demandé au Trésor la permission de créer de l’argent pour acheter des titres… la banque devrait recevoir l’autorisation d’utiliser pas moins de 200 milliards de livres sterling pour acheter des obligations gouvernementales et autres actifs"…

– Autrefois, une annonce aussi provocante aurait entraîné une panique et tout le monde aurait vendu la devise en question. Aujourd’hui, c’est à peine si elle attire l’attention. Résumons : la Banque d’Angleterre a déclaré au monde entier qu’elle allait imprimer pour 300 milliards de dollars de devises adossées seulement à du papier et de l’encre, et qu’elle utiliserait ces devises pour acheter des obligations gouvernementales. C’est choquant. Et pourtant, personne ne semble y prêter attention.

– La crainte du jour, c’est la déflation. Pas l’inflation.

– Le consensus prévisions/attentes ressemble à quelque chose de ce genre : une tendance déflationniste puissante va submerger toutes les impulsions inflationnistes pendant un an ou plus. Puis, une nouvelle tendance inflationniste va émerger ; elle va certainement se développer dans un style hyper-inflationniste équivalent à celui des années 70. L’inflation pourrait devenir un problème en 2011 ou 2012. Mais pas pour l’instant.

– Par conséquent, d’après ce consensus anonyme, l’argent intelligent ne devrait absolument pas mettre en place de couvertures contre l’inflation comme l’or, les matières premières ou les TIP (obligations ajustées à l’inflation). L’argent intelligent devrait plutôt se jeter sur les couvertures contre la déflation que sont les bons du Trésor à long terme.

– Il se pourrait que ce consensus bien propret soit déjà mort… il est même certainement mort né.

– Que se passera-t-il par exemple si l’inflation arrive plus tôt que prévu ? Et si la déflation anticipée par tous ne se produit jamais ? Les détenteurs de bons du Trésor à long terme pourraient en pâtir. Et ceux qui n’achètent pas d’or pourraient, au mieux, être très chagrinés.
 
 – Nous n’avons fait qu’aborder le problème, pour l’instant : rendez-vous lundi pour la suite de cette discussion…

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