La Chronique Agora

Idiotie spatiale

Apple, Nvidia, Vision Pro, investissement

La présentation du dernier gadget coûteux d’Apple nous rappelle le monde farfelu de la méta-finance…

La semaine dernière, le plus célèbre vendeur de rêve de tous les temps a rejoint la partie.

Cela fait des années qu’Apple est dans la zone d’échauffement des nouvelles technologies. Et, lundi dernier, c’était à son tour de frapper dans la balle, dévoilant la prochaine grande nouveauté censée révolutionner le monde de la tech. L’informatique spatiale.

De quoi s’agit-il ?

Nous n’en savons rien. Mais cela nous fait beaucoup penser à ce que Facebook a tenté de faire lorsque l’entreprise a changé de nom pour devenir Meta. Vous mettez un casque sur la tête et vous avez 12 caméras, 5 capteurs et 6 microphones qui travaillent pour vous. A quoi servent tous ces gadgets ? Nous ne le savons pas non plus, mais nous nous sommes de l’avis qu’ils vont faire perdre beaucoup de temps à beaucoup de gens.  Business Insider rapporte :

« Un nouveau produit a fait les gros titres à la suite de la dernière conférence d’Apple.

Le casque Vision Pro marque l’entrée du géant de la technologie dans le métaverse – bien que l’entreprise se soit abstenue d’utiliser ce mot.

Mais sur TikTok et Twitter, tout le monde a ri de la réaction du public face au prix exorbitant du Vision Pro. »

Montrez-moi l’argent !

Les rires ont fusé après qu’Apple a annoncé à son public qu’elle proposerait son nouveau gadget au prix de 3 499 $, soit, avec les accessoires, environ 10 % du revenu annuel d’un Américain moyen. Qui va les acheter ? Avec quel argent ?

Selon la publicité, cet appareil « vous emmènera dans une autre dimension… un autre monde » avec une « réalité mixte ». Le message nous échappe. Les trois dimensions dont nous disposons déjà nous semblent tout à fait adéquates… et notre monde réel, tel qu’il est, est suffisamment effrayant.

Les fans ont propulsé les actions d’Apple à de nouveaux sommets depuis cette annonce. En hausse de 44% cette année, l’entreprise a désormais une capitalisation boursière de 2 850 Mds$. Cela représente 27 fois les bénéfices futurs et plus de 7 fois le chiffre d’affaires de l’entreprise.

La « réalité mixte » est ce que nous observons dans le monde financier. Apple est une entreprise fantastique. Elle est réelle. Elle fabrique de vrais produits. Elle réalise de vrais bénéfices. Mais à cette réalité se mêle une part importante de poudre de perlimpinpin. Une entreprise qui fabrique des appareils électroniques vaut-elle vraiment plus que tous les constructeurs automobiles américains… et toute l’industrie du BTP – réunis ? Vaut-elle vraiment un dixième du PIB américain ?

Nous en doutons. La technologie populaire est le fonds de commerce d’Apple. Mais les modes du monde technologique évoluent et il est peu probable qu’Apple soit en mesure de rester à la pointe.

La technologie la plus récente est toujours remplacée par une technologie encore plus innovante. Et, si l’avenir est toujours plein de surprises, celles-ci sont rarement positives pour les investisseurs qui achètent une entreprise technologique à un prix 27 fois supérieur à ses bénéfices futurs.

Les choses vont bien, les choses vont mal. Mais, lorsque vous avez misé gros sur un cheval vieillissant, dont la renommée et la fortune ne peuvent guère s’améliorer, le risque de perte est élevé.

Attention à l’écart

La semaine dernière, nous avons exploré l’écart entre la réalité… l’espoir, les rêves… et le futur au conditionnel.

Nous avons estimé que ce qui sépare le rêve de la réalité, si l’on ne prend que le XXIe siècle en compte, s’élève à 160 000 Mds$ moins 25 000 Mds$… soit environ 135 000 Mds$. C’est le montant – grosso modo – de la baisse de prix que les actifs devraient subir dans le monde entier pour être raccord avec l’économie réelle des biens et des services.

Ce calcul est très approximatif ; il vise simplement à montrer qu’il y a un grand défi à relever. Les choses finissent toujours par se rééquilibrer… et, d’une manière ou d’une autre, tôt ou tard, les prix des actifs et la production réelle devront retrouver des niveaux qui se correspondent. Pourquoi, quand et comment… cela reste à déterminer.

Nvidia illustre ces propos. Soit l’entreprise va augmenter sa production de puces (pour en sortir environ 40 fois plus de ses usines) et elle vaudra réellement sa capitalisation boursière… Soit le prix de ses actions va baisser. Ses actions vaudront peut-être vraiment 391 $ un jour … ou peut-être pas.

Espace à louer

Il en va de même pour l’ensemble de la structure du marché – actions, obligations, biens immobiliers. Soit leur valeur a augmenté de 160 000 Mds$ au cours des 23 dernières années. Soit ce chiffre n’est qu’une feinte… une fraude imposée par les banques centrales qui impriment de la monnaie dans le monde entier.

Et que dire des 32 000 Mds$ d’obligations américaines ? Combien valent-elles vraiment ? Combien vaudront-elles si la Fed continue d’augmenter les taux d’intérêt… ou laisse les taux d’intérêt augmenter d’eux-mêmes ? Combien vaudront-elles si elle ne le fait pas ?

Etes-vous allé à San Francisco récemment ? Entre un quart et un tiers des bureaux sont vacants. Même dans les immeubles occupés, seuls un tiers à la moitié des travailleurs se présentent au bureau. Les propriétaires ont souvent eu recours à des crédits à court terme bon marché pour acheter leurs immeubles, comptant sur les loyers pour rembourser leurs prêts. Aujourd’hui, ils doivent se refinancer à des taux plus élevés… avec moins de revenus locatifs. Combien valent ces immeubles aujourd’hui ?

Combien vaut Apple ? Nvidia ? L’ensemble des prix des actifs qui ont bondi ?

Nous n’en savons rien.

Mais nous allons tous le découvrir.

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