La Chronique Agora

La folie monétaire de la BCE

Christine Lagarde

Même si la Fed annonce une réduction de son plan d’aide, Christine Lagarde maintient le cap : dans la Zone euro, la politique monétaire continuera telle quelle, peu importe ce que font les autres banques centrales…

Fin octobre, en réponse à une question après sa réunion, la BCE a déclaré ne pas envisager de coordonner la politique de la BCE avec celle des autres banques centrales.

Interrogée sur le taper (la réduction progressive de la taille du bilan d’une banque centrale) Christine Lagarde a répondu qu’elle ne coordonnerait pas sa politique avec les autres banques centrales, expliquant que, selon elle, « les comparaisons sont ‘odieuses’, simplement parce que nous n’avons pas les mêmes économies ».

En clair, cela voulait dire que la politique de soutien de la BCE continuerait même après le taper américain, que l’euro allait baisser par rapport au dollar, que l’or exprimé en euros allait monter et que les Bourses européennes allaient bénéficier de flux de capitaux spéculatifs.

C’est bien ce qui s’est produit, et c’était certainement ce que recherchait Lagarde, laquelle gère la BCE quasi exclusivement au profit des pays comme la France.

Cela veut dire également que Lagarde recherche délibérément une inflation supérieure et une baisse du pouvoir d’achat des salaires.

La BCE  va donc maintenir les taux d’intérêt européens plus bas et plus longtemps, quelle que soit la voie empruntée par la Fed, la BoE et les autres banques centrales mondiales.

Comme je l’avais analysé lors de la nomination de Lagarde par Macron, elle fait de la politique, elle ne connaît rien à la monnaie et elle finance les déficits et dépenses des Etats sans douleur.

Pendant ce temps, les déséquilibres s’accumulent.

Les taux montent, l’euro baisse

La semaine dernière, malgré l’accélération de la hausse des prix, les taux ont fortement baissé, que ce soit les rendements grecs (de 5 points de base), portugais (7), italiens (9), espagnols (8), allemands (8) ou français (9). L’écart entre les obligations françaises et allemandes à 10 ans s’est légèrement rétréci à 35 points de base.

Le 6 novembre, Reuters notait déjà des réactions aux remarques de Lagarde :

« Les derniers commentaires de la Banque centrale européenne sur l’inflation ont lancé une autre grenade dans la trajectoire de l’euro.

Déjà en baisse de plus de 7% par rapport au dollar cette année, l’euro a chuté contre toutes les grandes devises après que la présidente de la BCE, Christine Lagarde, a effectivement annulé lundi [1er novembre] les attentes des marchés monétaires concernant une hausse des taux d’intérêt en 2022. »

L’euro a chuté de plus de 4% par rapport au dollar, depuis la clôture du 28 octobre. Cependant, ce qui est plus significatif, c’est que l’euro a perdu plus de 6% par rapport à l’or, entre le 28 octobre et le 19 novembre, alors que le dollar ne perdait que 3% face au métal précieux dans le même temps.

Depuis les remarques incendiaires de Lagarde, les contrats à terme sur le Bund allemand sont passés de 172,42 à la clôture du 19 novembre, contre 169,06 le 28 octobre, les rendements ayant chuté à 34 points de base contre 10 points de base. Alors même que les prix à la consommation en octobre ont atteint un sommet de 13 ans à 4,1% outre-Rhin.

Les épargnants allemands sont les plus réprimés financièrement dans le monde développé : les rendements réels dégringolent sous les 3%.

Les incendiaires crient au feu

Un article du Financial Times vendredi dernier était intitulé « L’euro frappé par les paris que la politique monétaire de la BCE divergera de ses principaux pairs ».

L’article citait notamment Leandro Galli, gestionnaire chez Amundi, affirmant que « la BCE est également susceptible de faire preuve de prudence dans le resserrement de sa politique afin de ne déclencher aucune augmentation des coûts d’emprunt pour les membres plus endettés de la Zone euro comme l’Italie ».

Un comble : ce sont les incendiaires qui crient au feu !

Plus tôt dans la semaine, la BCE a émis un avertissement d’« exubérance » dans les secteurs du logement, des obligations pourries et des cryptomonnaies.

Un autre article du Financial Times, publié le 17 novembre, précisait le point de vue d’un représentant de la BCE : « Sa propre politique monétaire ultra souple, en vertu de laquelle elle a abaissé les taux d’intérêt en territoire négatif et acheté des milliards d’euros d’obligations, a accru les incitations à prendre davantage de risques, ce qui pourrait devenir excessif et conduire à l’accumulation d’un risque systémique. »

Par la suite, le même représentant de la banque centrale indiquait que la BCE refusait d’aller à contre-courant des marchés « en resserrant la politique monétaire plus qu’il n’est nécessaire pour atteindre son objectif d’inflation ».

Les investisseurs finiront par se rendre compte que les banques centrales n’ont aucune politique de sortie des programmes d’assouplissement quantitatif, de taux zéro et de taux réels négatifs.

Pour résumer, la politique de madame Lagarde a quatre conséquences :

Nous n’avons encore rien vu !

[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]

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