La Chronique Agora

La ferveur du pivot

Si, dans la vie privée, les erreurs sont rapidement corrigées, ce n’est pas le cas au sein du gouvernement.

Ce matin, une curieuse publicité est apparue sur l’écran de notre ordinateur.

« Voitures blindées… n’attendez pas. »

Nous ne pensions pas avoir besoin d’une voiture blindée. Y a-t-il quelque chose qui nous échappe ?

Les ventes d’armes à feu sont en augmentation depuis plusieurs années. Il y aurait maintenant 125 armes pour 100 hommes, femmes et enfants aux Etats-Unis.

Peut-être avons-nous aussi besoin d’une voiture blindée… pour nous protéger des armes à feu ! Et des grenades. La publicité montre une Mercedes 4×4 survivant à un attentat à la bombe.

Comme nous le rappelle le ministre argentin de l’Economie, Luis Caputo, le véritable problème d’un gouvernement dévoyé, en proie à la crise et à l’hyperinflation, n’est pas le choix des pronoms personnels, ni le financement de la chirurgie d’affirmation du genre, ni même sa politique en matière d’immigration.

Il s’agit plutôt de la « dépendance du gouvernement aux déficits budgétaires ». Qu’il gaspille l’argent en aides sociales ou en guerres, cela n’a pas vraiment d’importance. Ce qui compte, c’est qu’il dépense plus qu’il ne peut se le permettre. Au fil du temps, les déficits s’accumulent. La dette du passé pèse sur les dépenses actuelles. La corruption augmente. L’anarchie aussi.

L’Argentine doit 400 milliards de dollars qu’elle ne peut pas payer. Les Etats-Unis doivent 34 000 milliards de dollars qu’ils ne peuvent pas payer non plus.

La ferveur du pivot

L’inflation ou la mort, tel est le choix auquel ils sont tous deux confrontés. Soit ils continuent à financer l’économie fictive avec plus d’argent fictif, soit ils la regardent mourir. C’est la raison pour laquelle le choix de la Fed est aussi crucial… et Wall Street s’attend à ce qu’elle choisisse l’inflation. (Et elle a probablement raison.)

Les gauchos ont une longueur d’avance sur nous. L’inflation est le choix le plus simple à faire pour les décideurs politiques, qui ont recours aux déficits et à la planche à billets, plutôt qu’à des coupes budgétaires sévères. Mais les Argentins ont vu les dégâts qu’elle peut causer. Ils ont vu l’économie se transformer en un cauchemar de flambées des prix, de taux de change chaotiques et d' »erreurs » financières qui ont sapé la prospérité du pays et détruit la classe moyenne.

L’inflation a dépassé les 50% en 1973… puis les 700% en 1976. Entre 1974 et 1983, les Argentins mécontents – pour la plupart des rêveurs marxistes – ont kidnappé des riches, dévalisé des banques et livré des batailles à la police et à l’armée. C’était une époque à laquelle il aurait fallu une voiture blindée. En 1976, un coup d’Etat, mené par des généraux, a entraîné une vague de violence contre les militants de gauche, les étudiants et plus d’un spectateur innocent. Pas moins de 30 000 personnes auraient disparu, et nombre de leurs corps auraient été jetés dans l’océan.

Les généraux ont tenté de distraire l’opinion publique en déclenchant une guerre avec la Grande-Bretagne au sujet des îles Malouines. Ils ont été humiliés, ont perdu le pouvoir et, des années plus tard, ont été jugés. Le chef de la junte, Jorge Rafael Videla, est mort en prison après plusieurs années.

Aujourd’hui, après 70 ans d’addiction aux déficits, l’Argentine est entrée en cure de désintoxication. Javier Milei a l’intention de mettre fin à l’habitude de dépenser à outrance. Il dit qu’il va forcer la nation à faire une cure de désintoxication… en ne se contentant pas de laisser la bulle économique se dégonfler, mais en la réduisant lui-même en miettes.

Plus d’armes

Les Etats-Unis sont encore très loin de ce scénario. Personne ne s’inquiète des déficits budgétaires américains. Le déficit fédéral va atteindre les 2 000 milliards de dollars en 2024. Les journaux tirent-ils la sonnette d’alarme ? Les personnes influentes – depuis les chaires et les podcasts – avertissent-elles les Américains qu’ils feraient mieux de changer de cap ? Les politiciens paniquent-ils et font-ils tourner les tronçonneuses ?

Non. Ils donnent plus d’argent aux fabricants d’armes. ResponsibleStatecraft.org :

« Le Congrès met 25 milliards de dollars dans les chaussettes de Noël des entreprises du Pentagone

Il semblerait que les petits lutins de Noël aient ajouté plus de 1 200 augmentations de programmes au budget du ministère de la Défense pour 2024.      

La période des fêtes approche, et malgré tous les drames budgétaires qui se déroulent au Capitole, les législateurs ont déjà bouclé la plupart de leurs achats de Noël pour leurs enfants préférés : les sous-traitants du Pentagone. 

Grâce à de sibyllines ‘augmentations de programme’ des crédits du budget de la défense pour l’année fiscale 2024, dont la plupart n’ont pas de véritable justification, le Congrès a ajouté plus de 25 milliards de dollars aux comptes d’approvisionnement et de recherche du Pentagone pour l’année fiscale 2024. »

Dans la vie privée, les erreurs sont rapidement corrigées. Jugez-en par vous-même. Partez à Las Vegas avec toutes vos économies, et « investissez » en jouant aux machines à sous. Puis, sur le chemin du retour… ne manquez pas de faire un doigt d’honneur aux conducteurs de gros camions. Vous verrez bien ce qu’il se passe.

Inapte au travail

Mais les tronçonneuses ne fonctionnent pas toujours là où on en a le plus besoin, c’est-à-dire dans le secteur public.

Aujourd’hui, aux Etats-Unis, deux millions de personnes sont en prison… et trois autres millions sont « surveillées » par le système de justice pénale. Mais aucune d’entre elles n’est là parce qu’elle a déclenché une guerre meurtrière, gaspillé des millions d’euros ou menti aux électeurs. Vous pouvez travailler pour Amtrak ou œuvrer pour la guerre contre la drogue, dépenser des milliards de dollars sans résultat, année après année, et vous attendre à une augmentation de votre budget l’année suivante. Vous pouvez siéger au Congrès et voter en faveur de tous les textes législatifs erronés, malheureux et inutiles qui sont proposés… et vous pourriez quand même être élu président.

La moitié de vie d’une entreprise moyenne en phase de démarrage n’est que d’environ trois ans. La moitié des nouvelles entreprises disparaissent avant la cinquième année. Mais la moitié de la vie d’une loi, d’un règlement, d’une agence, d’un ministère, etc., est éternelle. Du moins, jusqu’à ce qu’une révolution, une guerre, une hyperinflation ou une autre calamité fasse exploser l’ensemble du système.

Il ne s’agit pas d’une caractéristique inoffensive du gouvernement. C’est la raison pour laquelle les gouvernements freinent tant le progrès humain… et pourquoi, s’ils peuvent s’en tirer, ils créent des problèmes de plus en plus graves.

C’est aussi ce que nous pensons être « ce qui n’a pas marché » au cours de cette terrible période de 40 ans, de 1980 à 2020. Et c’est pourquoi le marché des véhicules blindés pourrait attirer de plus en plus de capitaux.

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