La Chronique Agora

Une faillite de l’euro est-elle possible ?

▪ La Seconde Guerre mondiale a laissé l’économie européenne exsangue. Les vainqueurs ont presque autant souffert que les vaincus. Une dizaine d’années après la fin de la guerre, les Britanniques rationnaient encore le sucre et la viande.

Toutefois, malgré ces épreuves, l’histoire de l’économie européenne d’après-guerre est principalement une histoire de renaissance économique. Des décombres de la guerre, le continent européen a construit des décennies de croissance économique.

Dans la tentative de perpétuer et d’améliorer cette trajectoire de croissance, les principales nations d’Europe ont pensé qu’il serait préférable de rassembler leurs ressources. Elles ont donc formé « l’Union européenne » et ont abandonné leurs monnaies nationales en faveur de l’euro.

Bonne idée. Mais visiblement mal mise en oeuvre.

Lors d’un « travail de groupe » au collège, il y a généralement un excellent élève… et un cancre. Qu’arrive-t-il alors ? Le bon élève fait tout le travail pour s’assurer qu’il obtiendra son A habituel. Le cancre ne fait rien mais reçoit quand même le A qu’il n’aurait jamais pu décrocher tout seul.

C’est ça l’Union européenne.

Malheureusement pour lui, le cancre doit se débrouiller seul la plupart du temps. Il doit réussir des examens dans ses autres matières… comme « Perception des impôts, première année » et « Cours de rattrapage sur l’équilibre budgétaire ». Lorsque le cancre n’arrive pas à passer en classe supérieure, il n’y a pratiquement rien à faire pour changer la note obtenue… mis à part repasser au stylo-bille le F afin de le faire ressembler à un B.

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C’est ça le plan de sauvetage de l’Union européenne. Tous les élèves passent en classe supérieure, même ceux dont les résultats ont été très mauvais.

Mais au-dehors, dans l’école de la vraie vie, un F est un F. La Grèce a déjà échoué… et plusieurs autres « élèves » sont sur le point d’échouer eux aussi. Les dirigeants de la Zone euro essaient de changer les notes. Mais cette manoeuvre ne suffira sans doute pas. Un programme scolaire sans niveau de référence absolu n’a aucune valeur.

Au moment où l’UE a commencé à renflouer la Grèce, elle a abandonné les références absolues qui rendaient l’euro viable. Si l’UE avait appliqué ces références et avait fait sortir la Grèce hors du bloc euro, la crédibilité de l’euro aurait été validée. Sans cela, la valeur de l’euro devient aussi douteuse qu’un diplôme décroché sur Internet.

C’est pour cela que la crise grecque est devenue une crise de l’euro. En fait, la totalité du système des monnaies garanties sur du vent pourrait sombrer dans la crise.

▪ « Si les idées pouvaient faire faillite », observe James Grant dans la dernière édition du Grant’s Interest Rate Observer, « le modèle moderne de l’argent et de la banque aurait gagné en justice contre MF Global Holdings. Le concept de financement avec effet de levier dans un monde de papier monnaie et de risque socialisé mérite d’être réhabilité sous une procédure de sauvegarde intellectuelle de type Chapitre 11 ».

Le modèle monétaire mondial est en faillite — intellectuellement et dans les faits. Mais si jamais il existe une institution qui, de par sa taille, ne peut faire faillite, c’est celle des monnaies papier. Elle est trop énorme pour faire faillite, c’est pourquoi rien n’empêchera les banquiers centraux de la sauver.

En général, les banques centrales empruntent et/ou impriment de l’argent pour acheter des « actifs dépréciés ». En sortant ces actifs dépréciés du marché, les banques centrales espèrent redresser quelque peu la situation afin de stabiliser le système financier et, par extension, la valeur des monnaies qu’elles impriment.

Mais depuis que les banques centrales ont fonctionnellement déclaré illégale la faillite pour toutes les grandes institutions et pour les gouvernements du monde occidental — et certains du monde oriental –, la pourriture reste… et elle s’étend. La pourriture non seulement sape l’activité économique mais également tout le système monétaire mondial.

Jeter l’argent par les fenêtres — même de l’argent tout beau tout neuf — ne permet pas vraiment de se débarrasser de la pourriture ; elle ne fait que la répandre tout autour… comme un essuie-glace sec étale les fientes d’oiseaux sur le pare-brise.

Seule la faillite débarrasse complètement de la pourriture. Rien d’autre.

Mais puisque la faillite est devenue la non-option ultime, les plus grandes banques centrales impriment toutes de l’argent dans le but d’alléger les tensions économiques. Elles échangent cet argent contre des actifs risqués.

Dans le jargon élégant des tours d’ivoire économiques, les banques centrales habillent leurs manipulations de marché brutales et leurs renflouages déguisés. Ainsi, « contrefaçon » devient « assouplissement quantitatif » ; « user de mon influence au ministère des Finances pour sauver mes copains chez Goldman Sachs » devient un « programme de sauvetage des actifs à risque ».

Mais au final, les manipulations des banques centrales sont aussi maladroites, contre-productives et/ou illégales qu’elles le semblent en apparence. Le pire est que ces interventions de plusieurs milliers de milliards de dollars n’ôtent pas la pourriture du système financier ; elles ne font que la faire passer du secteur privé au secteur public.

Par exemple, la Banque centrale européenne (BCE) détient des actifs notés moins que AAA équivalents à 14 fois son capital. Une grande partie de ces actifs risqués sont les obligations d’Etat de la Grèce, du Portugal, de l’Italie et de l’Irlande. Si ces actifs, dans leur ensemble, perdent 7% de leur valeur, le capital de la BCE deviendra nul. (A noter, les obligations d’Etat de la Grèce, du Portugal, de l’Italie et de l’Irlande ont déjà perdu 30% à 60% de leur valeur).

Mais pas la peine de s’inquiéter au vu de ces chiffres ; c’est pour cela qu’existe la planche à billets — pour dissimuler la valeur des actifs que les marchés financiers déprécient.

Observant ces phénomènes, Grant conclut : « lors d’une tempête monétaire, on trouve des ports plus sûrs que les obligations d’Etat libellées en papier monnaie ».

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