La Chronique Agora

Les Etats-Unis sur les pas de la Corée du Nord ?

NORTH KOREA, PYONGYANG - July 24: Mansudae Monument at July 24, 2014 in Pyongyang, North Korea. Mansudae is the most respected monument of the late leaders of the DPRK.

De l’éducation à la culture, du commerce aux finances… Plus aucun domaine n’échappe à la mainmise politique. Et quand l’Etat dirige tout, ce n’est jamais la prospérité qui en résulte.

« Nous sommes capables de faire face à toutes les éventualités. » – Pete Hegseth, secrétaire américain à la Défense

Hegseth parlait ici de la manière de transformer un problème inexistant en problème majeur. Et de la manière dont les Etats-Unis devraient diriger le monde.

Le Groenland est un non-problème depuis que les Etats-Unis existent. Un non-problème, qui plus est amical. Pourtant, l’Associated Press rapporte que Pete Hegseth aurait admis que le Pentagone dispose de plans d’urgence pour une éventuelle invasion du Groenland, et même du Panama. Si nécessaire.

Donald Trump prétend « diriger le pays… et le monde ». Une telle description de poste ne figure nulle part dans la Constitution. Les Etats-Unis étaient censés être un pays d’individus libres, maîtres de leur propre existence, jouissant de la vie, de la liberté et de la poursuite du bonheur, sans entrave de la part des autorités fédérales.

Le président était censé appliquer les lois du pays, telles qu’elles sont définies dans la Constitution et précisées par le Congrès et les tribunaux. Son rôle principal était de protéger le peuple contre son gouvernement. En d’autres termes, il n’était pas censé diriger le pays ; c’est le pays qui était censé le diriger, il en est le principal « fonctionnaire ». Quant au monde, il peut se débrouiller tout seul.

Mais bon sang… nous sommes en 2025. Et la politique est en plein essor. La force militaire est l’expression ultime de la politique. Hegseth est prêt à envahir n’importe quel pays, n’importe quelle ville ou n’importe quel Home Depot.

A tout moment, une société ne peut produire qu’une quantité limitée de richesses. Elle peut les consommer. Ou bien les épargner et les investir pour produire davantage à l’avenir. La véritable question « politique » est donc la suivante : qui décide vraiment ?

En règle générale, les autorités fédérales gaspillent cette richesse. Et plus elles en contrôlent, plus la société s’appauvrit.

Comparez la Corée du Nord à la Corée du Sud : même territoire, même climat, même population. Ce qui fait la différence, c’est la politique. Au moment de leur séparation, le Nord était plus riche que le Sud, car il possédait davantage d’industries. Même en 1970, le PIB par habitant dans le Nord dépassait les 350 dollars, contre à peine 250 dollars dans le Sud.

Aujourd’hui, le PIB par habitant de la Corée du Nord plafonne à 640 dollars, tandis qu’il dépasse les 35 000 dollars au Sud.

Voilà le pouvoir destructeur de la politique. Le Nord en regorge. Le Sud, beaucoup moins. La Corée du Nord organise presque chaque année un défilé militaire. Le Sud, très rarement.

Peu importe le nom qu’on lui donne. Laissez les politiciens diriger votre économie – comme c’est le cas en Corée du Nord – et vous obtiendrez pauvreté et misère.

Dans les années 1930, par exemple, le Grand Chef de l’Allemagne a semblé électriser le pays. Les usines tournaient à plein régime. Le chômage avait disparu. Les visiteurs étrangers étaient impressionnés.

Mais le Grand Chef avait choisi de privilégier la politique – chars et avions en sortie de chaîne, au lieu de tracteurs et d’automobiles. Une grande partie de la production nationale étant consacrée à l’armement, les Allemands ordinaires se sont progressivement appauvris jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale. Les jeunes femmes recevaient des rations si réduites que les autorités sanitaires craignaient qu’elles ne puissent même concevoir un enfant.

Et maintenant, aux Etats-Unis, un autre Grand Chef a pris le pouvoir. Les entreprises américaines avaient l’habitude de négocier elles-mêmes leurs accords commerciaux. Désormais, c’est l’équipe de Trump qui décide avec qui ils feront affaire et à quelles conditions.

Le New York Times rapporte :

« Depuis son entrée en fonction en janvier, le président Trump a annoncé vague après vague de tarifs douaniers, dans le cadre d’un vaste effort qui, selon lui, permettrait d’obtenir de meilleures conditions commerciales avec d’autres pays. ‘Cela s’appelle la négociation’, a-t-il récemment déclaré. »

Le président pense aussi qu’il devrait décider du taux d’intérêt que les citoyens doivent payer. USA Today :

« Le président Donald Trump a cité de nouvelles données sur l’inflation pour continuer à faire pression sur le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, afin qu’il abaisse les taux d’intérêt, le qualifiant ‘d’imbécile’, tout en précisant qu’il ne chercherait pas à le renvoyer.

‘Nous n’arrivons pas à faire en sorte que ce type le fasse’, a déclaré Trump à propos de la baisse des taux par Powell. ‘Et les fake news disent : ‘Oh, si vous le virez, ce serait terrible.’ Je ne vois pas pourquoi ce serait si grave… mais je ne vais pas le virer.’ »

Autrefois, l’éducation était une affaire privée, entre l’élève et son école. Aujourd’hui, les politiciens ont envahi les salles de classe… et les vestiaires des filles.

Le New York Times rapporte :

« La douzaine de membres du conseil d’administration du prestigieux programme Fulbright, qui promeut les échanges éducatifs internationaux, ont démissionné mercredi… Les membres craignent que des responsables politiques du Département d’Etat, qui gère le programme, n’agissent illégalement en annulant l’octroi de bourses Fulbright à près de 200 professeurs et chercheurs américains… »

Mais le même phénomène s’étend à l’ensemble de l’économie. Les autorités fédérales utilisent l’argent du contribuable – et de la fausse monnaie ! – pour s’immiscer partout. Peu à peu, les gens deviennent si dépendants qu’ils n’ont plus d’autre choix que d’accepter tout ce que veut l’administration fédérale.

Le New York Post :

« Les Etats-Unis flirteront avec une possible crise financière si le Congrès ne parvient pas à adopter le projet de loi du président Trump, le One Big Beautiful Bill Act, a averti mercredi le secrétaire au Trésor, Scott Bessent.

M. Bessent a insisté sur la nécessité de prolonger la Tax Cuts and Jobs Act de 2017, incluse dans ce méga-projet de loi, et a prévenu qu’une hausse d’impôts de 4 000 milliards de dollars – conséquence d’un échec – aurait des effets dévastateurs sur le système financier.

‘Monsieur, je pense que cela pourrait déclencher une crise financière comme nous n’en avons pas vu depuis 2008–2009 [la dernière crise provoquée par les autorités fédérales]…’ »

Et pourquoi laisser la haute culture tranquille ? Le président assiste à des compétitions de catch professionnel, et Lee Greenwood se produit à ses rassemblements. Et voilà qu’il s’invite au Kennedy Center.

USA Today rapporte :

« Le John F. Kennedy Center for the Performing Arts est la première scène culturelle des Etats-Unis depuis des décennies. Le président Donald Trump a annoncé […] un remaniement en profondeur du Centre Kennedy, comprenant le licenciement de plusieurs membres du conseil d’administration, dont le président David Rubenstein. Et Trump a nommé le remplaçant de Rubenstein : lui-même. »

Bien entendu, il n’a jamais été logique que les contribuables financent la Fed, ses accords commerciaux et ses déficits… ni qu’ils soutiennent le Kennedy Center, NPR, PBS, les boursiers Fulbright, Harvard ou tout autre gouffre à fonds publics. Mais au lieu de fermer le robinet, l’équipe Trump veut simplement s’en emparer et « diriger » à peu près tout.

Voici notre prévision : l’économie réelle va s’affaiblir. Et la valeur réelle des industries américaines continuera de décliner.

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