La Chronique Agora

Des guerres parfaitement sottes

▪ L’administration Obama est engagée dans trois guerres parfaitement sottes.

Il y a la guerre en Irak. Il y a la guerre en Afghanistan. Et il y a la guerre contre la dépression.

En ce qui concerne la guerre en Afghanistan, nous ne savons pas qui les Etats-Unis affrontent. Un jour, c’est Al-Qaïda. Le lendemain, ce sont les talibans. Quelques jours plus tard, ce sont les "dissidents".

Un général qui avait mené les troupes soviétiques en Afghanistan a récemment commenté la stratégie d’Obama, consistant à augmenter le nombre de troupes. "On l’a déjà fait", a-t-il dit — ou à peu près. Le problème, c’est que c’est une impasse. Plus on fait venir de soldats en Afghanistan, plus le nombre de victimes augmente. Depuis des siècles, des dizaines de pays ont essayé de soumettre les tribus afghanes — d’Alexandre I à George Bush II. Tous l’ont regretté… si toutefois ils survivaient assez longtemps pour voir comment tournaient les choses.

▪ Mais notre sujet est l’argent, non la géopolitique. La guerre "ingagnable" qui nous intéresse le plus, c’est la guerre que les autorités mènent contre la dépression.

Nous rappelons aux lecteurs qu’en dépit des gros titres, les Etats-Unis et une bonne partie du monde vivent une dépression économique. En d’autres termes, ils sont confrontés à une longue période d’ajustement… durant laquelle les erreurs et les illusions de la précédente période de bulle doivent être purgées. Au niveau des ménages, cela implique de réduire les niveaux de dette. Lorsque la dette ne peut être remboursée — lorsque les prêts hypothécaires sont simplement trop élevés pour être supportables, par exemple — cela génère défauts de paiement et saisies.

Le taux d’impayés sur la dette de carte de crédit a grimpé aux Etats-Unis en octobre. Le chômage aussi.

Mais la plupart des gens… et des entreprises… s’adaptent à la dépression. Ils réduisent leurs dépenses. Les taux d’épargne grimpent. Les dépenses de consommation baissent.

▪ Et tandis que le secteur privé fait ce qu’il doit faire, le secteur public fait ce qu’il ne doit pas faire. Les autorités luttent contre la correction avec toutes les armes dont elles disposent dans leur arsenal. C’est typique… et c’était à prévoir : elles mènent le mauvais combat au mauvais moment pour les mauvaises raisons.

Des taux d’intérêt hyper-bas découragent l’épargne — alors que l’épargne, c’est justement ce dont la plupart des ménages ont besoin.

Les autorités soutiennent des banques en faillite et des entreprises mortes-vivantes — alors que ces institutions zombie devraient être enterrées pour que de nouvelles sociétés puissent prendre leur place.

Elles empruntent des milliers de milliards — alors que le secteur privé a désespérément besoin d’argent pour corriger les erreurs d’investissement commises durant l’ère de bulle.

Et elles chargent nos descendants de milliers de milliards de dollars de dettes — alors que la prochaine génération aura déjà bien assez de mal à régler ses propres problèmes.

Mais vous saviez déjà tout ça, n’est-ce pas ?

▪ Il y a du neuf, toutefois. Les autorités pensent avoir gagné le combat contre la dépression. Le Wall Street Journal annonce qu’elles baissent les armes. La Fed est désormais "en guerre contre la bulle", déclare-t-il. Et Tim Geithner affirme que la fin de son programme de renflouage à 700 milliards de dollars prendra bientôt fin.

Vous y croyez, cher lecteur ? Nous non. C’est une autre guerre parfaitement sotte. Il faudra de nombreuses années pour régler la dépression. Pendant cette période, les autorités américaines feront quasiment la même chose que ce qu’ont fait leurs homologues du Japon — gaspiller des munitions en renflouages, subventions, relances et âneries. Elles lutteront jusqu’à la dernière cartouche. Ensuite, elles trafiqueront leurs canons, feront faillite et se rendront.

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