La Chronique Agora

La dernière mode de l’investissement

investissement, zéro carbone

Votre portefeuille est-il tendance ? Si vous vous souciez de son rendement plus que de la dernière lubie de passage, ce n’est probablement pas le cas…

Nous parlions vendredi dernier de Larry Fink, le très riche patron de BlackRock, qui se voudrait aussi très cool. Pour atteindre ce but, il a adopté une autre mission, en plus de celle de gagner de l’argent. Il veut améliorer le monde dans lequel nous vivons.

A présent, si les entreprises veulent l’argent de Fink, dit-il, leurs dirigeants doivent en finir avec leur mentalité uniquement axée sur les profits. A la place, ils doivent « communiquer un plan décrivant comment leur modèle économique va être compatible avec une économie ‘zéro émission nette’ ».

Il veut dire par là zéro émission carbone… Et il précise qu’ils devraient faire en sorte que le réchauffement climatique ne dépasse pas de 2 degrés Celsius les moyennes préindustrielles, en éliminant d’ici 2050 les émissions nettes de gaz à effet de serre.

Pourquoi investir ?

Bien entendu, il existe des raisons valables justifiant que des PDG et des investisseurs privilégient les investissements axés sur des entreprises qui sauvent la planète. Ils peuvent en conclure que le cours de leurs actions va grimper, grâce à cette bonne publicité.

Ils peuvent penser que leurs employés seront plus motivés, puisqu’ils s’emploient à améliorer le monde, et pas qu’à gagner de l’argent. Ils peuvent même penser que cela va sauver la planète… et générer des entreprises plus rentables, à long terme.

Ou ils peuvent simplement penser, cyniquement, que cela les fait passer pour cool. Et dans le cas de Fink, cela pourrait l’aider à faire en sorte que l’argent continue d’affluer.

Si l’entreprise de Fink pèse désormais 10 000 Mds, ce n’est ni par accident ni par zèle. Et ce n’est ni la sueur ni l’inspiration qui va continuer à faire rentrer de l’argent, mais plutôt la politique, de manière générale.

Désormais, le capitaine d’industrie est censé changer de cap. Il ne suffit plus de ramener le bateau au port avec de bons produits et services.

Il doit se demander s’il est cool de n’avoir aucune femme au conseil d’administration, s’il est cool d’utiliser – dieu nous garde – des pronoms masculins dans les communications des entreprises, s’il doit passer à une flotte entièrement électrique, et quelle impression cela fera dans la presse.

Des gens ET des profits

« Les gens, pas les profits », sont importants, clament des bannières brandies dans des manifestations. Mais comment une entreprise peut-elle savoir sur quoi focaliser ses ressources ? Il n’existe aucune méthode reconnue permettant d’évaluer la coolitude… ni aucun marché fiable correspondant.

Et, pour ne rien arranger, plus vous prenez au sérieux votre quête de coolitude, plus les gens vous prennent pour un fou.

Il est assez facile de claironner que l’on s’intéresse à la « population » ou à la planète. Il est difficile de faire des profits. Quelle est la démarche la plus utile, pour les clients ? Pour les autres ? Ou même pour la planète ?

Presque un affront à la nature, un profit est le contraire de l’entropie. Il est son expression négative quand, au lieu de se disperser dans la désorganisation, les choses s’assemblent d’une manière spéciale, presque miraculeuse.

Et cela ne se produit que si les gens font en sorte que cela se produise. Ils ne sont peut-être pas motivés par un profit. Mais ils sont toujours guidés par lui. Et le résultat est un monde plus prospère dans lequel les gens vivent plus longtemps et obtiennent plus qu’ils ne désirent.

La quête de la coolitude serait tellement plus facile : les PDG pourraient utiliser l’argent de leurs actionnaires pour faire des casques pour bébé phoque, ou interdire la viande dans les restaurants d’entreprises, ou payer leurs gardiens de sécurité autant qu’ils payent leur meilleur commercial ou des chercheurs.

Mais, pour autant que nous le sachions, les profits honnêtes – pas ceux qui viennent du vol, de la fraude, du lobbying, des subventions, des crédits d’impôt ou des cadeaux du gouvernement – sont la seule façon de savoir si vous améliorez le monde ou non. Les profits nous disent que vos produits ou services valent plus que les ressources qui ont servi à les produire. Et que les gens veulent vraiment ce que vous vendez. Quel autre indicateur « d’amélioration du monde » existe-t-il ?

Et au fait, le trésor de BlackRock, l’entreprise de Fink, ces 10 000 Mds$ ? D’où sont-ils sortis ?

A suivre…

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