▪ Jetons un petit coup d’oeil à l’économie. Des bruits inquiétants se font entendre en Europe.
« Le retour de bâton », disait le Financial Times… en allusion à la « vague d’anti-austérité » qui s’est abattue sur l’Europe durant les élections du week-end dernier.
Si le Financial Times n’hésite pas à mélanger ses métaphores, nous non plus. Mais les nôtres sont quelque peu différentes. Ce qui s’est produit n’est pas un retour de bâton, mais une sonnette d’alarme. Elle retentit alors que les électeurs réalisent que le placebo — des mesures d’austérité bidon vendues à contrecoeur par l’euro-élite — ne fonctionne pas. Ils veulent un élixir avec plus de mordant. C’est pour cette raison que la gauche gagne du terrain.
En Grèce, le soutien aux partis de gauche a triplé depuis les dernières élections. Pourquoi en serait-il autrement ? Le ménage moyen a perdu près d’un tiers de ses revenus depuis que la récession (qui se poursuit) a commencé. Le chômage des jeunes est à 50%. Les jeunes Grecs craignent d’être une « génération perdue », contrainte à l’émigration pour trouver des emplois.
En France, François Hollande promet d’être raisonnable. Mais il a gagné l’élection en attaquant les choix d’austérité de Sarkozy. Il ne fera pas la même erreur que Sarkozy. Il préférera s’attaquer aux riches avec un taux d’imposition à 75%, et promet la « croissance », pas « l’austérité ».
Le problème, avec les partisans de l’austérité, c’est qu’ils ne sont pas allés assez loin. Il y a eu des réductions de budgets. Mais pas assez. Le déficit moyen est toujours aux environs de 5% — bien au-dessus de la limite de 3% de Maastricht. Ce qui laisse les nations déficitaires en position difficile. Les autorités ont réduit les dépenses, ce qui a mis en colère la gauche et ses suiveurs. Mais elles ont toujours des obligations envers les prêteurs, pour couvrir leurs déficits. Et chaque fois que les taux de chômage grimpaient… ou que le PIB baissait… elles devaient payer plus cher leurs emprunts.
▪ Quitte à choisir l’austérité…
La vraie austérité — avec des coupes profondes et des budgets équilibrés — pourrait fonctionner. Mais cela contredit tout le principe du gouvernement, qui est de transférer autant de richesse que possible des outsiders vers les insiders. De plus, de telles réductions déclencheraient probablement une révolution zombie.
La pièce de l’austérité se joue en Europe depuis deux ans. C’est pour cette raison que la moitié de l’Europe est en récession… tandis que l’autre moitié n’est pas loin. Les Européens en ont assez.
Ils semblent donc désormais abandonner l’austérité bidon pour se tourner vers la croissance bidon. Ils vont dépenser plus d’argent emprunté et imprimé. Cela ressemblera vaguement à de la « croissance ». Il y aura plus d’emplois et plus de revenus. Mais il y aura franchement peu de vraie prospérité.
Evidemment, courir après la croissance est précisément ce qui a mis le monde développé dans un tel pétrin. Trop de gens ont dépensé trop d’argent qu’ils n’avaient pas sur trop de choses dont ils n’avaient pas besoin.
Aux Etats-Unis, la Fed a encouragé cela avec des taux bas… puis, après que la bulle de dette du secteur privé a explosé, les autorités ont compensé le manque de dépenses en dépensant plus elles-mêmes.
En Europe, les autorités ont rendu la bulle de dette possible en établissant un seul bloc de devise… avec des taux harmonisés. Tout à coup, la Grèce et l’Irlande pouvaient emprunter aussi facilement, et aussi bon marché, que la France et l’Allemagne. C’est bien ce qu’elles ont fait : elles ont emprunté jusqu’à frôler la faillite.
A présent, François Hollande a un plan. Il veut que l’Europe ressemble plus aux Etats-Unis… avec une banque centrale qui prête directement au gouvernement, et la « mutualisation » du risque crédit. En d’autres termes, il veut faire ce qu’Alexander Hamilton a fait aux Etats-Unis en 1791, rendant les états collectivement responsables de leurs dettes. Il laissera ensuite la BCE imprimer l’argent pour acheter les obligations souveraines directement.
Oui, cher lecteur, la tendance vers la centralisation continue… avec une planification financière centralisée… de la contrefaçon en provenance des banques centrales… et tout le monde se ruinant de concert.
En Europe, comme aux Etats-Unis, c’est un pour tous… tous pour un…
… et chacun pour soi.