La Chronique Agora

Le cycle éternel de la folie américaine

Budget en panne, dettes explosives, bulles technologiques et spéculation politique : les Etats-Unis semblent pris dans une boucle sans fin.

Il y a les cycles d’endettement. Les cycles d’inflation. Les cycles de pouvoir. Les cycles de corruption. Les cycles de sommeil. Ou les cycles de lavage.

Les Etats-Unis traversent aujourd’hui un cycle de mise à l’arrêt bien connu. Le trafic aérien ralentit. Et l’IRS, le Fisc américain, a licencié près de la moitié de ses employés.

Les démocrates et les républicains n’ont jamais pris la peine d’adopter un véritable budget. Ils se reposent donc sur une succession de « résolutions temporaires » pour maintenir les flux financiers. D’après les informations disponibles, les républicains seraient au moins légèrement embarrassés par leur Big, Beautiful Budget Abomination (ou la Grande et Belle Abomination Budgétaire). Ils veulent conserver les baisses d’impôts, tout en espérant regagner un peu de crédibilité auprès des conservateurs en supprimant progressivement certaines dispositions de l’Obamacare.

Nous leur souhaitons bonne chance. Mais si l’on en juge par les 21 cycles de shutdown précédents, ils finiront sans doute par céder… et les dépenses irresponsables – pour les programmes intérieurs comme pour la puissance militaire – reprendront de plus belle.

Ray Dalio estime que la situation annonce un retour au cycle des années 1970. Fortune rapporte :

« Le fondateur de Bridgewater Associates, Ray Dalio, a déclaré que les investisseurs devraient consacrer jusqu’à 15 % de leur portefeuille à l’or, même si le métal précieux a déjà dépassé le seuil record de 4 000 dollars l’once.

‘L’or est un excellent moyen de diversifier un portefeuille’, a déclaré Dalio mardi lors du Greenwich Economic Forum, dans le Connecticut. ‘D’un point de vue strictement stratégique, vous devriez probablement y allouer environ 15 %… car c’est un actif qui performe bien lorsque les composantes traditionnelles du portefeuille chutent.’ »

Bien sûr, cela fait 26 ans que nous disons la même chose. Mais, à bien des égards, le début des années 1970 différait profondément d’aujourd’hui. L’or était alors bon marché. Il ne l’est plus autant désormais.

Certes, certains éléments du cycle des années 1970 (dépenses excessives, endettement, création monétaire et inflation) pourraient se répéter. Et nous espérons que l’or s’avérera à nouveau un antidote efficace au poison des politiques fédérales.

Mais à la différence des années 1970, alors que l’or monte, les actions montent elles aussi. Comme le note Charlie Bilello :

« Les marchés font la fête comme en 1999…

Le Nasdaq vient de franchir pour la première fois la barre des 23 000 points, établissant un nouveau record. Il n’a fallu que 27 jours à l’indice pour passer de 22 000 à 23 000 points – le délai le plus court jamais enregistré entre deux seuils de 1 000 points. »

Le S&P et le Dow Jones atteignent eux aussi de nouveaux sommets, le S&P enregistrant déjà 32 records depuis le début de l’année 2025. Les bénéfices du S&P ont progressé de 156 % sur la dernière décennie, mais les cours ont bondi de 248 %, bien au-delà de la croissance réelle de la production.

Une grande partie de l’euphorie des années 1970 reposait sur les blue chips du « Nifty Fifty ». Dans les années 1990, c’étaient les dot.com du NASDAQ. Cette fois-ci, la fièvre se concentre dans le monde de l’intelligence artificielle.

OpenAI est une entreprise privée. Mais grâce à ses levées de fonds, sa valorisation est passée de 28 milliards de dollars à 500 milliards aujourd’hui, malgré une perte de près de 8 milliards sur le premier semestre et des pertes cumulées attendues de 110 milliards d’ici 2029.

Voici donc une entreprise qui, selon les projections, détruira plus de 100 milliards de dollars de richesse mondiale au cours des quatre prochaines années… et que Wall Street valorise pourtant à 500 milliards.

Cela ne fait pas plus de sens pour nous que pour vous. Et nous soupçonnons que cette valeur chutera, brutalement et soudainement. C’est ainsi que fonctionne le cycle boom-bulle-krach.

C’est aussi ainsi que fonctionne le cycle technologique : peu importe à quel point une innovation semble révolutionnaire, une technologie plus récente et plus séduisante finit toujours par la remplacer.

Mais il existe d’autres cycles, plus profonds et plus pernicieux, qui poursuivent également leur chemin. C’est le cas par exemple du « cycle de la corruption ».

Voici maintenant les dernières nouvelles concernant la promesse de Scott Bessent de manipuler le cours du peso argentin face au dollar américain, au profit de ses amis spéculateurs :

« Nouvel ambassadeur américain : les entreprises sur le point de réaliser des investissements ‘sans précédent’ en Argentine.

Peter Lamelas, nouvel ambassadeur des Etats-Unis en Argentine, affirme que les entreprises américaines – et plus largement le ‘monde occidental’ – s’apprêtent à investir des capitaux d’un montant inédit dans le pays. »

Vous voyez le tableau ?

Plutôt que d’encourager les investissements productifs sur le sol américain, Washington donne son feu vert à des placements à l’autre bout du continent. Pendant que l’Amérique souffre d’un manque d’investissements réels et que la population s’appauvrit, quelques initiés – Bessent, Citrone et consorts – s’enrichissent plus que jamais.

En Argentine, ce type de manœuvres est aussi courant et profond que le Rio de la Plata – le « fleuve d’argent » qui sépare l’Argentine de l’Uruguay. Et désormais, la lie du Potomac s’épaissit elle aussi.

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