La Chronique Agora

Croissance : selon le FMI, l’écart se creuse entre Occident et pays émergents

▪ « L’Amérique est de retour », a déclaré le président de tous les Américains. « Quiconque vous dit que l’Amérique est en déclin ou que notre influence a diminué ne sait pas de quoi il parle ».

Eh bien, cher lecteur, nous sommes là pour vous le dire : l’Amérique est en déclin.

Et si nous pouvons vous l’affirmer tout de go, c’est parce que nous ne sommes pas candidat aux élections. Si nous étions élu, d’ailleurs, nous demanderions immédiatement un nouveau comptage des bulletins de vote.

Quiconque vous dit que les Etats-Unis ne sont pas sur le déclin est soit en pleine campagne électorale… soit manque du plus élémentaire sens des réalités.

En 1969, plus d’un dollar sur trois de tous les revenus du monde était enregistré aux Etats-Unis. C’est ce que nous dit le rapport sur les perspectives économiques mondiales du FMI.

En 2000, ce chiffre avait baissé… mais pas de beaucoup. Les Etats-Unis empochaient encore 31% des revenus mondiaux. Ces 10 dernières années, en revanche, la part des Etats-Unis a largement chuté — perdant plus de 7%. Désormais, seuls 23% des revenus mondiaux sont générés par les Etats-Unis.

Il y a 10 ans, l’économie chinoise mesurait environ un huitième de celle des Etats-Unis. Elle en est désormais à 41%. Encore une décennie et ce sera la plus grande du monde. Elle est déjà plus grande selon plusieurs critères. Même si sa croissance revient à 7% par an, elle surpassera quand même les Etats-Unis d’ici une douzaine d’années.

▪ Les Etats-Unis ne sont pas les seuls…
Mais que voulez-vous, cher lecteur, le monde développé dans son intégralité est en déclin — les Etats-Unis menant la charge.

D’ici 2050, selon une nouvelle étude d’HSBC, les économies émergentes d’aujourd’hui — dans leur ensemble — seront plus conséquentes que l’Europe, les Etats-Unis et le Japon combinés.

Le New York Times nous en dit plus :

« La croissance de 2,8% de l’économie américaine au quatrième trimestre, au taux annuel, a été considérée comme étant modérément encourageante. Mais elle signifie qu’au cours des 10 précédentes années, l’économie [américaine] s’est développée au taux annuel composé de 1,7% seulement. Jusqu’au cycle actuel, il n’y avait pas eu une telle période prolongée de croissance lente depuis la Dépression ».

« Les dernières prévisions du Fonds monétaire international indiquent qu’une reprise de la croissance est peu probable dans un avenir proche, que ce soit aux Etats-Unis ou dans d’autres grands pays industrialisés. […] si les prévisions du Fonds de 1,8% de croissance réelle en 2012 et 2,2% en 2013 se révèlent exactes, le taux américain sur 10 ans à la fin 2013 aura chuté à 1,5%… Mais il sera encore légèrement supérieur au 0,9% de croissance composée enregistrée durant la décennie de 1929, année où la Dépression a commencé, à 1939 ».

« Pour la Grande-Bretagne, qui a subi une décennie horrible durant les années 70 […], le précédent plus bas d’avant-guerre se trouvait dans les 10 ans prenant fin au deuxième trimestre de 1983, à un taux annuel de 0,95%. Le chiffre pour la décennie menant à 2011 est de 1,4%, mais les prédictions du FMI indiquent que le chiffre de 2013 chutera à tout juste 0,94%. Le fonds prévoit que l’économie britannique se développera de seulement 0,6% cette année, et de 2% en 2013 ».

« La situation est pire encore en Italie, où le Fonds estime que l’économie devrait se contracter de 2,2% cette année, et de 0,6% l’année suivante. Si cela se produit, l’économie italienne sera plus petite à la fin 2013 qu’elle ne l’était 10 années auparavant. L’économie française devrait s’être développée au taux annuel de 1% sur la même période de 10 ans ».

▪ Pendant ce temps, les émergents… émergent
Tandis que les économies développées stagnent, les économies « émergentes » se développent. 19 des plus grandes économies de 2050 seront celles que nous considérons comme « émergentes » aujourd’hui. La Chine et l’Inde détiendront la première et la troisième place, les Etats-Unis étant pris en sandwich à la deuxième place.

Pour l’instant, nous ne parlons que de chiffres. Essayez d’imaginer un monde dans lequel les marchés émergents d’aujourd’hui ont plus de pouvoir économique, et bien plus d’habitants, que les leaders actuels. La Chine et l’Inde ne seront pas seules à décider des choses ; il y aura aussi le Brésil, la Turquie, la Russie, le Mexique et l’Indonésie.
[NDLR : Au lieu de suivre ce mouvement… anticipez-le ! Notre spécialiste a déjà repéré les puissances de demain : pour découvrir ses trois favoris — et vous positionner dès aujourd’hui sur leur développement, c’est par ici…]

Nouvelles technologies, nouvelles modes, nouvelles idées, nouvelles musiques, nouvelles voitures, nouveaux films… Tout ça viendra probablement de pays où, pour l’instant, les Occidentaux ont encore peur de boire l’eau du robinet. Pour l’instant, ils nous imitent. Bientôt, nous écouterons de la musique pop indienne, nous mangerons des fajitas et nous regarderons des films tournés à Djakarta.

▪ Militairement aussi, la puissance change de camp
La puissance militaire passera probablement elle aussi aux économies en croissance. Comme un body-builder absorbant une boisson énergisante, les émergents utiliseront leurs ressources en augmentation — aussi bien humaines que matérielles — pour « ajouter du muscle ». Sauf que leurs muscles seront jeunes, construits à partir de nouvelles technologies et de nouvelles techniques. Le secteur militaire gériatrique, coûteux, bureaucratique à l’excès et zombifié des Etats-Unis sera incapable de se montrer à la hauteur.

C’est une chose de raconter des âneries aux électeurs. Ils adorent ça ; ça les flatte, ça les réconforte.

Mais seul un idiot y croirait.

C’est bien ce qui nous inquiète. Les candidats semblent penser que le « déclinisme » n’est qu’un état d’esprit… et que le succès économique et militaire peut être obtenu par un acte de volonté.

« Le déclin », écrit Charles Krauthammer, « est un choix ».

C’est un choix que les candidats pensent pouvoir éviter simplement en donnant plus d’argent au secteur militaire américain.

« J’insisterai pour avoir une armée si puissante que personne ne songera jamais à la défier », ajoute Mitt Romney.

Mais les dépenses militaires ne sont pas un moyen de résister au déclin ; au contraire, elles en sont le signe… et la cause. Oussama ben Laden l’avait bien compris. En 2000, il avait déjà mis un grand empire, l’Union soviétique, à genoux — le poussant à dépenser de l’argent qu’il n’avait pas dans une guerre qu’il ne pouvait pas gagner. Il pensait pouvoir faire la même chose avec les Etats-Unis.

Pour l’instant, il semble qu’il ait eu raison.

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